«Saint-Loup, Saint-Triphon et les autres»
Lausanne: Exposition sur les noms de lieux attachés à des saints en Pays de Vaud
Lausanne, 12 juin 2013 (Apic) Quelle est l’origine des noms en «saint» des villages et lieux-dits du canton de Vaud, presque exclusivement protestant depuis 1536? Tradition locale ? Inertie ? Attachement au passé ? Les raisons qui ont conduit des communes ou des lieux de culte à se placer sous le patronage d’un saint sont souvent opaques. L’exposition «Saint-Loup, Saint-Triphon et les autres», présentée jusqu’au 31 août 2013 à la cathédrale de Lausanne propose un éclairage sur la question.
Dans le canton de Vaud, une bonne vingtaine de villages portent le nom d’un saint. Fait d’autant plus étonnant que la tradition protestante rejette habituellement le culte des saints. Comment se fait-il alors que le canton de Vaud, contrairement à Berne qui a modifié ses noms de lieux attachés à des saints, ait gardé ces appellations après la Réforme de 1536? «Nous n’avons pas la réponse à cette question !», confie à l’Apic le pasteur de la cathédrale de Lausanne, André Joly.
C’est ce mystère qui a poussé André Joly et l’enseignant François Berger à monter l’exposition. Un travail d’historien, fait de nombreuses hypothèses et d’aucune certitude. «On peut seulement estimer que des populations locales aient souhaité se mettre sous la protection d’un «grand» personnage. Il est aussi probable que des familles donatrices se soient placées sous une aile sanctifiée, telles celles qui ont pu se procurer une relique de saint», note le pasteur.
Des villages, mais également des lieux-dits vaudois ont été placés sous le patronage d’un saint. «Le site de Saint-Loup se trouve sur un plateau au-dessus du village de Pompaples, au pied du Jura. Une grotte domine le plateau de Saint-Loup, qui servait autrefois de demeure à un ermite. Dès la plus lointaine Antiquité, des hommes venaient en ce lieu pour prier et s’engager à servir Dieu. La tradition est aujourd’hui respectée, puisque ce site est connu pour son école de soins infirmiers et pour son Institution des Diaconesses fondée en 1852», raconte André Joly.
Des quartiers lausannois aux noms de saints
Plus étonnant encore, plusieurs quartiers à Lausanne, lieu très protestant s’il en est, ont pris le nom d’un saint, alors même qu’il n’y a jamais eu d’église. «Saint-Roch, par exemple, est le patron des lépreux. On a donné ce nom à l’hôpital construit dans ce quartier en 1494, et qui s’occupait à l’époque des pestiférés. Plus tard, c’est tout le quartier qui sera baptisé Saint-Roch», explique André Joly.
Toute une série d’églises protestantes à Lausanne portent également des noms de saints alors qu’elles ont été édifiées bien après la Réforme, voire récemment. «L’église de Saint-Jacques par exemple, construite en 1972, a été baptisée ainsi à cause de son édification sur le tracé de la route de Saint-Jacques-de-Compostelle», relève André Joly, qui tente une explication en guise de conclusion : «Même si les protestants ont une relation assez modérée avec les saints en tant que personnages de la tradition, ils gardent tout de même une affection pour les saints bibliques».
Encadré :
Une forêt portant le nom de Saint-Christophe, entre Aclens et Vuillerens : voilà tout ce qui subsiste d’un village totalement disparu. Saint-Christophe a pourtant bel et bien existé. Au Moyen-Âge, ce petit village, avec celui de Chibi, se trouvait sur le territoire d’Aclens. Chibi sera délaissé pour manque d’eau et Saint-Christophe détruit par un incendie.
L’église de Saint-Christophe, sise en fait à Chibi, sera reconstruite après la Réforme en 1610, avant d’être délaissée en 1741 lors de l’édification, au village d’Aclens, d’un temple plus modeste. On pense que les ruines de l’église de Saint-Christophe reposent à l’emplacement du cimetière actuel. (apic/cw)