Saint Jean Eudes bientôt 'docteur de l'Eglise'?
Saint Jean Eudes (1601-1680) pourrait rejoindre bientôt la liste des docteurs de l’Eglise. A l’occasion de sa fête liturgique le 19 août, I.MEDIA a interrogé le Père Jean-Michel Amouriaux, Supérieur général depuis janvier dernier de la congrégation de Jésus et Marie – les eudistes – fondé par le prêtre normand.
Saint Jean Eudes pourra-t-il rejoindre prochainement la liste des docteurs de l’Eglise?
Saint Jean Eudes avait été proclamé ‘Père, Docteur et Apôtre du culte liturgique des Cœurs de Jésus et de Marie’ lors de sa canonisation en 1925, et depuis ce projet du doctorat pour toute son œuvre est dans les esprits. En avril dernier, une étape importante a été franchie: les 13 volumes des Œuvres Complètes ont été déposés à la Congrégation pour les causes des saints pour y être étudiés par trois théologiens. Après ce processus d’au moins deux ans, nous poursuivrons avec la rédaction du dossier de postulation présentant l’éminence de la doctrine de saint Jean Eudes pour le bien de l’Eglise.
Qu’a dit le pape à ce sujet lorsqu’il a rencontré l’ancien Supérieur général et Mgr Luc Crépy, en tant que postulateur?
Au cours de cette rencontre du 3 décembre dernier, ont été remis au pape une lettre du Supérieur général en faveur du doctorat, ainsi qu’un livret argumenté. Le pape a montré son intérêt pour la démarche. Il nous a encouragé à la poursuivre, ce qui s’est traduit par la mise en route officielle de la cause du doctorat par la Congrégation pour les causes des saints.
Si le doctorat était prononcé, quel serait l’apport de sa doctrine pour aujourd’hui?
Saint Jean Eudes s’inscrit dans la grande tradition de l’Ecole française de spiritualité qui a fortement marqué l’évangélisation et la formation des fidèles et des prêtres pendant des siècles. Nous croyons qu’il serait profitable pour le bien de tous les fidèles de leur donner la possibilité de mieux connaître ce courant spirituel, pour développer aujourd’hui leur vocation de disciples-missionnaires et continuer la mission apostolique dans notre monde.
Un des développements les plus significatifs et les plus novateurs de la spiritualité eudiste est sa doctrine concernant le Cœur de Jésus et le Cœur de Marie avec lesquels tout membre de l’Eglise est appelé à ne faire qu’un. Cette unité ouvre sur un dynamisme renouvelé pour la mission, comme missionnaires de la miséricorde.
Dans son activité missionnaire, saint Jean Eudes a sans cesse exhorté les croyants à vivre leur baptême comme la source de l’union au Christ que chaque baptisé est appelé à déployer dans son existence. Là se trouve l’enseignement majeur de saint Jean Eudes : «former Jésus en nous». Il propose à tous un chemin d’intériorité où le Christ devient le cœur de la vie du chrétien. C’est dans la même perspective de vie intérieure et missionnaire que saint Jean Eudes a été un grand serviteur de la formation des prêtres, rappelant la grandeur et les exigences de leur vocation.
Jean Eudes
Né en 1601 en Normandie, Jean Eudes entre en 1623, dans la toute récente Société de l’oratoire de Jésus de France, rue Saint-Honoré, à Paris, où il est accueilli par le fondateur, le cardinal Pierre de Bérulle. Ordonné prêtre, il revient en 1627 en Normandie, touchée alors par la peste. Il échappe à l’épidémie et découvre l’abandon matériel et spirituel dans lequel vivent les campagnes. De ce constat, il tire une priorité pour son apostolat : si l’on veut rechristianiser la société, il faut former des prêtres, capables de tenir une paroisse rurale ou de prêcher des missions populaires. En 1643 il ouvre à Caen un séminaire et fonde une société de prêtres voués tant à la formation des séminaristes et du clergé qu’aux prédications populaires dans les paroisses : la congrégation de Jésus et de Marie, dite des Eudistes. De Caen, les séminaires eudistes essaimeront, du vivant de leur fondateur, à Coutances, Lisieux, Rouen, Évreux et Rennes.
Dès 1634, Jean Eudes songe à établir à Caen un «refuge» pour les «filles repenties», c’est-à-dire des femmes désireuses de quitter le libertinage ou la prostitution. C’est chose faite en 1641, avec la création un institut, qui deviendra l’Ordre de Notre-Dame de Charité.
Tout au long de sa vie Jean Eudes mènera une intense activité de prédication et de publication. Il aura prêché cent dix missions, d’un mois et demi, entre 1632 et 1676. Jean Eudes a également prêché devant la reine-mère Anne d’Autriche.
Mort en 1680, Jean Eudes a été béatifié par Pie X en 1909, et canonisé par Pie XI en 1925.
Docteurs de l’Eglise
La liste assez réduite des docteurs de l’Eglise comporte à ce jour 36 noms dont quatre femmes. Un docteur de l’Église est une personne dont l’Église reconnaît l’autorité exceptionnelle dans le domaine de la théologie (eminens doctrina). La profondeur de leur foi, alliée à la sûreté de leur pensée et la sainteté de leur vie donnent à leurs écrits et leur enseignement un poids et une influence durable et remarquable dans le développement de la doctrine chrétienne. Les quatre derniers docteurs de l’Eglise sont sainte Thérèse de Lisieux (1873–1897), Jean d’Avila (1499–1569 ) Hildegarde de Bingen (1098–1179) et Grégoire de Narek (951–1003)
(cath.ch/imedia/ap/mp)