Rome appelle les paroisses à vivre une «conversion pastorale»
La Congrégation vaticane pour le clergé appelle les paroisses à vivre une véritable «conversion pastorale» pour «rendre l’Evangile proche du peuple». Dans son instruction Sur la conversion pastorale de la communauté paroissiale au service de la mission évangélisatrice de l’Eglise, publiée le 20 juillet 2020, la Congrégation rappelle que si une paroisse peut être confrontée au manque de prêtres ou à d’autres difficultés liées à l’évolution de la société, elle ne doit jamais être «emprisonnée dans l’immobilisme», mais au contraire faire preuve de créativité.
Approuvée par le pape François le 27 juin et signée le 29 juin dernier par la Congrégation pour le clergé (CPC), l’instruction «sur la conversion pastorale«, texte de 24 pages, vient prolonger les instructions paroissiales précédentes, à commencer par Ecclesia de mysterio (1997) et Le prêtre, pasteur et guide de la communauté (2002). Elle ne contient aucune nouveauté législative mais explicite les normes existantes au regard des changements qui s’opèrent dans la culture actuelle.
Rendre l’Evangile proche du peuple
La paroisse ayant pour mission originelle de «rendre l’Evangile proche du peuple», cette nouvelle Instruction appelle à une «conversion pastorale», c’est-à-dire à une véritable «réforme des cœurs» face aux évolutions sociétales observées ces dernières années. Pour que la paroisse ne soit pas «emprisonnée dans l’immobilisme», le document insiste sur l’importance accordée par le pape François à la créativité.
Chaque paroisse doit être un «reflet du mystère de l’Eglise», explique par ailleurs Mgr Andrea Ripa, sous-secrétaire de la CPC, soulignant dans un commentaire livré par le Saint-Siège que ce fondement prime sur la nécessité d’une potentielle »réforme des structures» des paroisses. N’étant aujourd’hui plus le lieu du rassemblement du fait de l’accroissement de la mobilité et de la culture numérique, la paroisse est appelée à trouver d’autres modalités de proximité par rapport aux activités habituelles, est-il préconisé, et à ne plus limiter son action missionnaire au seul territoire.
Eviter les réformes trop précipitées
Cela suppose «un changement de mentalité», notamment l’exclusion toute vision strictement bureaucratique et administrative de son fonctionnement, souligne la CPC, condamnant toute «cléricalisation». En outre, il ne s’agit en aucun cas, face aux problématiques parfois très complexes que rencontrent certaines paroisses, de «marchander» la vie sacramentelle ou encore de donner l’impression que la célébration des sacrements puisse faire l’objet de tarifications.
Le document conseille de ne pas conduire des réformes trop précipitées en oubliant les personnes qui sont sur le territoire, chaque projet devant être pensé dans la vie réelle de la communauté. S’ensuit un nombre de recommandations sur les différents cas de figures et les rôles que jouent chacun des membres de la communauté paroissiale.
La question des regroupements de paroisses
Le texte donne des instructions précises sur la façon de mener un regroupement de paroisses, rejetant toute suppression de paroisse au nom d’une pénurie de clergé diocésain ou d’une situation financière générale du diocèse. Seule la situation spécifique des fidèles peut être invoquée. En cas de fermeture d’une paroisse, la CPC invite à laisser l’église ouverte aux fidèles et envisage dans certains cas la réduction du lieu à un usage profane si celui-ci est «non inconvenant».
Le document rappelle la variété des formes paroissiales existantes dans le droit canon, notamment celle du «vicariat forain», regroupement de paroisses dans une zone donnée sous la direction d’un prêtre. Ce genre de regroupement doit prendre en compte l’homogénéité sociologique des lieux regroupés, insiste le document, et garantir à chaque paroisse son autonomie, notamment par le biais d’un Conseil pour les affaires économiques, mais aussi par un Conseil pastoral. Cependant, il est aussi encouragé dans de tels cas de regrouper certains services pastoraux, tels la catéchèse ou la charité.
Le curé, seul pasteur en toute situation
Le texte rappelle l’importance de l’office du curé, qui ne peut être remplacé par un gouvernement collégial de la paroisse telle une «team responsable» ou une «équipe responsable». La seule exception concerne les cas de regroupement de paroisses confiés à plusieurs prêtres, qui agissent chacun comme des curés «à tous les effets».
Cependant, dans ce cas de figure, l’un de ces curés doit être désigné modérateur afin de coordonner l’action commune avec les autres curés et son évêque. Il doit par ailleurs assumer la représentation juridique. Par ailleurs, la CPC encourage la vie commune des prêtres d’une même communauté paroissiale ou «fraternité sacramentelle», qui peut servir d’exemple à toute la communauté.
Les diacres exercent leur ministère au sein de la paroisse dans deux domaines: l’évangélisation et la charité. Ils n’ont pas pour fonction la charge des âmes comme le curé, insiste la CPC. Les personnes consacrées peuvent elles aussi jouer un rôle important qui découle de leur état – en tant que «suite radicale» du Christ – et de leur mission – selon leur charisme particulier, par exemple pour les jeunes, la catéchèse… etc.
La participation des laïcs
Il est demandé aux fidèles laïcs «un engagement généreux au service de la mission évangélisatrice» par le témoignage de leur vie et l’acceptation d’engagements qui leur correspondent au service de la paroisse. Dans un cadre exceptionnel – prévu par le droit canon – lié à un manque de prêtres, il peut leur être confié – tout comme à un diacre, à un groupe de personnes ou à un consacré – une «participation à l’exercice de la charge pastorale».
Ils sont alors sous la direction d’un prêtre nommé «modérateur de la charge pastorale», qui a le pouvoir et les fonctions de manière exclusive, sans en avoir l’office. «Le diacre et les autres personnes non ordonnées, qui participent à l’exercice de la charge pastorale, peuvent accomplir les seules fonctions qui correspondent à leur état de diacre ou de laïc», souligne l’instruction.
Des dénominations à bannir
Les diacres, consacrés et laïcs, ayant des responsabilités ne peuvent cependant pas être appelés «curé», «co-curé», «pasteur», «chapelain», «modérateur» ou «responsable paroissial», souligne le document. Il faut privilégier les termes «coordinateur pastoral de…», «coopérateur pastoral», assistant pastoral ou «chargé de… (un secteur de la pastorale)». Les laïcs ne peuvent pas prêcher d’homélie pendant la célébration eucharistique, souligne encore la CDC.
Possibilité existe cependant pour les laïcs d’être désignés «lecteurs» ou «acolytes», selon les dispositions canoniques. Ils peuvent célébrer la liturgie de la parole les jours de fêtes, et exceptionnellement administrer le baptême et célébrer le rite des obsèques. Face au manque de prêtre, l’évêque peut aussi déléguer l’assistance aux mariages à des laïcs. (cath.ch/imedia/cd/be)