RDC: colère après l’intervention d’un chef rebelle lors d’une messe
La participation d’un chef du mouvement rebelle M23 à une messe, le 14 juillet 2024, au Nord-Kivu (République démocratique du Congo-RDC), a suscité une polémique dans le pays. L’Église catholique a précisé qu’il ne s’agissait pas d’un soutien au groupe proche du Rwanda.
Le gouvernement congolais et l’ONU accusent depuis des années le Rwanda de soutenir la rébellion menée par le M23 dans la zone frontalière entre les deux pays. Début juillet 2024, des chercheurs des Nations-Unies ont conclu que «des officiers rwandais ont, de facto, pris le contrôle et la direction des opérations» du M23. Celui-ci a accru son contrôle territorial à l’est de la RDC. Selon l’ONU, les troupes rwandaises, estimées à 4000 soldats, dépasseraient même en nombre les miliciens du M23. Cette situation a conduit à une dégradation supplémentaire des relations diplomatiques entre Kinshasa et Kigali, ainsi qu’à une augmentation du ressentiment contre le Rwanda dans la population congolaise.
Les experts de l’ONU accusent ainsi les autorités rwandaises d’avoir «violé l’intégrité et la souveraineté de la RDC» et les jugent «responsables des actions du M23» par le soutien qu’elles apportent à leur «conquête territoriale».
Vidéo de propagande virale
C’est dans ce contexte tendu, que la présence de Cornelio Nangaa, coordonnateur politique de l’Alliance du Fleuve Congo (AFC), une faction du M23, à la messe dominicale dans l’église de Rutshuru, dans le diocèse de Goma, a été relayée par la chaîne YouTube de l’AFC. Selon le média, les centaines de fidèles présents ont réservé un accueil «délirant» à Cornelio Nangaa.
Dans cette vidéo de propagande d’environ deux minutes, il s’adresse aux fidèles, en majorité des femmes et des jeunes filles, proclamant à l’autel: «Je dis merci au Seigneur de nous avoir permis de prier ensemble, ce jour. Cet immense honneur pour ma modeste personne de bénéficier de votre chaleureux accueil». Et de poursuivre: «Ma posture personnelle ne compte pas, car je me présente devant l’éternel, notre Dieu, en toute humilité».
Pas de positionnement politique de l’Église
La vidéo, qui est devenue virale dans le pays, a provoqué la colère des Congolais, amenant la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) à prendre position. Dans un communiqué publié le 16 juillet, le Père Donatien Nsholé, porte-parole de la CENCO, assure que la présence du responsable rebelle était «loin d’être l’expression d’un soutien de l’Église catholique à la rébellion». Il a affirmé qu’il s’agissait d’un «incident» et que le prêtre officiant à ce moment-là n’avait pas été mis au courant de la participation du membre du M23.
Le Père Nsholé a rappelé son décret émis en 2010 interdisant aux ecclésiastiques «de donner la parole aux acteurs politiques pendant les cultes, à des fins propagandistes, pour des raisons de cohésion sociale». «En ce moment crucial que vit le pays, sur le plan sécuritaire», la CENCO exhorte au renforcement de la cohésion nationale «par l’organisation de concertations entre les représentants des forces vives du pays, au-delà des clivages politiques, afin de créer une grande et forte dynamique nationales pour faire face à l’ennemi commun». (cath.ch/ibc/com/ag/rz)