Querida Amazonia: l’épiscopat de l'Amazonie brésilienne mitigé
L’exhortation apostolique Querida Amazonia, publiée le 12 février 2020, a généré des réactions variées au sein de l’épiscopat de l’Amazonie brésilienne. Alors que certains évêques espéraient des transformations plus radicales, d’autres estiment que le document réaffirme les chemins pour une transformation.
«Je peux dire que j’ai été un peu déçu. J’espérais plus, a reconnu Mgr Meinrad Francisco Merkel, évêque du diocèse de Humaitá, dans l’Etat d’Amazonas, interrogé par le site catholique Crux. Ce que nous attendions dans un premier temps, c’était une espèce de décentralisation et une plus grande latitude donnée aux évêques pour réorganiser les structures locales, en respectant le droit canonique, bien sûr. Les évêques sont chargés de la vie de l’Eglise dans nos diocèses, mais quand nous voulons agir, nous devons faire face à de nombreuses barrières».
«Nous voulions nous réveiller avec des chemins ouverts»
Selon Mgr Meinrad Francisco Merke, les demandes pour permettre aux diacres permanents, qui exercent déjà d’excellents services au sein de l’Eglise, de célébrer l’Eucharistie aurait dû être une «question simple». «Nous ne sommes pas des personnes impulsives. J’ai 75 ans dont presque 50 ans de vie sacerdotale. Pourquoi ne pouvons-nous pas avoir des collaborateurs pour avancer dans l’évangélisation?», s’est-il demandé. «Le document apporte des réponses sous forme de rêves. Nous avons beaucoup travaillé et rêvé, mais nous voulions nous réveiller et voir des chemins ouverts pour agir avec plus de courage et de confiance», a t-il affirmé.
«Le Pape a lutté pour l’unité»
Pour Mgr Roque Paloshi, archevêque de Porto Velho, dans l’Etat de Rondônia, et président du Conseil Indigéniste Missionnaire (CIMI), «le document du pape ›ne ferme aucune porte’, par rapport au contenu des débats durant le synode. Il a confirmé le chemin de l’Eglise en direction d’un engagement avec la vie, avec les pauvres et pour la défense de la Maison Commune», a assuré le prélat.
Mgr Paloshi souligne que Querida Amazonia ne pouvait pas être une répétition de qui avait été dit dans le document final du synode. «Donc, le pape a choisi de présenter ses propres opinions, mais sans laisser de côté l’esprit des débats». Le président du Cimi a estimé que «l’Eglise n’a pas de solutions magiques. C’est toujours une question de continuité. Le pape n’a pas cherché à éviter les questions les plus pressantes, mais il a lutté pour l’unité».
«Un pas en avant pour l’Eglise!»
Pour Mgr Adriano Ciocca Vasino, l’évêque de la Prélature de São Félix do Araguaia, dans l’Etat du Mato Grosso du Sud, la dénonciation de la dévastation sociale et écologique en Amazonie qui est sous-jacente à cette exhortation apostolique représente «un pas en avant pour l’Eglise dans la lutte pour un nouveau modèle de vie».
«L’Eglise est aux avant-postes de cet effort, si l’on prend en compte sa perception de la réalité et ses stratégies», assure l’évêque. Mais il estime également qu’il semble y avoir une incongruité au point de vue institutionnel. «En revanche, je ne suis pas convaincu par la capacité de l’Eglise d’assumer ce rôle à travers la force et les actions de ses agents pastoraux».
Quoi qu’il en soit, pour Mgr Vasino, le pape n’a pas pour mission de provoquer des ruptures et des transformations drastiques au sein de l’Eglise. «C’est l’expérience de vie du peuple de l’Eglise qui ouvre de nouvelles perspectives et transforment la réalité. Le pape fait sa part».
«Une véritable révolution copernicienne!»
L’évêque du diocèse de Cruzeiro do Sul, dans l’Éat de l’Acre, Mgr Flavio Giovenale, assure quant à lui avoir lu l’exhortation avec grand enthousiasme et ne pas se sentir frustré avec le manque de réponse concrètes sur des points qui ont été au centre des débats synodaux.
«Ce document du pape François est une réflexion basée sur les suggestions et discussions du synode. Ce n’est pas un document juridique, mais une exhortation. Des changements concrets vont certainement avoir lieu à travers de futurs documents, sous la forme par exemple d’un motu proprio, et d’actes administratifs».
Le prélat estime même que la partie de l’exhortation qui parle des ministères de l’Eglise, en particulier le chapitre sur les communautés pleines de vie, suggère une véritable «révolution copernicienne».
«Les prêtres doivent partager le pouvoir»
«Le pape François affirme que l’Eglise amazonienne – et avec elle toute l’Eglise – doit être radicalement laïque. Il défend une culture ecclésiale distinctement laïque. Dans ce sens, les pères doivent travailler à peine sur les tâches essentielles. En vérité, il est en train de dire que les prêtres doivent céder la gestion des paroisses et partager le pouvoir».
Pour Mgr Flavio Giovenale, ce point est beaucoup plus important que la possible ordination d’hommes mariés. «Les viri probati ne constituent pas la solution unique à nos problèmes. Nous avons besoin d’une variété de solutions. Et c’est réellement révolutionnaire de suggérer une Eglise qui soit centrée sur les laïcs et pas sur le clergé». (cath.ch/jcg/bh)