Philippines: tentative de dialogue entre l'Eglise catholique et l'administration Duterte
Le président de la Conférence des évêques catholiques des Philippines, Mgr Socrates Villegas, a rencontré début avril 2017 plusieurs membres du cabinet du président Rodrigo Duterte. Une rencontre informelle pour tenter d’apaiser les tensions entre le pouvoir et l’Eglise catholique.
Entre la guerre antidrogue meurtrière et la volonté de rétablir la peine de mort, «il y a des sujets sur lesquels subsistent des désaccords de principe. Mais nous ne devrions pas pour autant laisser ces divergences nous empêcher de coopérer», a déclaré Mgr Socrates Villegas, selon l’agence Eglises d’Asie (EDA).
Certains évêques pour la destitution du président
Depuis l’arrivée au pouvoir de Rodrigo Duterte il y a bientôt un an, l’Eglise catholique des Philippines est ouvertement contre la campagne gouvernementale antidrogue, qui a causé la mort de près de 8000 personnes en huit mois, selon le décompte des médias locaux. Dans le principal pays catholique d’Asie, le clergé s’oppose également à un projet de loi adopté par les députés en mars pour rétablir la peine capitale. Certains évêques se sont publiquement exprimés en faveur de la destitution du président Duterte suite au lancement par un député de l’opposition d’une procédure en ce sens.
Cette rencontre intervient au moment où l’administration Duterte espère, sans cesser les opérations policières antidrogue, renforcer sa politique de réhabilitation avec davantage de centres de désintoxication. L’Eglise catholique propose déjà des programmes en ce sens. Et en cachette, des paroisses accueillent des personnes menacées de mort à cause d’une accusation de consommation de drogue.
Maintenir le dialogue
Pour amadouer l’Eglise catholique, fin mars 2017, Rodrigo Duterte lui a proposé de participer à la nomination des «captain barangay» à la tête des mairies de quartier. Les chefs de barangay sont au premier plan de la lutte antidrogue. Ils sont chargés d’établir la liste des suspects, avant l’intervention de la police antidrogue. Dans les faits, certaines personnes figurant sur la liste ont été tuées par des assaillants non identifiés, juste après avoir été dénoncées, parfois à tort.
Selon le président de la Conférence épiscopale, durant cette rencontre, un accord aurait été trouvé avec l’administration présidentielle afin de maintenir le dialogue entre les deux parties. «Nous craignons que notre silence soit assimilé à une façon d’approuver ces tueries», défend-il.
Des luttes de pouvoir entre l’Eglise et l’Etat
«Nous notons bien que les déclarations de l’Eglise catholique ne sont pas ‘contre le président’ mais contre certaines de ses politiques», a réagi officiellement le porte-parole présidentiel Ernie Abella, avant de souligner que «les luttes de pouvoir entre l’Eglise et l’Etat appartenaient à un passé lointain». (cath.ch/eda/gr)