Philippines: le président Duterte fait arrêter une religieuse australienne
La religieuse catholique australienne Patricia Fox a été arrêtée et détenue presque 24 heures par la police philippine, le 17 avril 2018, pour «activités anti-gouvernementales». Le président Rodrigo Duterte s’est vanté d’avoir ordonné lui-même son interpellation.
Sœur Patricia Fox a été amenée dans les bureaux du service d’immigration à Manille, la capitale, pour y être interrogée sur son implication dans de récentes actions pour les droits humains sur l’île de Mindanao. La religieuse âgée de 71 ans a été libérée le 17 avril 2018 au soir, après des protestations des autorités de l’Eglise catholique aux Philippines, rapporte le média australien ABC News.
Pas d’activités partisanes
La Mère supérieure d’un couvent de Quezon city, une ville de l’agglomération de Manille, est apparue «fatiguée» à la télévision. Elle y a expliqué n’avoir participé à aucun rassemblement politique partisan. Elle a également démenti avoir critiqué le gouvernement philippin. Selon elle, les responsables de l’immigration lui ont montré des photos sur lesquelles elle rencontre un groupe de prisonniers politiques à Mindanao. Une autre image la montrait rencontrant des ouvriers licenciés d’une usine de l’île du sud de l’archipel. Elle a admis défendre les droits des travailleurs, des petits paysans et des indigènes, mais jamais dans un contexte de politique partisane. Elle a fait remarquer que ces activités étaient en accord avec la doctrine sociale de l’Eglise.
Menaces d’expulsion
Le président Duterte a affirmé, lors d’une cérémonie militaire, le 18 avril à Manille, qu’il avait personnellement demandé l’arrestation de l’Australienne. «Vous êtes une étrangère! Qui êtes-vous? Non, c’est une violation de la souveraineté», s’est exclamé le chef d’Etat. «La liberté d’expression est illimitée et vaut pour tout le monde, a ajouté Rodrigo Duterte. Mais c’est autre chose de rabaisser les Philippines et de traiter le pays comme un paillasson où l’on s’essuie les pieds».
La religieuse, qui réside depuis 27 ans dans l’archipel, espère ne pas être expulsée, même si le président l’a suggéré. «La loi philippine stipule que j’ai le droit de vous déporter, ou de vous refuser l’entrée du pays, si vous êtes un étranger indésirable», a-t-il déclaré.
Plaisanterie sur le viol et le meurtre d’une catholique
Ce n’est pas la première fois que le président Duterte a maille à partir avec l’Australie et l’Eglise catholique. Durant sa campagne électorale de 2016, il s’était moqué du viol et du meurtre de la laïque australienne Jacqueline Hammil, en 1989, à Davao City, dans le sud du pays. Il avait publiquement souhaité avoir voulu être en première ligne pour la violer. Suite aux protestations de l’ambassade d’Australie, il s’était justifié en évoquant une plaisanterie.
Rodrigo Duterte s’est également maintes fois retrouvé en opposition à l’Eglise catholique locale, notamment au sujet de la guerre qu’il mène contre la drogue, qui aurait déjà fait des milliers de morts, souvent dans des exécutions extra-judiciaires. (cath.ch/abc/arch/rz)