Père Siret: Pour les séminaristes, «vivre à Rome donne une expérience dilatée de l'Eglise»
A l’occasion de la solennité de l’Immaculée Conception, chaque 8 décembre, le Séminaire pontifical français de Rome célèbre également sa fondation. Le cardinal Paul Poupard, président émérite du Conseil pontifical de la culture, présidera la cérémonie en 2017, en présence de nombreuses autorités religieuses. Le nouveau recteur du Séminaire, le Père Vincent Siret, explique à l’agence I.MEDIA ses priorités.
Pourquoi la fête de l’Immaculée Conception est-elle aussi celle du Séminaire français?
Le nom officiel des Pères spiritains, qui sont les fondateurs du Séminaire pontifical français, est celui de Congrégation du Saint-Esprit et du Saint Cœur de Marie. S’ils sont donc consacrés à l’Esprit-Saint, auteur de toute sainteté et ›inspirateur de l’esprit apostolique’, ils demeurent aussi sous la protection du Cœur Immaculé de Marie – représenté dans le vitrail du chœur de la chapelle du Séminaire français. Cœur comblé par ce même Esprit «de la plénitude de la sainteté et de l’apostolat». Il est donc parfaitement naturel que la fête de l’Immaculée Conception soit aussi celle du Séminaire. J’ajouterai que la période de la fondation du Séminaire, à partir de 1853, a été concomitante des apparitions de Lourdes (1858), ce qui ne manqua pas d’attirer l’attention des premiers séminaristes de France venant étudier à Rome sur la Vierge-Marie dans sa conception immaculée.
En tant que nouveau recteur, sur quels points souhaitez-vous avoir une attention particulière?
Il me semble toujours important de mettre au premier plan la vie spirituelle des candidats, autour de laquelle s’organisent et prennent sens la vie intellectuelle – qui représente pour les séminaristes de la maison un gros investissement en temps – la vie liturgique et communautaire, et la vie missionnaire. Car même s’ils sont en études, ils gardent un contact avec la pastorale, soit française à Rome, soit italienne. Il s’agit de les aider à développer une authentique charité pastorale. J’ai été de longues années à Ars: le modèle du curé d’Ars demeure, même pour les séminaristes et prêtres qui sont envoyés au Séminaire français. Il ne s’agit évidemment pas de l’imiter de l’extérieur, car qu’on le veuille ou non, nous ne sommes pas dans la même situation que lui. Nous ne pouvons pas risquer des rapprochements sans commettre d’anachronisme. Mais sa charité pastorale, tout comme un Père Chevrier à la même époque que lui, demeure impressionnante et si on collabore avec la grâce de Dieu, elle est atteignable.
Une récente instruction sur la formation dans les séminaires a été promulguée par le Saint-Siège. Comment vous l’appropriez-vous?
La nouvelle Ratio a été publiée par la Congrégation pour le clergé il y a un an. La visée est celle d’une formation permanente: dès son baptême, le jeune entre déjà dans un processus de formation qui ne prendra fin qu’à sa mort. La place de la formation au séminaire est certes décisive, mais elle est un temps: un processus plus intense, pendant lequel on se forme, mais qui forme aussi à être toujours en mode de formation. Les étapes sont claires : la propédeutique devient indispensable, comme préliminaire pour des jeunes qui sont loin d’être unifiés par une culture commune et par un christianisme qui irait de soi. Les réflexes chrétiens ne sont plus là. Chacun doit donc prendre du temps pour plonger ses racines dans le Christ, à travers un apprentissage spirituel complet, une formation catéchétique de base, un service qui va vers les plus pauvres. C’est l’année -1. Puis viennent les années de formation du disciple: années 1 et 2. En troisième lieu, vient l’étape de configuration au Christ – année 3 à 5 – et enfin l’étape de synthèse vocationnelle. Ce sont la ou les dernières années. Chaque étape a des objectifs clairs, balisés et vérifiés. Au Séminaire français, nous ne recevons des garçons qu’à partir de l’année 3, c’est à dire au mieux au commencement de la phase configuratrice. En général, les candidats sont plus au clair sur leur vocation et peuvent ainsi entrer dans la dynamique de leur futur service de l’Eglise. Nous essayons de veiller à léquilibre des différents aspects de la formation. Et de les aider à entrer dans un planning qui paraît s’étaler dans le temps, mais pourtant est assez bref.
Dans un contexte de réorganisation des séminaires en France, le Séminaire français de Rome est-il appelé à avoir davantage d’importance dans les années à venir ?
Le Séminaire français est au service des évêques de France. L’avenir leur appartient en grande partie. A la fin de cette année, il y aura un renouvellement important de la communauté. Nous verrons plus clair, en fonction de la rentrée prochaine, sur la place que pourrait prendre le Séminaire français dans la formation des prêtres de France. Nous avons des atouts indéniables : une formation de qualité, à Rome, avec une expérience de l’Eglise sans commune mesure avec ce qui se vit ailleurs. Je crois qu’en France disparaît petit à petit la crainte d’un ›romanisme’ trop étroit. Aucune Eglise ne peut se fermer sur elle-même. Vivre à Rome donne une expérience ›dilatée’ de l’Eglise et des manières d’accomplir sa vocation chrétienne. (cath.ch/imedia/ap/rz)