Pape François: «Jésus passe par les rues de Chypre»
«Jésus passe aussi par les rues de Chypre», a proclamé le pape François en célébrant une messe avec les catholiques de l’île, le 3 décembre 2021, au stade de Nicosie. Le monde a besoin de chrétiens lumineux qui, «avec des gestes et des paroles de consolation, allument des lueurs d’espoir dans les ténèbres».
L’évêque de Rome a été accueilli par quelque 10’000 fidèles – selon les organisateurs – un peu après 10h, au deuxième jour de son voyage apostolique dans le pays. Des acclamations ont jailli dès l’apparition des images de son arrivée en voiture fermée, sur les écrans géants. Des catholiques chypriotes, mais aussi de nombreux Libanais, Philippins, Béninois, l’attendaient depuis plusieurs heures, regroupés sur une aile du plus grand stade de la capitale.
Sans faire de bain de foule, le pape a présidé la seule messe publique prévue dans le pays à majorité orthodoxe. «Sortons de nous-mêmes», a-t-il exhorté dans son homélie en italien, non traduite simultanément. «Sortons pour apporter la lumière que nous avons reçue, sortons pour éclairer la nuit qui nous entoure si souvent !»
Le chef de l’Église catholique a demandé aux chrétiens de ne pas rester «dans les ténèbres de la mélancolie» mais d’offrir «des caresses dans les solitudes de la souffrance et de la pauvreté».
Parler et agir comme un «nous«
Au fil de sa méditation, le pape François a souligné la valeur de la communauté, invitant à «penser, parler et agir comme un «nous», en laissant derrière nous l’individualisme et la prétention à l’autosuffisance.
«Si nous restons divisés entre nous, a-t-il averti, si chacun ne pense qu’à lui-même ou à son groupe, si nous ne nous rassemblons pas, nous ne dialoguons pas, nous ne marchons pas ensemble, nous ne pourrons pas guérir pleinement de nos aveuglements.» La guérison se produit «lorsque nous faisons face à nos problèmes ensemble», a ajouté le pontife, mettant en garde contre l’illusion du péché qui «nous fait voir Dieu comme un patron et les autres comme des problèmes».
Le pape François a également rendu hommage aux Chypriotes qui vivent joyeusement l’annonce libératrice de l’Évangile : «Il ne s’agit pas de prosélytisme, mais de témoignage, non d’un moralisme qui juge, mais de miséricorde qui embrasse; non de culte extérieur, mais d’amour vécu.»
Des catholiques venus de tous les horizons
Parmi la foule venue à la messe du pape, une soixantaine de casques bleus en uniforme étaient présents pour participer à la plus grande célébration de la visite du pontife à Chypre.
Outre de très nombreux Libanais venus de Beyrouth – 10% à 20% de l’assemblée selon certaines estimations -, on pouvait retrouver dans la grande tribune du stade beaucoup de catholiques issus de l’immigration, comme Roger, vivant à Nicosie depuis des années et originaire du Bénin.
«Je vois cela comme une bénédiction pour moi mais aussi pour Chypre», s’enthousiasme celui qui a aujourd’hui une fille docteur en Angleterre et un fils comptable à Chypre.
Catholiques anglais, André avec sa femme Sharon habitent pour leur part à Peyia, l’extrémité ouest de l’île, et n’auraient pas voulu manquer un tel événement. Ils ont fait trois heures de route pour assister à cette célébration «fantastique».
Même état d’esprit du côté des nombreux philippins travaillant sur l’île et venus voir le pape. «C’est la première fois que nous pouvons le voir et c’était notre seule chance», raconte en choeur un groupe de philippines. «Nous sommes bénies».
À l’extérieur du stade cependant, une quinzaine de manifestants, vraisemblablement orthodoxes, avaient affiché des bannières arborant les mots peu avenants «Papa est persona non grata».
Beaucoup de Libanais
Dans la foule des quelque 10.000 fidèles venus assister à la messe du pape François, près d’une personne sur cinq était libanaise, a pu estimer I.MEDIA. Le pape François ne s’est encore jamais rendu au Liban, alors ce sont les Libanais qui sont venus à lui, le pays du cèdre n’étant situé qu’à une centaine de kilomètres de l’île.
Tel est le cas de Nelly, habitante de Beyrouth, qui a fait le trajet de 40 minutes en avion pour venir voir le pontife. Dans ses bagages, elle a tenu à apporter un grand drapeau libanais sur lequel on peut lire : «Délivre-nous de l’occupation». «Le Liban n’est pas occupé militairement parlant mais il est occupé idéologiquement par l’Iran», explique-t-elle. « Nous avons aussi des armes illégales au Liban, détenues par le Hezbollah ; c’est pourquoi je suis venue avec ce message», poursuit la jeune femme, espérant que le pape François visitera très bientôt son pays.
Mia Rana, 30 ans, ne voulait pas non plus rater ce moment. «C’est une bénédiction d’être là pour nous aujourd’hui», s’enthousiasme-t-elle. Du fait de la situation dramatique du Liban, son frère a fait le choix de s’installer à Chypre. «Nous sommes venus le visiter et voir le pape en même temps», raconte la jeune femme qui attend elle aussi le pape au Liban. « Nous avons vu Jean-Paul II, nous avons vu Benoît XVI à Beyrouth et maintenant nous voyons le pape François. C’est une bénédiction.»
La veille, le pape François avait immédiatement confié ses pensées pour le Liban. « Je suis très préoccupé par la crise dans laquelle il se trouve et je ressens la douleur d’un peuple fatigué et éprouvé par la violence et la souffrance », soulignait-il, disant porter dans sa prière « le désir de paix qui monte du cœur de ce pays ». (cath.ch/imedia/ak/mp)