Pape François: «Embrasser la sainteté au quotidien»
«L’étonnement de se découvrir aimé« est une étape fondamentale vers la sainteté, plus que «l’héroïsme personnel«, a expliqué le pape lors de la messe de canonisations célébrée sur la place Saint-Pierre, le 15 mai 2022.
Alors qu’il était apparu en fauteuil roulant ces dernières semaines, le pape François est parvenu à se tenir debout pour présider cette liturgie. Dix nouveaux saints ont été proclamés, parmi lesquels les Français Charles de Foucauld, Marie Rivier et César de Bus.
C’est sous un soleil de plomb que plus de 45.000 personnes – une foule toutefois moins nombreuse qu’attendu, au regard du dispositif déployé sur la Via della Conciliazione – se sont rassemblées sur la Place Saint-Pierre pour cette première messe de canonisation depuis la pandémie de Covid-19. Le préfet de la Congrégation pour les causes des saints, le cardinal Marcello Semeraro, en poste depuis octobre 2020, a pu ainsi pour la première fois participer à ce rite de canonisation, en lisant les biographies des dix nouveaux saints et en formalisant la demande au pape d’inscrire ces dix personnalités au calendrier des saints.
La sainteté n’est pas un objectif inaccessible
Suivant la formule liturgique en latin, le pape a prononcé ces mots après la Litanie des saints : «Après avoir longuement réfléchi et invoqué à plusieurs reprises l’aide divine et écouté l’avis de beaucoup de nos frères dans l’épiscopat, nous déclarons et nous définissons saints, les bienheureux Titus Brandsma, Lazare appelé Devasahayam, César de Bus, Luigi Maria Palazzolo, Justin Maria Russolillo, Charles de Foucauld, Marie Rivier, Maria Francesca di Gesù Rubatto, Maria di Gesù Santocanale et Maria Domenica Mantovani. Et nous les inscrivons dans le Livre des saints et nous décrétons qu’il doivent être vénérés avec dévotion dans toute l’Église.»
Revêtu d’une chasuble de Jean Paul II et portant la croix de Paul VI, le pape François, qui semblait moins souffrir de son genou que lors de précédents événements publics, a pu assurer le déroulement normal de cette liturgie, même s’il est demeuré assis pour prononcer son homélie. Invitant les chrétiens à «une conversion sur l’idée que nous nous faisons souvent de la sainteté», l’évêque de Rome a reconnu qu’en «insistant trop sur les efforts pour accomplir de bonnes œuvres, nous avons généré un idéal de sainteté trop fondé sur nous-mêmes, sur l’héroïsme personnel, sur la capacité de renonciation, sur le sacrifice de soi pour gagner une récompense».
«Nous avons ainsi fait de la sainteté un objectif inaccessible, nous l’avons séparée de la vie quotidienne au lieu de la rechercher et de l’embrasser dans le quotidien, dans la poussière de la rue, dans les efforts de la vie concrète», a averti le pape François, invitant à «se laisser transfigurer par la puissance de l’amour de Dieu».
Des reflets lumineux du Seigneur dans l’Histoire
«L’amour que nous recevons du Seigneur est la force qui transforme notre vie : il dilate notre cœur et nous prédispose à aimer», a expliqué François, en invitant à «partager les charismes et les dons que Dieu nous a donnés». Il a invité notamment les responsables politiques à vivre leur autorité «en luttant pour le bien commun» et en renonçant à leurs intérêts personnels.
«Nos compagnons de route, canonisés aujourd’hui, ont vécu la sainteté de cette manière : en embrassant leur vocation avec enthousiasme – comme prêtres, comme personnes consacrées, comme laïcs – ils se sont dépensés pour l’Évangile, ils ont découvert une joie sans comparaison et ils sont devenus des reflets lumineux du Seigneur dans l’Histoire», a insisté le pape François dans son homélie, sans nommer aucun de ces dix nouveaux saints.
«Chacun de nous est appelé à la sainteté, à une sainteté unique et non reproductible, une sainteté originale, pas une sainteté de photocopies, comme le disait Carlo Acutis», a-t-il ajouté en se référant à ce jeune Italien béatifié à Assise en 2020. «Le Seigneur a un plan d’amour pour chacun de nous», a-t-il assuré.
Les politiques doivent être des «protagonistes de paix et non de guerre«
Au terme de la messe, avant le chant du Regina Caeli, le pape François, se tenant debout sous les applaudissements de la foule, a remercié les participants, particulièrement les religieux et religieuses «qui appartiennent à la famille spirituelle des nouveaux saints», et tous les représentants du «peuple fidèle de Dieu», venus des quatre coins du monde. Il s’est aussi adressé aux responsables politiques présents, mentionnant notamment le président de la République italienne, Sergio Mattarella.
«Il est beau de constater qu’avec leur témoignage évangélique, ces saints ont favorisé la croissance spirituelle et sociale de leurs nations respectives et aussi de l’entière famille humaine», s’est-il réjoui. «Alors que tristement dans le monde augmentent les distances, les tensions et les guerres, que les nouveaux saints inspirent des voies de dialogue, spécialement dans le cœur et dans l’esprit de ceux qui exercent des charges et des grandes responsabilités, et sont appelés à être les protagonistes de paix et non de guerre», a lancé le pape François, sans mentionner de pays en particulier.
Comme lors du dimanche de Pâques, le pontife a fait l’effort de marcher sur le parvis pour saluer les cardinaux présents. Il a ensuite fait le tour de la place Saint-Pierre en papamobile. Il s’agissait de la 12e messe de canonisation de son pontificat célébrée sur la place Saint-Pierre, et de la 15e au total, en comptant les canonisations célébrées lors de ses voyages au Sri Lanka, aux États-Unis et au Portugal. (cath.ch/imedia/cv/mp)