Dans une intreview accordée au quotidien espagnol El Pais, le pape a donné sa vision de l'Eglise. (Photo: Flickr/catholicnews.org.uk/CC BY-NC-SA 2.0)
Vatican

Le pape confie sa vision de l'Eglise au quotidien espagnol «El Pais»

Le Pape François a accordé une longue interview au quotidien Espagnol El Pais, publiée le 22 janvier 2017 et relayée par le site de Radio Vatican. Le pape est revenu, entre autres sujets, sur l’économie «qui tue», le populisme et a souhaité une Eglise «proche des gens». Evoquant un «dialogue intensif» avec la Chine, le pape réitéré le souhait de s’y rendre s’il y était invité.

Une économie qui tue

Le Saint-Père réitère ses propos: «Nous vivons la troisième guerre mondiale par morceaux. Et maintenant, on parle d’une possible guerre nucléaire comme s’il s’agissait d’un jeu de cartes». Il se déclare inquiet face aux inégalités économiques, alors qu’un petit groupe de l’humanité détient 80% des richesses. Ce qui signifie qu’»au centre du système économique il y a le Dieu argent, et non l’homme et la femme». «Nous sommes dans une économie qui tue et qui engendre cette culture du déchet».

En période de crise nous cherchons un sauveur: voilà le populisme

François parle avec inquiétude du populisme, en se référant plus au populisme européen qu’au populisme latino-américain. Il cite l’exemple du nazisme en Allemagne: Un pays détruit qui cherche son identité et cherche un leader en mesure de la lui restituer. Il trouve Hitler qui a été voté par  son peuple et qui, successivement, l’a détruit. C’est cela le danger. Il y a un manque de discernement en période de crise. Nous cherchons un sauveur qui nous restitue une identité et nous nous défendons des autres peuples qui pourraient nous priver de cette identité avec des murs, des fils barbelés, avec n’importe quoi. C’est très grave, dit le Saint Père ; Je répète sans cesse: dialoguez entre vous».

Une Eglise proche des gens

François affirme qu’il n’a pas changé depuis qu’il est devenu Pape: «Changer à 76 ans, c’est revenir à se maquiller» dit-il. Certes, il ne peut pas faire tout ce qu’il veut, mais il a gardé en lui ce côté prêtre de la rue qui souhaite rester proche des gens. Ce qu’il craint le plus pour l’Eglise, c’est qu’elle s’éloigne des gens. Le cléricalisme est selon lui «le pire mal qui puisse aujourd’hui frapper l’Eglise». Un pasteur anesthésié s’éloigne de la réalité concrète du monde et devient un fonctionnaire. «Une Eglise qui n’a pas le sens de la proximité n’est pas une Eglise», c’est une ONG qui fait de la bienfaisance. Or la proximité, dit François, «c’est pouvoir toucher dans son prochain la chair du Christ».

«Dialogue intensif» avec la Chine

Le pape a réitéré le souhait déjà exprimé de se rendre en Chine s’il y était invité. Des désaccords demeurent entre les deux pays, notamment sur le fait que le pouvoir nomme des évêques de l’Eglise officielle chinoise qui ne sont pas agréés par le Saint-Siège. Rome ne reconnaît pas la Conférence épiscopale chinoise. Les catholiques, surveillés par l’Etat, ne peuvent pas librement pratiquer leur religion. Les relations diplomatiques entre le Vatican et la chine sont rompues depuis 1951. Le dialogue entre les deux pays, en voie d’amélioration, se poursuit néanmoins en coulisse. Une commission vaticano-chinoise se réunit tous les trois mois pour négocier sur ces questions. Le pape a évoqué dans l’interview «un dialogue intensif avec la Chine».

La révolution des saints

Le pape a également évoqué les nombreux Saints. Des personnes qui ont sacrifié leur vie au service des autres. «Ce sont eux les véritables acteurs de l’histoire de l’Eglise (…) ils nous ont sauvés». C’est, explique le Saint-Père, la révolution des saints. Il a parlé des pères, des mères et des grand-parents «qui travaillent chaque jour dans la dignité, et qui par leur témoignage de vie, font avancer l’Eglise». C’est pour François «la classe moyenne de la sainteté», et «la sainteté de ces personne est immense».

Il a aussi été question des migrants morts lors de leur tentative de traverser la mer Méditerranée, que le pontife a comparé à un cimetière. «Cela doit nous faire réfléchir» a-t-il souligné, ajoutant qu’il faut sauver, accueillir et intégrer les migrants. Le Pape a rappellé l’engagement de l’Eglise, «souvent dans le silence, en faveur de l’accueil des immigrés».

Le pape a par ailleurs incité à ne pas juger trop hâtivement Donald Trump, le nouveau président des Etats-Unis. «Nous verrons ce qui arrivera (…), ce qu’il fera et nous évaluerons. Je n’aime pas anticiper». Il a également réaffirmé la vocation de l’Eglise à construire des ponts et non des murs. «L’action de l’Eglise est en faveur de la paix et la justice ne sert pas ses propres intérêts mais ceux des populations».

Le souverain pontife a évoqué la nécessité de valoriser le rôle des femmes «dans l’Eglise qui est feminine». Il a souhaité que la femme puisse offrir à l’Eglise l’originalité de son être et de sa pensée.

Enfin, à la question posée sur l’état de santé du pape émérite, il a reconnu que le problème de Benoit XVI sont ses jambes. Il marche à l’aide d’une canne. Mais, a précisé François: «il a la mémoire d’un éléphant jusque dans les moindres détails».

«Le Seigneur est bon et ne m’a pas ôté ma bonne humeur», a répondu le pape au journaliste qui lui disait avoir rencontré un homme heureux. (cath.ch/rv/kath.ch/bh)

Dans une intreview accordée au quotidien espagnol El Pais, le pape a donné sa vision de l'Eglise.
22 janvier 2017 | 17:01
par Bernard Hallet
Temps de lecture : env. 4  min.
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