Nouvelles manipulations génétiques: critiques d'éthiciens catholiques
Des chercheurs sont parvenus fin juillet 2017, pour la première fois aux Etats-Unis, à modifier des gènes défectueux dans des embryons humains. Des éthiciens catholiques mettent en garde contre cette avancée et la procédure utilisée.
Les scientifiques de l’Université des sciences et de la santé d’Oregon (OHSU) ont utilisé la technique révolutionnaire d’édition génétique CRISPR pour manipuler les embryons. Il s’agit de ciseaux moléculaires qui peuvent, de façon très précise, enlever des parties indésirables du génome pour les remplacer par de nouveaux morceaux d’ADN.
Cette technique peut permettre de corriger des gènes défectueux responsables de maladies. Mais elle pourrait aussi en théorie assurer que des enfants soient dotés de certaines caractéristiques physiques ou intellectuelles.
Les chercheurs ont éliminé les embryons après quelques jours.
Valeur humaine dénigrée
Dans l’Eglise catholique, des voix se sont élevées contre une telle instrumentalisation de la vie humaine. «De très jeunes êtres humains ont été créés in vitro et traités non pas comme des finalités mais comme de pures moyens ou matériaux pour atteindre des objectifs de recherche», déplore le Père Tadeusz Pacholczyk, du Centre national catholique de bioéthique des Etats-Unis, interrogé par l’agence d’information Catholic News Agency (CNA). Le prêtre a regretté que la valeur des embryons en tant qu’êtres humains ait été profondément dénigrée, rappelant qu’ils sont chaque fois «créés, utilisés et tués». Il s’est en outre interrogé sur ce que pourraient devenir ces personnes génétiquement modifiées, si elles étaient autorisées à grandir. «Il pourrait y avoir des effets inattendus de la modification de leur génome».
Créatures vulnérables
John DiCamillo, un autre éthicien du Centre national de bioéthique exprime une opinion plus modérée. Pour lui, les catholiques ne devraient pas automatiquement considérer la modification génétique comme un problème. Il pourrait y avoir des situations «légitimes» où cette technique pourrait être utilisée. Il pense aux cas de maladies héréditaires incurables. L’éthicien prévient toutefois que cette démarche peut être «très dangereuse à de multiples niveaux». Il souligne notamment qu’une personne génétiquement modifiée transmettrait ses gènes aux générations suivantes.
Le Père Pacholczyk critique finalement le fait que ces expériences soient réalisées sur des êtres vivants dont il est impossible d’obtenir le consentement. «Le consentement est particulièrement important lorsque l’objet de recherche est vulnérable. Et les embryons humains sont parmi les créatures de Dieu les plus vulnérables».
Tergiversations éthiques
En décembre 2015, un groupe international de scientifiques et d’éthiciens réunis par l’Académie américaine des sciences (NAS) à Washington avait estimé qu’il serait «irresponsable» d’utiliser la technologie CRISPR pour modifier l’embryon, même à des fins thérapeutiques, tant que des problèmes de sûreté et d’efficacité n’auraient pas été résolus. Toutefois, en mars 2017, la NAS et l’Académie américaine de médecine ont estimé que les avancées dans la technique d’édition génétique des cellules humaines de reproduction «ouvraient des possibilités réalistes qui méritaient de sérieuses considérations». (cath.ch/ag/cna/rz)