Le pape François voit un lien entre sainteté et sens de l'humour | © Jacques Berset
Vatican

Nouveau livre-entretien du pape François

«Il ne faut pas vendre son âme dans le supermarché de la vie», affirme le pape François dans un livre sur le thème de la peur (La paura come dono, éditions San Paolo), à paraître le 25 janvier 2023. Échangeant avec le psychothérapeute italien Salvo Noè, dont il a vanté les œuvres à plusieurs reprises, le pape confie son souhait que les séminaristes soient suivis par des psychologues.

Sur un ton pastoral, il évoque des thèmes familiers de son pontificat – miséricorde, fin de vie, proximité – et rappelle quelques brèves anecdotes personnelles. Dans cet entretien d’une quarantaine de pages inséré dans l’ouvrage de 224 pages, le chef de l’Église catholique invite à ne pas «chercher des sécurités dans les choses qui passent». «On peut décider aussi d’être heureux», suggère-t-il, constatant que certains «ont peur d’être joyeux, parce que la joie les fait sentir sans défense et ils ont peur que tout se finisse». Et d’avertir : «la tristesse est le plat le plus délicieux du diable». 

Pas de victimisation, pas «d’auto-commisération», martèle le pape François, qui depuis 2017 a affiché sur la porte de son bureau le panneau «Interdit de se plaindre», créé par Salvo Noé. Les deux hommes s’étaient rencontrés en marge d’une audience générale, et le pape a régulièrement fait référence aux travaux de ce psychologue. «C’est beaucoup mieux de cultiver l’humour et d’offrir des sourires», affirme-t-il dans le livre, engageant à «passer du ›si’ au ›oui’». 

La peur, pour le pape, peut être une compagne de bon sens. Toutefois une peur excessive peut devenir «l’un des pires ennemis de notre vie chrétienne», conduisant à une attitude d’âme emprisonnée, sans liberté. Pour faire diminuer la peur, il conseille deux choses simples: l’humilité et la prière. Et il professe son espérance que «dans ce que nous appelons disgrâce, il y a la grâce».

Le séminaire n’est pas un refuge

Parlant des abus sexuels commis par des membres du clergé, le pape recommande le recours à un psychologue comme guide vers la maturation dans la formation des séminaristes. «Il faut s’apercevoir avant l’ordination sacerdotale s’il y a des penchants pour les abus », souligne-t-il en rappelant que le séminaire n’est pas un refuge pour les limitations ou les manques psychologiques. 

Il fustige aussi «les prêtres carriéristes et la mondanité», qui sont la plus grande perversion dans l’Église. Il encourage les prêtres à parler à cœur ouvert car «les fidèles ont besoin de voir que nous sommes comme eux, que nous avons les mêmes peurs et la même volonté de vivre dans la grâce de Dieu». 

Cesser de se juger mutuellement 

«Si une personne est gay et cherche le Seigneur et est de bonne volonté, qui suis-je pour la juger ?», avait déclaré le pontife argentin lors d’une conférence de presse en juillet 2013. Au fil de l’entretien, il revient sur ces paroles qui ont fait le tour du monde : «Dieu est père et ne renie aucun de ses fils. Et le style de Dieu est proximité, miséricorde, tendresse. Pas jugement et marginalisation. Dieu s’approche avec amour de chacun de ses enfants, de tous et de chacun. Son cœur est ouvert à tous et à chacun. (…) L’amour ne divise pas, mais unit».

Il exhorte à cesser de se juger mutuellement. «Celui qui juge se trompe, simplement parce qu’il prend une place qui n’est pas la sienne». Le pape voit derrière le jugement l’hypocrisie, qui est aussi la peur de la vérité. «Si tu te tais, tais-toi par amour, si tu parles, fais-le par amour», recommande-t-il en citant saint Augustin. 

De Buenos Aires à Sainte-Marthe

À son élection, le pape François assure qu’il a ressenti une paix et une tranquillité. Cependant, ajoute-t-il, «s’il y a une chose qui me manque beaucoup aujourd’hui, c’est de ne plus pouvoir sortir dans les rues, comme je le faisais en Argentine». «Ils ont peur qu’il arrive quelque chose, (…) et ils ont raison», convient-il en parlant de son service de sécurité.

Le pape explique aussi son choix de vivre à Sainte-Marthe plutôt que dans les appartements pontificaux : «Là je me sentais blindé et cela me faisait peur. (…) Je voulais rompre cette habitude du pape isolé». Le pontife s’amuse d’échanger des plaisanteries avec les gardes suisses qui assurent sa sécurité. «Un jour j’ai offert un gâteau (à un garde), il ne voulait pas accepter en disant que c’étaient les ordres du commandant. J’ai répondu : «le commandant c’est moi !»«. 

La visite d’un ange

«Même quand tout semble sombre (…), le Seigneur continue à envoyer des anges», affirme encore le pontife, souhaitant «que toute personne âgée – surtout les plus seules – reçoive la visite d’un ange». Il vante le soutien de l’amitié, la merveille de la gratitude, le baume du pardon.

Le pape s’adresse également à celui qui vit les angoisses de la fin de vie, assurant que même si quelqu’un n’a pas suivi le bon chemin, le Seigneur lui pardonne, efface tout. «Dieu est plus grand que ta peur et il sait si tes péchés t’effraient (…), si tes chutes répétées te démoralisent», ajoute-t-il plus loin. 

«La mort nous oblige à penser à ce qu’on laisse, à la «trace» de son existence, de son chemin sur la terre», fait observer le pontife de 86 ans, invitant à bien réfléchir: «comment sera ce jour où je serai devant Jésus ? Quand il me demandera ce que j’ai fait des talents qu’il m’a donnés ?»

Pour le successeur de Pierre, «la plus grande maladie de la vie est le manque d’amour, c’est de ne pas réussir à aimer». L’amour est gratuit, concret, il ne réside ni dans le succès et l’argent, ni dans le numérique, ni dans les maquillages pour cacher «ce que nous sommes», et ni «dans les solutions de magicien», conclut le pape. (cath.ch/imedia/ak/mp)

Le pape François voit un lien entre sainteté et sens de l'humour | © Jacques Berset
24 janvier 2023 | 13:37
par I.MEDIA
Temps de lecture : env. 4  min.
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