Notre-Dame, Abbé Pierre, Trump: les paroles du pape dans l’avion
«Je n’irai pas à Paris» pour la messe de réouverture de la cathédrale Notre-Dame, a déclaré le pape François à bord de l’avion l’ayant ramené de Singapour à Rome, le 13 septembre 2024. Le pontife a aussi évoqué le cas «très délicat» de l’Abbé Pierre, a clamé son amour pour la Chine, et a évoqué l’incertitude autour d’un voyage en Argentine.
Camille Dalmas, IMEDIA, à bord de l’avion papal
La rumeur d’une venue du pape François à Paris le 8 décembre prochain pour la réouverture de Notre-Dame de Paris avait pris de l’ampleur depuis la publication, le 8 septembre, d’un article dans La Tribune laissant entendre que le projet était en bonne voie. Dans l’avion, quelques minutes avant la conférence de presse, le «ministre des Affaires étrangères» du Saint-Siège, Mgr Paul Richard Gallagher, laissait encore planer le doute. Il plaisantait sur le fait qu’il pourrait s’agir d’une réparation après le sacre de Napoléon par Pie VII dans la même cathédrale, en 1804.
Le pape François n’a pour sa part laissé aucune ambiguïté sur ses intentions, assénant par deux fois son verdict: «Je ne viendrai pas à Paris». Il n’a pour l’heure pas annoncé s’il comptait envoyer un représentant pontifical.
Le cas «douloureux» de l’Abbé Pierre
Interrogé par un journaliste du journal Le Monde sur le cas de l’Abbé Pierre (1912-2007), accusé de violences sexuelles sur des femmes et des enfants, le pape François a décrit ce cas comme «très douloureux, très délicat». «C’est un homme qui a fait tant de bien, mais c’est aussi un pécheur», a-t-il commenté, y voyant une défaillance propre à la «condition humaine».
«Je suis heureux quand ces cas sortent», a déclaré le pontife, qui a dit ne pas savoir quand le Vatican avait découvert l’affaire. «Je ne sais pas parce que je n’étais pas là et l’idée de faire des recherches là-dessus ne m’est jamais venue à l’esprit, mais certainement après la mort c’est certain. Mais avant, je ne sais pas», a-t-il assuré. Il a expliqué qu’il fallait poursuivre le travail contre tous les types d’abus. Il a élargi la problématique à ce qu’il a désigné comme des abus sociaux ou éducatifs «qui veulent changer la mentalité des gens ou attenter à leur liberté».
La réponse du pape sur l’abbé Pierre, qualifié de «terrible pécheur», a été écourtée par des secousses dues aux conditions météorologiques, obligeant le commandant de bord à interrompre la conférence de presse. «Ta question a provoqué des turbulences», a lancé le pape au journaliste.
Une déclaration d’amour à la Chine
Par le passé, le pape François a exprimé plusieurs fois sa volonté de se rendre en Chine. Il a de nouveau exprimé son attachement pour ce pays en répondant dans l’avion à une question de Stefania Falasca, vaticaniste italienne mais correspondante pour Tianou Zhiku, un média lié au ministère des Affaires étrangères chinois.
Il a ainsi confié que ce pays est pour lui à la fois «un rêve», «une promesse et une espérance». «J’admire la Chine, je respecte la Chine», a-t-il insisté. Il a loué son histoire millénaire mais aussi sa «capacité de dialogue» malgré «les différents systèmes démocratiques qu’elle a eus».
Le pontife a ensuite salué la «bonne volonté» à l’œuvre concernant le processus de nomination des évêques, fruit de l’accord secret ratifié par la Chine et le Saint-Siège en 2018 et qui pourrait être renouvelé pour la troisième fois consécutive en octobre prochain. «J’ai entendu comment vont les choses de la part de la secrétairerie d’État et je suis content», a-t-il expliqué.
Il a enfin appelé de ses vœux une «collaboration» pour résoudre les conflits, soulignant le travail effectué par le cardinal archevêque de Bologne, Matteo Maria Zuppi, qui s’est rendu en Chine en septembre 2023.
Élection américaine: «chacun, en conscience, pense et agit»
Interrogé sur le dilemme que doivent affronter les catholiques américains, appelés à choisir prochainement entre une candidate qui défend l’avortement – la démocrate Kamala Harris – et un candidat qui veut expulser des migrants – le républicain Donald Trump –, le pape François a rappelé que ces deux lignes politiques étaient «contre la vie», et a appelé à choisir le «moindre mal».
«Il faut voter», a insisté le pape argentin, refusant de donner une consigne de vote. «Qui est le moindre mal? Cette dame, ou ce monsieur? Je ne sais pas. Chacun, en conscience, pense et agit», a-t-il déclaré.
Le pontife a évoqué sa visite de la frontière avec le Mexique lors de sa visite en 2016, à proximité d’El Paso. Il s’est souvenu des «chaussures» perdues sur les rives du Rio Grande par des migrants qui avaient «mal fini». «La migration est un droit, un droit qu’on retrouve déjà, dans les Écritures saintes, dans l’Ancien Testament», a-t-il insisté. Il a dénoncé l’esclavage que subissent aujourd’hui certains migrants en Amérique centrale.
S’en prenant à un argument de campagne porté par la candidate démocrate Kamala Harris, le pape a réitéré sa position intransigeante: «Effectuer un avortement, c’est tuer un être humain. Que ce mot te plaise ou non, c’est tuer». Il a critiqué ceux qui voient en l’Église une institution «fermée» en raison de cette position. «Renvoyer un enfant du sein de sa maman, c’est un assassinat», a-t-il martelé.
Argentine: un voyage encore indécis
Interrogée par sa compatriote journaliste Elisabetta Piqué, le pape François a affirmé ne pas avoir encore décidé s’il se rendrait en Argentine, son pays d’origine où il n’est pas retourné depuis son élection en 2013. Mais s’il venait à s’y rendre, le pape a confirmé qu’il comptait faire une étape par les îles Canaries (Espagne) en raison de l’impact de la crise migratoire sur cet archipel situé au large du Maroc.
Aucun autre projet de voyage n’a été évoqué pendant la conférence de presse. Le seul voyage apostolique programmé pour l’heure est celui au Luxembourg et en Belgique, qui se tiendra du 26 au 29 septembre prochain.
Les autres déclarations du pape
Comme à son habitude, le pape François a répondu aux questions des journalistes des pays visités – Indonésie, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Timor oriental et Singapour. Il a confié avoir particulièrement apprécié le Timor oriental, dont il a dit être tombé «amoureux». Il est revenu sur la métaphore des «crocodiles» employée lors de la messe à Tasi Tolu, expliquant avoir voulu désigner les «idées qui peuvent ruiner» la «culture de vie» du Timor, rappelant que le pays compte beaucoup d’enfants.
Le pape a aussi loué la beauté de la Papouasie Nouvelle-Guinée et a félicité un journaliste indonésien pour son pays. Il a salué la culture singapourienne et sa capacité à rayonner sur la scène internationale en citant le prochain Grand Prix de Formule 1 qui s’y tiendra.
Le pontife a enfin évoqué le conflit en Terre sainte, regrettant l’absence «d’avancées» vers la paix de la part des deux parties. Il a tenu à saluer le travail effectué par le roi Abdallah de Jordanie, un «homme de paix» selon lui. (cath.ch/imedia/cd/rz)