Normandie: chants «anti-Macron» dans une église
L’abbé Francis Michel, appartenant au diocèse d’Evreux, a célébré le dimanche 2 juin 2019 une messe fustigeant le président français Emmanuel Macron. L’évêché d’Evreux, qui a déjà suspendu le prêtre en 2016, pourrait le frapper «d’interdiction».
«Emmanuel Macron, oh tête de c…, on vient te chercher chez toi!», entonne Francis Michel avec des Gilets jaunes réunis dans son église du Planquay, dans l’Eure. La scène a été visionnée des milliers de fois sur les réseaux sociaux. Le Père Michel est connu pour son soutien au mouvement de protestation anti-gouvernemental français. Il avait notamment rejoint les manifestants sur des ronds points et affublé une statue du petit Jésus du veston jaune.
L’influence d’une église schismatique
L’épisode a provoqué l’ire de Mgr Christian Nourrichard, rapporte le quotidien Le Parisien. Il s’inscrit en effet dans le cadre d’un conflit prolongé entre la hiérarchie du diocèse et le prêtre turbulent. Ce dernier est sous le coup d’une «suspense a divinis», décrétée en 2016. En 2015, il avait déjà été déchu de sa charge de curé par le Vatican pour une affaire de détournement de fonds de près de 100’000 euros, selon Le Parisien. Le décret de «suspense» souligne que Francis Michel n’aurait pas respecté les règles constitutives de sa fonction de recteur de l’église du Planquay. Le diocèse lui reproche «de multiples fautes et désobéissances».
Il semble que le Père Michel soit proche de l’église Sainte-Marie du Mont Saint Aignan. Cette église est le centre d’une petite communauté parallèle chrétienne «autocéphale» et schismatique fondée par un ancien prêtre catholique, Maurice Cantor, dans les années 1970. Ses fidèles refusent certaines orientations du Concile Vatican II. Ils honorent aussi sainte Rita, pratiquent l’exorcisme, des «guérisons charismatiques» et la bénédiction des voitures. L’église admettrait également le mariage des prêtres et l’administration des sacrements aux divorcés-remariés. L’un des griefs posés par la «suspense a divinis» de 2016 était d’ailleurs la bénédiction accordée par le Père Michel à des «remariages civils de personnes encore liées par un mariage canonique». Il se serait également fait remplacer, pour la célébration de l’Eucharistie, par un prêtre de Sainte-Marie du Mont Saint Aignan.
Privés des «biens spirituels»?
La suspense interdit à l’abbé Francis Michel l’administration des sacrements «sauf à des fidèles en danger de mort». Or, le document spécifie que «si l’abbé Francis Michel ne se soumettait pas à cette suspense, il serait passible d’interdiction». Cette sanction canonique, proche de l’excommunication, a pour effet, jusqu’à son absolution, la privation des biens spirituels: offices divins, sépulture en terre consacrée, sacrements.
«Cet homme continue à faire tout et n’importe quoi», a commenté Mgr Nourrichard au Parisien. «Ce qu’il fait est une défiguration de ce que doit être l’Eglise». L’évêque a affirmé avoir contacté la mairie pour une fermeture juridique de l’église du Planquay. «Il y a une autre procédure, c’est demander qu’il retourne à l’état laïc», a-t-il ajouté.
Outre l’Eglise, le Père Michel pourrait avoir maille à partir avec l’Etat. La préfecture de l’Eure aurait décidé de saisir le parquet, les «chants hostiles» étant susceptibles de contrevenir à loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l’Etat. Ils pourraient aussi constituer un «outrage» à la personne du chef de l’Etat. (cath.ch/parisien/com/rz)