Le jésuite Jean-Blaise Fellay
Suisse

Jean-Blaise Fellay et la preuve de l’existence de l’âme

L’étude des sorties hors du corps représente un questionnement bienvenu du dogme matérialiste, affirme le jésuite suisse Jean-Blaise Fellay. Mais davantage que les pouvoirs de son esprit, l’important pour l’homme est la rencontre avec un Dieu aimant.

Le directeur spirituel aux séminaires diocésains de Lausanne, Genève et Fribourg et de Sion commente le livre Voyage aux confins de la conscience, de Sylvie Dethiollaz et Claude Charles Fourrier, responsables de l’Institut suisse des sciences noétiques (ISSNOE), à Genève. L’ouvrage, publié en septembre 2016, relate les résultats étonnants de dix ans d’études sur le cas de Nicolas Fraisse, un jeune Français qui assure pouvoir régulièrement sortir de son corps et explorer, en esprit, son environnement:

Je ne sais pas si les expériences de Nicolas Fraisse sont une preuve de l’existence de l’âme, mais elles montrent en tout cas qu’il reste encore bien des énigmes à découvrir à propos de l’esprit humain.

Depuis le matérialisme causaliste de Lavoisier et la compréhension mécaniste des animaux selon Descartes, la physique et la neurophysiologie ont immensément élargi notre compréhension du monde. La science du 20e siècle a brisé le cadre rigide de la physique newtonienne avec la découverte de la relativité du temps et de l’espace et plus encore avec la physique quantique, qui a exposé les comportement paradoxaux de l’électron.

C’est pourquoi le vieux débat entre science et religion a quitté les oppositions tranchées du 19e siècle et a laissé apparaître des convergences concernant l’origine du monde et son évolution.

La pensée comme sécrétion du cerveau?

Mais ce n’est pas parce que de vieilles certitudes scientistes se sont mises à trembler que les croyants doivent espérer voir les sciences modernes plaider en faveur des convictions religieuses, même si des ouvertures vers les spiritualités orientales se sont manifestées parmi des physiciens contemporains.

Le scientisme athée à la soviétique a sombré dans le discrédit et plus personne n’ose présenter la pensée humaine comme une émanation du cerveau, que celui-ci produirait d’une manière quasiment chimique comme le foie produit la bile.

«Comment expliquer que des serpents ou des éléphants aient échappé aux tsunamis en Indonésie»

L’Ecole polytechnique de Lausanne dirige le grand projet européen sur le cerveau qui va certainement nous apprendre nombre de choses nouvelles. Nous pourrons accorder plus d’attention à nombre de phénomènes comme ceux auxquels s’intéresse le centre ISSNOE et auxquels nous ne pouvions pas donner d’explications valables.

Pouvoirs animaux

L’esprit humain mais aussi celui des animaux supérieurs possède des capacités que nous avons largement sous-estimées. Même chez les plantes sont mises en évidence des capacités de sensation et de réaction aux agressions surprenantes de précision et d’efficacité. Comment expliquer que des serpents ou des éléphants aient échappé aux tsunamis en Indonésie alors que nos centres de détection des tremblements de terre n’avaient encore rien repéré. Ou que les mêmes laboratoires en Californie utilisent des blattes, insectes très primitifs, pour déceler des mouvements tectoniques en profondeur?

Tous rêveurs, tous médiums?

Pour en revenir à l’homme, pensons simplement à ce phénomène que chacun connaît, les rêves. Rien n’est plus bizarre et irrationnel qu’un rêve. Et pourtant chacun de nous a fait l’expérience d’un songe dit prémonitoire ou l’une de ces histoires étranges à laquelle nous avons assisté dans notre sommeil et dont nous sommes convaincus qu’elle possède un sens profond, dont nous tentons de saisir la signification au réveil. Toutes les littératures anciennes comportent des récits de rêves. Nous nous rappelons, dans la Bible, des sept vaches grasses et des vaches maigres du pharaon égyptien, ou du colosse aux pieds d’argile du livre de Daniel. Les sages, devins ou prophètes de l’antiquité étaient de grands interprètes de rêves, dont ils donnaient une lecture politique et historique fort concrète. Un psychiatre athée et rationaliste comme Sigmund Freud a consacré une attention prolongée à ce phénomène, auquel il a donné souvent une interprétation sexuelle, qui n’était pas dénuée de bon sens.

Au sommet, la rencontre avec Dieu

Alors qu’en est-il de l’âme? Je ne vais pas entrer dans le domaine religieux, dans lequel les visions, les auditions, les extases sont des expressions classiques. J’en reste à ces phénomènes étudiés par les psychologues attentifs aux questions spirituelles: les «expériences-sommet». Ces moments où la personne se sent transportée, transformée, épanouie. Elle a l’impression d’être en contact avec l’Indicible, l’Infini, le Divin. Elle en ressort apaisée, confiante, certaine d’un Autre dont elle a perçu la bienveillance.

«Les rencontres épanouissantes avec un Dieu ami de l’homme sont de tous les temps»

Je ne sais pas s’il s’agit de la même chose que les expériences de «sortie hors du corps», d’avoir traversé un instant de mort puis d’être rentré en soi. C’est, de toute manière, une expérience autrement plus riche que de lire des objets cachés dans une enveloppe fermée sous contrôle d’huissier ou de communiquer à distance avec des êtres chers.

Sans doute en apprendrons nous encore davantage sur les capacités surprenantes de l’esprit humain, mais les rencontres épanouissantes avec un Dieu ami de l’homme sont de tous les temps. Ceux qui les ont faites ne les ont jamais oubliées et qu’importe ce que les neurosciences nous expliquent, ce qui compte finalement, c’est de les avoir vécues.

Né en 1941, entrée chez les jésuites en 1961, spécialiste de l’Histoire de l’Eglise, Jean-Blaise Fellay est engagé comme directeur spirituel aux Séminaires diocésains des Diocèses de Lausanne, Genève et Fribourg et de Sion. (cath.ch-apic/rz)