New York: Excuses du cardinal O’Connor du tort fait aux juifs par l’Eglise catholique

Une annonce à 100’000 dollars dans le «New York Times»

New York, 23 septembre 1999 (APIC) L’archevêque de New York, le cardinal John Joseph O’Connor, a fait des excuses publiques pour le tort fait aux juifs par l’Eglise catholique durant deux millénaires de christianisme. Ces excuses ont pris la forme d’une annonce d’une page entière payéée 100’000 dollars (pour être précis 99’000 US$) publiée dans le «New York Times».

L’initiative du cardinal new-yorkais, connu pour sa sympathie envers le monde juif, a été sponsorisée par le président de la firme Burberry, Victor Barnett, le Prix Nobel de la Paix Elie Wiesel, et le président de la Banque Mondiale James Wolfensohn. L’annonce a été publiée dans l’édition dominicale du grand quotidien américain.

Le cardinal O’Connor a saisi l’occasion de la fête juive du grand pardon, le Yom Kippour (littéralement: Jour des Expiations), pour exprimer son profond regret pour tous les membres de l’Eglise catholique, responsables ou simples fidèles, qui auraient pu faire du tort de quelque façon que ce soit aux juifs d’aujourd’hui ou à ceux des générations précédentes. La lettre ne mentionne pas l’Holocauste ou l’antisémitisme, rapporte le quotidien israélien «The Jerusalem Post». Cependant, le porte-parole du cardinal O’Connor, Joseph Zwilling, a précisé que la lettre se référait aux atrocités nazis et aux autres actes d’antisémitisme des deux derniers millénaires.

Dans sa lettre portant la date du 8 septembre, le cardinal new-yorkais rappelle le nouvel an juif, inaugurant l’an 5760 du calendrier juif. Il explique que les chrétiens vont débuter une ère nouvelle en entrant dans le nouveau millénaire. Le pape Jean Paul II a lancé un appel pour que ce passage ait lieu «dans l’esprit du Jubilé», qui «inclut un appel à la ’teshuva’ ou repentir».

L’archevêque de New York, depuis 1984 à la tête de ce diocèse de 2,3 millions de catholiques, est aujourd’hui âgé de 79 ans. Il souligne encore que le Mercredi des cendres, qui tombera l’an prochain le 8 mars, a été choisi spécialement comme journée pour que les catholiques réfléchissent aux souffrances infligées dans l’histoire au peuple juif par de nombreux fidèles de l’Eglise catholique. «Nous désirons très sincèrement débuter une ère nouvelle», écrit le cardinal O’Connor.

La lettre arrive au moment où l’action du Vatican durant la Deuxième Guerre mondiale est à nouveau la cible de violentes attaques, comme celles contenues dans le livre très controversé de John Cornwell, «Le pape et Hitler», où l’auteur allègue la complicité du pape Pie XII avec les nazis. Adressée par le cardinal à ses «très chers amis», elle a été envoyée quelques jours après l’opération d’une tumeur au cerveau qu’a subie Mgr O’Connor. Elle se termine par l’assurance aux juifs de son amitié et de ses prières avec la phrase en hébreu «Leshanah Tova Tikatevu».

Ne pas alimenter la «légende noire»

Les demandes de pardon «tous azimuts» de l’Eglise catholique ne plaisent pas à tout le monde et diverses réactions se sont déjà fait entendre de divers côtés. Ainsi, le cardinal brésilien Lucas Moreira Neves, préfet de la Congrégation pour les Evêques, a mis en garde contre le risque d’alimenter la «légende noire» en parlant de demande de pardon de l’Eglise catholique, rapporte l’agence catholique ACI à Lima.

Pour le cardinal, les catholiques en Amérique latine doivent particulièrement faire attention au moment de parler de demande de pardon: «Il est nécessaire d’être attentifs à ce qu’on appelle la ’légende noire’ qui place au premier plan les violences et les violations des droits» quand on évoque ce qui s’est passé sur le continent latino-américain à partir de 1492.

Tout en admettant les éléments négatifs de la «conquista», le cardinal brésilien mentionne également les aspects positifs «comme l’énorme effort évangélisateur». Le cardinal brésilien explique que dans la perspective de demande de pardon et de réconciliation chrétienne à l’occasion du Grand Jubilé de l’an 2000, «ce qui compte, c’est la réponse personnelle des consciences individuelles: un acte de repentir, de purification se demande toujours aux personnes, quoique nous ne sachions pas comment pourront répondre les peuples et les collectivités». Le cardinal Moreira Neves relève encore que la «demande de pardon» suppose toujours qu’il y a en face quelqu’un disposé à le concéder. «C’est la promesse d’une réconciliation, qui vient également d’une purification de la mémoire», mais ce processus requiert «beaucoup de sérénité et d’objectivité historique, comme le dit le pape». (apic/jpost/jr/aci/be)

23 septembre 1999 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture: env. 3 min.
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