Myanmar: le pape «devrait soutenir» Aung San Suu Kyi, estime le directeur d'AsiaNews
Lors de son voyage apostolique au Myanmar et en Birmanie, le pape François devrait s’adresser aux «minorités blessées», a affirmé le Père Bernardo Cervellera, lors d’une conférence de presse le 10 octobre 2017. Pour le directeur d’AsiaNews, la visite pontificale au Myanmar aura aussi pour objet de soutenir le ‘Premier ministre’ Aung San Suu Kyi.
Au Myanmar, l’Eglise est très présente parmi les nombreuses minorités du pays, qui vivent dans les montagnes, en marge de la culture bouddhiste majoritaire, a expliqué Père Bernardo Cervellera, membre de l’Institut pontifical pour les missions étrangères (PIME). Ainsi, parmi les 135 ethnies figurent bon nombre de chrétiens. Chez les Kayah, par exemple, 20% sont catholiques. Pour les Karens, on compte une majorité de chrétiens, catholiques et protestants.
Ce sont des «minorités blessées» que l’armée et la junte birmane comptent pour rien, a souligné le prêtre, au même titre que les Rohingyas aujourd’hui au cœur de l’actualité.
Ceci s’explique notamment par le fait que les terres de ces minorités, situées aux confins du pays, sont très riches en matière première: jade, pétrole, gaz, bois. Il est donc probable selon lui que le pape parlera de l’usage des biens de la terre, de la juste distribution des richesses dans ce pays «merveilleux».
Laisser du temps à Aung San Suu Kyi
Concernant Aung San Suu Kyi, «il faut laisser du temps» pour que son programme de réconciliation entre les différentes ethnies porte du fruit, affirme-t-il. Ce que ne fait pas la communauté internationale. Nommée Conseillère spéciale de l’Etat et ministre des Affaires étrangères – l’équivalent de Premier ministre –, elle a été critiquée pour son absence de réaction officielle à la fuite d’un demi-million des Rohingyas au Bangladesh voisin, en six semaines.
Pour le Père Cervellera, l’une des raisons de ce voyage du pape est à l’inverse de soutenir la lauréate du Prix Nobel de la paix 1991.
Il faut également que la communauté internationale, soutient-il, prenne en compte d’autres facteurs de cette crise que la question de la citoyenneté pour les minorités. Notamment le projet, soutenu par le Pakistan, de créer un Etat islamique entre le Bangladesh et le Myanmar. Mais aussi de protéger le commerce d’opium.
Une Eglise de pauvres
L’Eglise dans ces deux pays, le Bangladesh et le Myanmar, est une «Eglise de pauvres», a par ailleurs étayé le directeur d’AsiaNews. Dans les deux cas, elle représente moins de 1% de la population et sa mission est essentiellement celle de la charité: écoles, dispensaires.
Cela explique aussi pourquoi au Bangladesh, très religieux, l’Eglise est très estimée et respectée, voire même provoque des conversions parmi les tribus animistes, dans un pays où le salaire moyen est de 20 euros par mois. Cela constitue une main-d’œuvre très bon marché pour les nombreuses entreprises, occidentales ou chinoises, qui s’installent dans le pays. Dans cet Etat musulman, qui connaît également une certaine radicalisation financée par l’Arabie Saoudite, un des autres enjeux sera donc le dialogue avec les musulmans. (cath.ch/imedia/ap/gr)