Multinationales responsables: les Eglises de Suisse en soutien
La Conférence des évêques suisses (CES) et l’Église évangélique réformée de Suisse (EERS) partagent les soucis des auteurs de l’initiative «Pour des multinationales responsables». Dans une prise de position commune publiée le 8 octobre 2020, les Eglises rappellent que «l’économie a besoin des droits humains».
La prise de position des Eglises entend livrer quelques réflexions théologiques et éthiques fondamentales visant à fournir des points de repères pour la votation du 29 novembre 2020. Ce jour-là, le peuple suisse devra se déterminer sur l’initiative intitulée «Pour des multinationales responsables». Le texte demande à la Confédération de prendre «des mesures pour que l’économie respecte davantage les droits de l’homme et l’environnement». Il s’agit d’obligations juridiquement contraignantes qui peuvent faire l’objet de contrôles et de sanctions. Ces conditions doivent s’appliquer non seulement en Suisse, mais dans tous les pays où des entreprises suisses ou leurs filiales sont présentes.
«Qui a peu dans la vie doit avoir plus en droit»
Pour les Eglises, cette initiative se fonde sur deux exigences centrales du message biblique : l’amour du prochain et la préservation de la Création. «L’Église se doit de se porter garante de ces principes – dans le monde entier».
Le texte soulève en outre en toile de fond une question récurrente: «Sur quelle justice peuvent s’appuyer celles et ceux qui n’ont ni le pouvoir ni la possibilité de lutter pour ces droits et les faire valoir en justice?» En 1967, le Conseil œcuménique des Églises (COE), basé à Genève, avait déjà formulé un principe qui, dans le contexte mondialisé d’aujourd’hui, reste toujours aussi prioritaire: «Qui a peu dans la vie doit avoir plus en droit.» Les Eglises protestantes et catholique en Suisse estiment que l’initiative peut contribuer à mettre en place ce principe.
Pour une protection juridique maximale
Pour les évêques et l’Eglise protestante, il est inadmissible que des normes contraignantes dans le domaine des droits humains deviennent l’objet de négociations sur le marché mondial et soient mises en balance avec les arguments économiques de compétitivité et de sécurité du site d’implantation.
Les entreprises qui basent leurs pratiques commerciales sur une application lacunaire des droits humains ou sur des contrôles insuffisants de leurs violations acquièrent ainsi un avantage économique aux dépens des droits fondamentaux des personnes concernées à bénéficier d’une protection. Face à ce genre de pratiques, les directives existantes de Corporate Social Responsibility sont impuissantes, jugent la CES et l’EERS, car les entreprises n’ont pas de conséquences à craindre. «Une protection juridique la plus étendue possible – couvrant l’activité économique mais aussi et surtout les acteurs du marché – est indispensable si l’on tient à une économie mondiale libre», lancent les Eglises.
Elles précisent finalement qu’il revient «à chaque citoyenne et citoyen de juger de l’objet politique soumis au vote et de décider en son âme et conscience».
Les principales Eglises chrétiennes de Suisse avaient déjà exprimé leur soutien à l’initiative en janvier 2020. (cath.ch/com/rz)