Mort de Jimmy Carter, un président qui ne mélangeait pas foi et politique
L’ancien président des États-Unis Jimmy Carter est décédé le 29 décembre 2024 en Géorgie, à l’âge de 100 ans. Tout en étant un croyant convaincu, ce baptiste du Sud était strictement attaché à la séparation de la religion et de l’État.
«Le meilleur président conservateur des cinq dernières décennies» titre le Time Magazine, «Le plus grand ex-président de tous les temps», selon usnews…. La presse américaine est spécialement élogieuse pour Jimmy Carter, qui a dirigé le pays de 1977 à 1981. Lauréat du Prix Nobel de la paix en 2002, il est surtout estimé pour son action en faveur de la concorde mondiale. Il a notamment été l’artisan des accords de Camp David en 1978 entre Israël et l’Égypte, qui a mis fin à l’état de guerre entre les deux pays. Après son mandat, il s’est engagé, avec le Centre Carter qu’il a fondé, pour la diffusion de la démocratie et des droits de l’homme dans le monde entier.
Il priait plusieurs fois par jour
L’ancien président démocrate possédait également une importante dimension religieuse, affirmant notamment prier plusieurs fois par jour. Ce baptiste du Sud représentait «la plus grande famille protestante des États-Unis», rappellait Philippe Gonzalez à cath.ch en octobre 2024. Le sociologue des religions, spécialiste du protestantisme américain souligne que Jimmy Carter a été «le premier visage politique des évangéliques», même s’ils ont fini par ne plus se reconnaître en lui.
Alors que les baptistes du Sud sont connus pour leur conservatisme, le président élu en 1977 va prendre une orientation plus «progressiste» que prévu. Opposé à la peine de mort, favorable au contrôle des armes, il sera décoré par l’association Martin Luther King pour son travail contre des discriminations raciales. Il va aussi soutenir un amendement constitutionnel en faveur de l’égalité des droits entre hommes et femmes, criminalisant la discrimination sexuelle.
«Les chrétiens sont appelés à ‘s’impliquer dans la vie du monde’» – Jimmy Carter
Il a en fait été actif dès son plus jeune âge au sein de la communauté baptiste de sa ville natale de Plains, en Géorgie. Même en tant que président, il a continué à donner des cours bibliques à la «First Baptist Church» de Washington, rappelle l’agence allemande KNA. Un engagement d’enseignement qu’il maintiendra pratiquement jusqu’à sa mort. Alors qu’il est atteint d’une tumeur au cerveau, il continue à travailler comme diacre dans sa paroisse d’origine. Le baptiste a également été toute sa vie en première ligne de l’association «Habitat for Humantiy», qui construit des maisons pour les démunis.
Distinction entre valeurs personnelles et de l’État
Ces engagements lui vaudront les foudres de la droite chrétienne conservatrice, qui soutiendra avec succès son rival républicain Ronald Reagan. Un candidat qui se montrera beaucoup plus expressif sur sa foi chrétienne. L’ancien acteur faisait en effet souvent référence à ses croyances chrétiennes dans ses discours, invoquant les conseils de Dieu et exprimant une forte croyance en la prière. Une attitude qui a préfiguré la mise en scène de la religion par certains présidents, tels que Donald Trump.
De son côté, Jimmy Carter était «désireux de faire la distinction entre les valeurs spirituelles, religieuses et personnelles, et les valeurs de l’État», note Philippe Gonzalez. Un État d’esprit reflété notamment par sa position sur l’avortement. Opposé à cette pratique sur le plan personnel, il la considérait cependant comme acceptable au regard de la liberté individuelle. Plus tard, il s’est engagé pour le mariage pour tous. Jésus aurait soutenu toute relation amoureuse qui est «honnête et sincère», a-t-il notamment déclaré au Huffington Post.
D’une manière générale, Jimmy Carter, considérait ses valeurs morales comme une boussole pour la politique. Les chrétiens sont appelés à «s’impliquer dans la vie du monde», avait-il écrit dans son livre Foi: un voyage pour tous (2018).(cath.ch/arch/ag/rz)
Le pape François rend hommage à «la foi chrétienne profonde» de Jimmy Carter
«Sa Sainteté le pape François a été attristée d’apprendre la mort de l’ancien président Jimmy Carter et offre ses condoléances», est-il indiqué dans un télégramme signé par le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État du Saint-Siège, diffusé au lendemain de la mort de l’ancien chef d’État.
Dans ce message, le pape rappelle «le ferme engagement» de Jimmy Carter, «motivé par une foi chrétienne profonde, pour la cause de la réconciliation et de la paix entre les peuples, la défense des droits humains et le bien-être des pauvres et des personnes dans le besoin».
Le 6 octobre 1979, Jimmy Carter fut le premier président américain à recevoir un pape à la Maison Blanche, en la personne de Jean Paul II. IMEDIA/CV