Mai 2011: le pape Benoît XVI salue les fidèles sur la place Saint-Pierre à l'occasion de la béatification du pape Jean-Paul II, le 1er mai 2011 dans la Cité du Vatican | DR
Dossier

Mort de Benoît XVI: 30 dates pour un pontificat hors normes

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De sa naissance en avril 1927 à sa mort survenue le 31 décembre 2022, Joseph Ratzinger aura servi l’Église catholique jusqu’au bout. Retour sur le parcours de celui qui fut le 265e successeur de Pierre, puis pape émérite de 2013 à 2022.

16 avril 1927: Joseph Ratzinger naît un Samedi Saint, à Marktl-am-Inn, dans le diocèse bavarois de Passau. Il est baptisé le même jour. Son père, officier de gendarmerie, est issu d’une vieille famille d’agriculteurs de Bavière du sud, aux conditions économiques très modestes. Sa mère est fille d’artisans de Rimsting, au bord du lac Chiem.

1941: Alors qu’il a 14 ans, Joseph Ratzinger est intégré contre son gré dans les jeunesses hitlériennes. En 1944, il refuse d’entrer dans la Waffen-SS, faisant valoir qu’il veut devenir prêtre.

29 juin 1951: Joseph Ratzinger est ordonné prêtre en même temps que son frère Georg dans la cathédrale de Freising, par le cardinal Michael von Faulhaber. Dès l’année suivante, il commence à enseigner à l’Institut supérieur de Freising. Il a suivi des études de philosophie et de théologie à l’Université de Munich, puis à l’Ecole supérieure de Freising, se spécialisant dans l’étude de la Bible et de la liturgie. Il obtient en 1953 son doctorat en théologie, avec une thèse sur Le peuple et la maison de Dieu dans la doctrine ecclésiale de saint Augustin. En 1957, il défend sa thèse d’habilitation à l’enseignement, intitulée La Théologie de l’histoire chez saint Bonaventure.

11 octobre 1962: Ouverture du Concile Vatican II durant lequel Joseph Ratzinger intervient en tant qu’expert. Il assiste le cardinal Joseph Frings, archevêque de Cologne, comme conseiller théologique. Son intense activité scientifique l’amène à assumer d’importantes charges au sein de la Conférence épiscopale allemande et de la Commission théologique internationale.  

Joseph Ratzinger (à gauche), futur Benoit XVI, discutant Yves Congar lors du Concile Vatican II (Rome, 1962) | DR

24 mars 1977: Nomination à l’archevêché de Munich et Freising par le pape Paul VI. Il choisit pour devise épiscopale  : «Cooperatores Veritatis»  – collaborateur de la Vérité. En juin de la même année, il est créé par Paul VI cardinal-prêtre de Santa Maria Consolatrice al Tiburtino. L’année suivante, il rencontre pour la première fois Karol Wojtyla, avec qui il échange pourtant des livres depuis plusieurs années.

25 novembre 1981: Jean Paul II le nomme préfet de la congrégation pour la Doctrine de la foi et président de la Commission biblique pontificale ainsi que de la Commission théologique internationale. Durant 23 ans, il rencontre Jean-Paul II chaque vendredi soir, pour faire le point sur le travail de la congrégation pour la Doctrine de la foi.

11 octobre 1992: il promulgue le Catéchisme de l’Église Catholique. Le cardinal Ratzinger est président de la commission qui travaille depuis 1986 sur cet ouvrage résumant la foi, l’enseignement et la morale de l’Église catholique. En 1983, il avait remis en cause le Catéchisme Pierres Vivantes, élaboré par la Conférence des évêques de France, et dénoncé «la grande misère de la catéchèse nouvelle».

6 août 2000: Publication par la CDF de la déclaration Dominus Iesus, sur l’unicité et l’universalité salvifique de Jésus et de l’Église. Cette déclaration, écrite par le cardinal Ratzinger et son secrétaire Tarcisio Bertone, réaffirme que l’Église catholique est l’unique source de Salut pour l’humanité. Ce texte veut lever certaines ambiguïtés touchant au dialogue avec les autres religions et rassurer ceux qui craignaient que la rencontre d’Assise de 1986 ne favorise le relativisme, une forme de tolérance où toutes les religions se valent.

25 mars 2005: Une semaine avant la mort de Jean Paul II, le cardinal Ratzinger dresse un portrait sombre de l’Église lors de ses méditations et prières du Chemin de Croix, au Colisée, à Rome. Le préfet de la congrégation pour la Doctrine de la foi compare même l’Église à une «barque prête à couler». 

19 avril 2005: Après un conclave d’à peine plus de 24h, la fumée blanche apparaît sur le toit de la chapelle Sixtine, et le traditionnel «Habemus Papam» annonce aux fidèles que le cardinal Joseph Ratzinger succède à Jean Paul II sur le siège de Pierre, sous le nom de Benoît XVI. Il devient le 265e pape de l’Église catholique et garde pour devise: «Ut cooperatores simus Veritatis» (»Afin que nous coopérions à la publication de la Vérité»).

13 mai 2005: Sans attendre le délai habituel de 5 ans, Benoît XVI lance l’ouverture de la cause de béatification et de canonisation de Jean Paul II. Il proclamera les vertus héroïques de son prédécesseur le 19 décembre 2009 et le proclamera bienheureux le 1er mai 2011, devant plusieurs centaines de milliers de fidèles. Le pape polonais a été béatifié en un temps record: 6 ans et 1 mois après son décès. Benoît XVI sera présent sur la place Saint Pierre lors de la canonisation de Jean Paul II par le pape François, le 7 mai 2014.

16 août 2005: Benoît XVI préside les Journées Mondiales de la Jeunesse, lancées par son prédécesseur, qui rassemblent à Cologne, en Allemagne, 1 million de jeunes de 193 pays. Il célébrera la messe de clôture des JMJ de Sydney en juillet 2008, ainsi que celle de Madrid en août 2011.

Les JMJ rassemblent des millions de jeunes du monde entier. (Photo: Flickr/Aires/CC BY-NC-ND 2.0)

25 janvier 2006: Publication de la première encyclique de Benoît XVI, intitulée Deus Caritas est, dans laquelle il parle de «l’amour dont Dieu nous comble et que nous devons communiquer aux autres». La seconde, Spe Salvi, consacrée à «l’espérance chrétienne», est publiée le 30 novembre de l’année suivante. Enfin, la troisième et dernière encyclique du pape allemand, Caritas in Veritate, touchant au développement intégral de l’homme dans la charité et la vérité, est publiée le 7 juillet 2009.

19 mai 2006: Suite à l’enquête menée par la congrégation pour la Doctrine de la foi sur les accusations d’abus sexuels contre le fondateur de la congrégation des Légionnaires du Christ, Benoît XVI demande au père Marcial Maciel de renoncer «à tout ministère public» et à vivre «une vie réservée de prière et de pénitence». Après un examen approfondi des résultats de son enquête canonique et en raison de «l’âge avancé et de la santé maladive» de l’accusé, la congrégation pour la Doctrine de la foi décide de renoncer à un procès canonique.  

12 septembre 2006: À l’Université de Ratisbonne, Benoît XVI prononce un discours dont l’une des phrases, portant sur la violence de l’islam, suscite une vive polémique dans le monde musulman. Deux mois plus tard, à l’occasion de son voyage apostolique en Turquie, le pontife se recueille avec le grand mufti Cagrici dans la mosquée bleue d’Istanbul.

7 juillet 2007: Benoît XVI publie le Motu proprio Summorum Pontificum, visant à libéraliser la célébration de la messe selon le missel promulgué par saint Pie V et réédité par Jean XXIII. Il désire par là redonner sa place à la liturgie latine de l’Église qui, «sous ses diverses formes, au cours de tous les siècles de l’ère chrétienne, a stimulé la vie spirituelle d’innombrables saints» et «a fortifié beaucoup de peuples dans la vertu de religion et fécondé leur piété».

24   janvier 2009: Benoît XVI lève l’excommunication qui pesait sur les quatre évêques de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X ordonnés par Mgr Lefebvre en 1988. Par cet acte, qui répond au second préalable posé par la Fraternité pour engager un dialogue doctrinal avec Rome (le premier étant la libéralisation de la messe de saint Pie V), le pape allemand «désire consolider les relations réciproques de confiance, intensifier et stabiliser les rapports de la Fraternité Saint-Pie-X avec le Siège apostolique».

Le cardinal Ratzinger avait été le principal interlocuteur de Mgr Lefebvre, entre 1982 et 1988, sans parvenir à le maintenir dans le giron romain | DR

17 mars 2009: Dans son avion qui le conduit au Cameroun, alors qu’il entame son premier voyage apostolique en Afrique, le pape, au cours de sa conférence de presse, affirme que la distribution de préservatifs en Afrique pour lutter contre le sida n’arrangera pas le problème, mais risque au contraire de l’aggraver. Ces propos provoquent une polémique. Un an plus tard, dans son livre entretien Lumière du Monde, le pape allemand dira que «dans certains cas», comme celui d’hommes qui se prostituent, l’utilisation du préservatif est admise, «pour réduire les risques de contamination».

19 septembre 2010: Lors de son dernier jour de visite au Royaume-Uni, le pontife allemand béatifie le cardinal John Henry Newman, anglican converti à la foi catholique en 1845. Le 4 novembre 2009, Benoît XVI avait signé la constitution apostolique Anglicanorum Caetibus, qui organise une structure canonique destinée à accueillir des anglicans au sein de l’Église catholique romaine tout en leur permettant de maintenir leurs traditions liturgiques, spirituelles et pastorales.

22 décembre 2012: Le pape gracie Paolo Gabriele, son ancien majordome, après quatre mois de détention dans le cadre de l’affaire Vatileaks. Ce dernier avait été condamné le 6 octobre précédent à 18 mois de prison après avoir été reconnu coupable du vol aggravé de documents confidentiels en provenance des appartements pontificaux. 

11 février 2013: Benoît XVI annonce qu’il renoncera à ses fonctions le 28 février suivant, avançant son «incapacité à bien administrer le ministère qui (lui) a été confié». Quelques heures avant la fin de son pontificat, depuis le balcon du palais apostolique de Castel Gandolfo, le pape allemand déclare qu’il est «simplement un pèlerin qui débute la dernière étape de son pèlerinage sur cette terre». Il assure en rentrant au Vatican qu’il va continuer à servir l’Église, «essentiellement à travers la prière». Le 5 juillet de la même année, Benoît XVI se joint au pape François à l’occasion de l’inauguration d’une statue de saint Michel dans les jardins du Vatican. Le même jour, le pape François publie sa première encyclique, Lumen Fidei. Celle-ci, largement rédigée par le pape émérite, contient «quelques contributions ultérieures» du nouveau pontife.

22 février 2014: Deuxième apparition publique après sa renonciation, et première participation à une cérémonie officielle présidée par son successeur, le pape Benoît XVI rencontre le pape François à la basilique Saint-Pierre, à l’occasion d’un consistoire pour la création de cardinaux. Le 14 février de l’année suivante, le pape allemand sera à nouveau présent dans la basilique vaticane pour le second consistoire du pape argentin pour la création de cardinaux.

8 décembre 2015: Benoît XVI est présent lorsque le pape François ouvre solennellement la Porte sainte de la Basilique Saint-Pierre, pour marquer l’ouverture du Jubilé de la miséricorde. C’est la dernière apparition véritablement publique du pape allemand. Le 28 juin 2016, Benoît XVI figure aux côtés du pape François, devant un public réduit de prêtres et de cardinaux, à l’occasion des 65 ans de sacerdoce du pape émérite, célébrés dans la salle Clémentine au Vatican.  

9 septembre 2016: Parution du livre-entretien intitulé Dernières conversations, dans lequel le pape émérite aborde avec le journaliste allemand Peter Seewald les raisons de sa renonciation, le moments forts de son pontificat, la personnalité de son successeur, mais aussi de nombreux sujets polémiques, tels que le scandale Vatileaks, la réforme de la Curie, etc… Il y assure notamment que le pape François est «l’homme de la réforme pratique».

3 octobre 2017: Le pape émérite préface l’édition russe du volume de son Opera Omnia dédié à la liturgie. La cause véritable de la crise de l’Église, écrit-il, «réside dans l’obscurcissement de la priorité de Dieu» dans la liturgie. Le pape allemand déplore la «mécompréhension de la réforme liturgique» qui a fait suite au Concile Vatican II, et à cause de laquelle ont été mises en avant «l’activité et la créativité» humaines, faisant «oublier la présence de Dieu».

27 décembre 2017: En préface à un ouvrage édité pour le 40e anniversaire de sacerdoce du cardinal Gerhard Ludwig Müller, préfet émérite de la congrégation pour la Doctrine de la foi, Benoît XVI estime que le haut prélat a défendu les «claires traditions de la foi, dans l’esprit du pape François». À l’image du pape François, explique l’ancien pontife, le cardinal Müller a aussi «cherché à comprendre comment elles peuvent être vécues aujourd’hui».

Le cardinal Gerhard Ludwig Müller, ancien préfet de la Congrégation romaine pour la doctrine de la foi | © Jacques Berset

7 février 2018: Dans un courrier au journal italien Corriere della Sera, le pontife émérite indique: «Dans le lent déclin des forces physiques, je suis intérieurement en pèlerinage vers la Maison. C’est une grande grâce pour moi d’être entouré pour ce dernier bout de route, parfois un peu fatigant, d’un amour et d’une bonté que je n’aurais jamais pu imaginer.»

12 mars 2018: Le Vatican dévoile l’extrait d’un courrier de Benoît XVI relevant la «continuité intérieure» entre son pontificat et celui de son successeur. Toutefois, la publication tronquée de cette lettre cause une polémique qui aboutit le 21 mars avec la démission de Mgr Dario Edoardo Viganò du poste de préfet du Secrétariat pour la communication.

15 janvier 2020: Dans une contribution au livre du cardinal Robert Sarah, préfet de la congrégation pour le Culte divin, Des profondeurs de notre coeur (Fayard), le pape émérite livre un plaidoyer en faveur du maintien du célibat des prêtres dans l’Eglise catholique. Parue quelques jours seulement avant l’exhortation post-synodale sur l’Amazonie, cette «sortie» est perçue par certains comme une ingérence dans le pontificat du pape François. Finalement, ce dernier ne dira mot de l’ordination des viri probati dans son exhortation. 

23 janvier 2022: L’archidiocèse de Munich-Freising publie un rapport sur la responsabilité de l’exécutif dans les abus commis par des prêtres dans l’archidiocèse, entre 1945 et 2019, notamment à l’époque où l’alors cardinal Ratzinger en était l’archevêque (1977-1982). Le pontife émérite est mis en cause dans quatre cas, mais nie avoir eu connaissance des abus en question. Sa défense, très critiquée en Allemagne, reçoit cependant le soutien du Vatican.

31 décembre 2022: Le pape émérite Benoît XVI meurt à 9h34, indique le directeur du Bureau de presse du Saint-Siège, Matteo Bruni. Il avait 95 ans. L’état de santé du pontife émérite s’était récemment aggravé, le pape François appelant à prier pour son prédécesseur le 28 décembre. (cath.ch/imedia/hl/bh)

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Mai 2011: le pape Benoît XVI salue les fidèles sur la place Saint-Pierre à l'occasion de la béatification du pape Jean-Paul II, le 1er mai 2011 dans la Cité du Vatican | DR
31 décembre 2022 | 12:52
par I.MEDIA

Benoît XVI s'est éteint le 31 décembre 2022 à l'âge de 95 ans. Celui qui fut plus longtemps pape émérite que régnant a été marqué par son milieu d’origine, ancré dans la tradition catholique et hostile aux idéologies politiques extrêmes. Joseph Ratzinger a ainsi forgé sa carrière au sein de l'Eglise comme une "armure" contre les influences néfastes du monde extérieur.

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