Dans un monde fermant les yeux face au handicap, le pape encourage à «aimer malgré tout»
Face à un monde qui cherche à masquer, écarter, voire éliminer les personnes souffrant de maladie ou de handicap, le pape François a encouragé à «aimer malgré tout», car «le vrai défi est celui de qui aime le plus».
Lors d’une messe célébrée place Saint-Pierre le 12 juin 2016 pour le jubilé des malades et des personnes handicapées, le pape a assuré que la vie comportait aussi «l’acceptation de la souffrance et de la limite».
La tyrannie de la culture du plaisir et du divertissement
Après les lectures proclamées par des personnes porteuses de handicap, et la mise en scène de l’Evangile, le pape a fustigé dans son homélie «l’objection» du monde face à une existence marquée par de fortes limitations physiques. «On considère, a-t-il déploré, qu’une personne malade ou portant un handicap ne peut pas être heureuse, parce qu’elle est incapable de mener le style de vie imposé par la culture du plaisir et du divertissement».
«A cette époque où un certain soin du corps est devenu un mythe de masse (…), a ajouté le pontife, ce qui est imparfait doit être masqué, parce que cela porte atteinte au bonheur et à la sérénité des privilégiés et met en crise le modèle dominant». Ainsi les personnes handicapées sont maintenues séparées ou «dans les ›réserves’ du piétisme et de l’assistantialisme», afin qu’elles «n’entravent pas le rythme du faux bien-être».
Dans certains cas, a constaté l’évêque de Rome, on soutient même qu’il vaut mieux s’en débarrasser le plus tôt possible, parce qu’elles deviennent un poids économique insoutenable en un temps de crise.
Le vrai sens de la vie
«Quelle illusion vit l’homme d’aujourd’hui lorsqu’il ferme les yeux face à la maladie et au handicap !, s’est alors exclamé le pape. Il ne comprend pas le vrai sens de la vie, qui comporte aussi l’acceptation de la souffrance et de la limite».
«Le monde ne devient pas meilleur, parce que composé uniquement de personnes apparemment ›parfaites’», a estimé le pontife argentin, mais par la solidarité. Dans toutes les situations de maladie ou de handicap, il a encouragé à «aimer malgré tout». «C’est toujours une question d’amour, a-t-il insisté, il n’y a pas d’autre voie. Le vrai défi est celui de qui aime le plus».
Donner sens aux expériences de la vie
Outre la souffrance physique, le pape François a aussi évoqué «celle qui touche l’esprit», la pathologie fréquente de celui qui est «privé d’amour». Le chef de l’Eglise catholique a mis en garde ceux qui sont confrontés à la fragilité et aux maladies contre le repli sur soi, le cynisme et la confiance aveugle dans la science.
«La manière dont nous affrontons la souffrance et la limitation est un critère de notre liberté de donner sens aux expériences de la vie, a-t-il assuré, même lorsqu’elles nous semblent absurdes et imméritées».
Messe traduite en langage des signes
Toute la messe était traduite en langage des signes international. Lors de la prière mariale de l’Angélus, au terme de la célébration, le pape François a évoqué la Journée mondiale contre le travail des enfants, célébrée ce jour. Il a exhorté à poursuivre l’effort pour «éliminer les causes de cet esclavage, qui prive des millions d’enfants de certains droits fondamentaux et les expose à de graves dangers». «Aujourd’hui dans le monde il y a tant d’enfants esclaves !», a encore lancé le pape en sortant de son texte préparé.
La veille, le pape François avait demandé aux paroisses de favoriser l’accueil et l’accès aux sacrements des personnes handicapées, devant les participants à un congrès organisé par la Conférence épiscopale italienne, au Vatican. En répondant à des questions posées par des personnes porteuses de handicap, le pape a aussi assuré qu’un monde où tous seraient identiques, serait «ennuyeux».
Le pape fustige la discrimination des personnes en situation de handicap
Le pape argentin avait à cette occasion fustigé «la discrimination», notamment concernant l’accès aux sacrements dans les paroisses. Il avait plaidé pour une préparation adaptée à la «langue» des personnes porteuses de handicap: «Si tu es sourd, tu dois avoir la possibilité de te préparer avec le langage des sourds». «Celui dont les cinq sens fonctionnent n’est pas meilleur» que les autres, a ajouté le pape, «tous ont la même possibilité de recevoir les sacrements». Et le pape de fustiger les prêtres qui pensent que les personnes handicapées ne peuvent pas comprendre le mystère de Dieu: «C’est toi qui ne comprends pas !». Dans l’Eglise, a-t-il insisté, on accueille «tout le monde ou bien personne!».
Au terme de la rencontre, le pape François s’était offert un bain de foule durant une demi-heure, embrassant des dizaines de personnes handicapées présentes, se penchant avec affection sur les fauteuils roulants, tandis que certains se jetaient dans ses bras. Dans son discours préparé à l’avance, qu’il n’a pas lu mais qui a été remis aux participants au congrès, le pape a souhaité un chemin d’inclusion des personnes handicapées dans «la plénitude de la vie sacramentelle», y compris les personnes souffrant de graves dysfonctionnements psychiques. Il a aussi demandé de favoriser leur participation active dans les assemblées liturgiques. (cath.ch-apic/imedia/ak/be)