Mgr Vitus Huonder droit dans ses bottes

A la veille de l’annonce de son maintien au poste d’évêque de Coire, Mgr Vitus Huonder a donné une longue interview à la Luzerner Zeitung. Le prélat ne se dit pas surpris de la décision de Rome. Il annonce vouloir mener à terme les chantiers en cours, notamment sur Amoris Laetitia. Face à ses adversaires qu’il réduit à 10 ou 20 personnes, il se réjouit de la confiance renouvelée du pape.

Conformément au Droit canon, Mgr Vitus Huonder, ayant atteint l’âge de 75 ans avait présenté le 21 avril dernier sa démission au pape. Pour la plupart des observateurs cette démission ouvrait la perspective d’une solution ‘naturelle’ à la crise du diocèse de Suisse centrale et orientale. Rome ne l’a visiblement pas compris ainsi.

«La prolongation de mon mandat épiscopal était une des options dont le pape François devait décider», explique Mgr Vitus Huonder. La nouvelle de Rome ne l’a donc pas surpris. Ce d’autant moins que son prédécesseur, Mgr Amédée Grab, était déjà resté sur le siège de Coire jusqu’à l’âge de 77 ans.

A la question de savoir s’il aura l’énergie d’assumer cette prolongation, l’évêque de Coire reconnaît que la fonction est exigeante et que l’on vit des hauts et des bas. Mais il affirme avoir acquis de l’expérience.»L’estime que le Saint-Père m’a montrée avec ce mandat me touche. Je suis ainsi volontiers prêt à continuer mon service.»

Une affaire réglée personnellement avec le pape François ?

Mgr Huonder a refusé de dire si la question de la prolongation de son mandat avait déjà été discutée, voire convenue avec le pape François, lors de leur rencontre à Rome en décembre dernier. «Notre dialogue était confidentiel. Je ne peux pas en trahir les détails. Nous avons parlé de manière générale de la situation de l’Eglise universelle et bien sûr de la situation en Suisse et dans le diocèse de Coire. J’ai rencontré un pape François très amical et prévenant. Le courant a rapidement passé entre nous.»

Pour Mgr Huonder, le pape François accorde beaucoup de valeur à la loyauté de ses collaborateurs. Mais, en retour, il est un homme qui se montre loyal envers ses évêques.

Chantiers encore ouverts

Parmi les chantiers encore ouverts, Mgr Huonder cite la mise en œuvre des conclusions du synode sur la famille et en particulier l’interprétation de l’exhortation apostolique Amoris laetitia du pape François. Il entend publier des priorités pastorales avant l’été.

A la question de savoir si la situation actuelle peut pousser à une reprise de la discussion sur une éventuelle séparation du diocèse de Coire en deux ou trois nouveaux diocèses, Mgr Huonder reste très circonspect. «La question n’est pas définitivement réglée. Je ne peux malheureusement pas en dire plus. Il y a toujours des facteurs imprévisibles. Il est possible que le résultat ne soit connu que sous mon successeur.»

10 ou 20 opposants qui crient fort

Face à ses opposants et aux protestations probables après la décision romaine, Mgr Huonder espère simplement qu’elle sera reçue avec respect.

Pour Mgr Huonder, les évêques du diocèse de Coire ont toujours cherché à oeuvrer en conformité avec l’enseignement et la discipline de l’Eglise. Ce qui a provoqué des résistances dans divers milieux ecclésiaux. «La vie ecclésiale, y compris dans le diocèse de Coire, est malheureusement infectée par des dérives dans l’enseignement et la discipline et par des abus dans la liturgie. Les infections sont la plupart du temps accompagnées de fièvre. Mais la fièvre aide l’organisme à retrouver la santé. Dans ce sens la fièvre que tous veulent mesurer dans le diocèse de Coire est un bon signe.»

Mgr Huonder ne se voit en aucun cas comme un germe de division. «Dans l’opinion publique au cours des dernières années, ce sont toujours les 10 ou 20 mêmes personnes qui se sont élevées contre moi. Dans le diocèse de Coire vivent 700’000 croyants. Il ne faut pas oublier que beaucoup de fidèles ont un autre avis que celui de certains groupes qui interviennent bruyamment dans les médias. Beaucoup de fidèles viennent vers l’évêque avec reconnaissance pour lui dire que ses positions les renforcent dans leur foi.»

Parler ‘avec’ et non ‘sur’

Tout en s’affirmant toujours prêt au dialogue. Mgr Huonder y met certaines règles: «On ne doit pas toujours parler ‘sur’ mais aussi ‘avec’ l’évêque. Dans un dialogue il faut respecter l’opinion de l’autre. On ne peut pas toujours ramener toutes les positions à un seul dénominateur, c’est clair. Mais on peut et on doit pouvoir exposer un point de vue sans être discriminé.»

Selon l’expérience de Mgr Huonder, il existe des critiques qui ne se soucient absolument pas de calmer la situation. «Cela revient toujours sur des changements de la foi ou de la discipline de l’Eglise, comme la question de l’ordination ou du célibat. Ce ne sont pas des objectifs que je soutiens. Je trouve qu’un évêque ne doit pas changer l’enseignement de l’Eglise, mais au contraire le transmettre fidèlement. Celui qui veut changer l’enseignement doit d’adresser à Rome, pas à moi.»

A la question de savoir s’il n’est pas gêné d’être l’évêque le plus contesté de Suisse, Mgr Huonder reste sûr de lui. ” Je ne fais rien d’autre que ce que j’ai promis lors de mon ordination épiscopale. Je reste fidèle à l’enseignement de l’Eglise. Ce qui fait ma joie. Tout ce que je représente est le patrimoine de la foi de l’Eglise universelle. Si cela sonne comme une provocation pour une partie de la société, je ne peux rien y changer. Du temps de Jésus, la foi était déjà une provocation.» (cath.ch/lz/mp)

Mgr Vitus Huonder, évêque de Coire
4 mai 2017 | 13:03
par Maurice Page
Temps de lecture : env. 4  min.
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