Mgr de Raemy: premières impressions de Lugano
Le nouvel administrateur apostolique du diocèse de Lugano, Mgr Alain de Raemy, s’est déjà installé au Tessin. Il livre ses premières impressions, perspectives, ainsi que quelques aspects de sa personnalité.
Cristina Vonzun, catt.ch/traduction et adaptation: Raphaël Zbinden
Mgr Alain de Raemy, évêque auxiliaire de Lausanne, Genève et Fribourg (LGF), a été nommé administrateur apostolique du diocèse de Lugano après la démission de son évêque, Mgr Valerio Lazzeri, acceptée par le pape le 10 octobre 2022. Le dynamique prélat romand a déjà posé ses valises à la curie de Lugano, où un bureau lui a été mis à disposition pour recevoir ses premières visites.
Avez-vous déjà des rendez-vous prévus?
Mgr de Raemy: J’ai repris l’agenda de l’évêque Valerio et je suis disponible pour d’autres réunions et rendez-vous. Ceux qui le souhaitent peuvent se manifester. Je visiterai les paroisses et les vicariats.
Dimanche (le 16 octobre, ndlr.), je vais à Gordola pour célébrer la confirmation et ensuite à la réunion du Mouvement du Renouveau dans l’Esprit, à Castione. J’aimerais ajouter que je ne me dérobe jamais lorsqu’on m’invite pour un repas après une fête ou une réunion. Un dîner est toujours une belle occasion de partage.
Connaissez-vous bien le Tessin?
Je l’ai peu visité. La première fois, c’était quand j’étais lycéen à Engelberg (OW). J’y étais allé avec la fanfare du lycée, à la Piazza Riforma de Lugano, en 1977. Je suis revenu il y a quelques années pour célébrer le mariage d’un couple d’amis, à Locarno, puis je suis venu deux fois au Tessin avec la Conférence des évêques suisses (CES). Une fois, j’ai aussi traversé le Centovalli et vu le sanctuaire de la Madonna di Re. Et il faut dire que, pour pratiquer ma géographie, chaque fois que je prenais l’avion pour Rome, j’essayais toujours de reconnaître Lugano et les lacs d’en haut.
«Je vois chez les jeunes d’aujourd’hui, qui souvent n’ont pas reçu la foi en famille, une grande curiosité»
Vous avez déjà rencontré quelques personnes, ici. Quelles ont été vos impressions?
Il y a encore de la surprise chez les gens, même un certain choc face à ce qui s’est passé. Mais j’ai constaté qu’en partant d’une situation de surprise et d’inquiétude – du moins avec ceux que j’ai rencontrés à la curie et au Centre pastoral Saint-Joseph – on sympathise déjà. La connaissance personnelle aide.
Dans votre premier message au diocèse de Lugano, vous avez exprimé votre désir de rencontrer les prêtres. En attendant que cela se produise, qu’aimeriez-vous leur dire?
De se concentrer sur la personne et le message du Christ tels qu’ils nous sont donnés par l’Église, et le faire ensemble.
Dans le diocèse de Lausanne, Genève, Fribourg (LGF), vous êtes notamment chargé d’accompagner les prêtres. En quoi cela consiste-t-il exactement?
C’est un ministère d’accompagnement fraternel et vocationnel des prêtres. En pratique, il s’agit de stimuler et d’accompagner la vocation des prêtres comme un frère parmi eux, donc sans être leur chef, leur directeur spirituel ou leur confesseur. C’est une démarche fraternelle destinée à soutenir leur vocation. Nous avons créé cette fonction il y a un an, après avoir réalisé qu’avec les crises des abus, de l’autorité et la synodalité, qui ont certainement changé la vie quotidienne des prêtres, il était nécessaire que les évêques soient plus proches d’eux.
L’aspect de fraternité est donc important…
Oui, parce qu’aujourd’hui il y a une tendance à séparer l’évêque des prêtres. Mais les prêtres sont une émanation du ministère de l’évêque, donc nous devons prendre soin de cette relation, non pas pour accentuer l’autorité des prêtres et diminuer le rôle des laïcs, mais pour souligner que les prêtres sont liés à la vie de l’évêque et vice versa. La responsabilité de l’évêque est donc partagée par les prêtres, l’évêque ne doit pas être coupé de celle des prêtres.
Au sein de la CES, vous avez diverses tâches, dont celle d’évêque des jeunes. Quel regard avez-vous sur la foi des nouvelles générations?
Je vois chez les jeunes d’aujourd’hui, qui souvent n’ont pas reçu la foi en famille, une grande curiosité. Ils sont réceptifs, ils n’ont pas de préjugés. Bien sûr, ils sont scandalisés par les abus, mais ils ont aussi une grande quête de sens.
«J’admire vraiment un journaliste qui fait l’effort de comprendre l’autre et un monde différent du sien»
Vous êtes également responsable des médias pour la CES. Quelle est votre opinion sur les journalistes?
Le journaliste a une tâche qui n’est pas facile, qui est de comprendre l’autre, de comprendre des choses que peut-être il ne vit pas, parce que peut-être il n’est pas de ce monde. Dans l’Église, nous avons parfois un langage et même des attitudes qui peuvent surprendre ceux qui ne les connaissent pas. J’admire vraiment un journaliste qui fait l’effort de comprendre l’autre et un monde différent du sien.
Quelles sont vos lectures préférées?
J’aime beaucoup les romans biographiques historiques. L’un des derniers que j’ai lus est La vie de Sainte Bakhita (1869- 1947). Cette femme du Soudan fut esclave avant, une fois libre, de devenir religieuse. Le roman est écrit à partir de sources historiques. La vie de Sainte Bakhita racontée de cette manière est impressionnante. Elle est un exemple d’humilité et de grande volonté. C’était une femme qui a vécu et surmonté des conditions terribles.
Qu’aimez-vous faire pendant votre temps libre?
J’aime beaucoup voyager, même loin de la Suisse. Il y a également la natation, un sport que je pratique surtout en vacances. Je cherche toujours un endroit où je peux aller dans l’eau, déjà le matin, mais aussi à midi et le soir. Si c’est le cas, ce sont les «vacances idéales». (cath.ch/catt/cv/rz)
Alain de Raemy est né le 10 avril 1959 à Barcelone, d’un père fribourgeois et d’une mère valaisanne. Après avoir terminé sa scolarité obligatoire en Espagne, il est venu en Suisse pour poursuivre ses études au collège bénédictin d’Engelberg (OW), où il a obtenu un diplôme en latin et en anglais en 1978.
Après une année d’études en architecture et en droit à l’Université de Zurich, il décide de changer d’orientation et entame des études de philosophie et de théologie à l’Université de Fribourg. Là, sa vocation au sacerdoce se précise et il entre au séminaire diocésain de Lausanne, Genève et Fribourg.
En 1986, il obtient une licence en ecclésiologie à l’Université de Fribourg et est ordonné prêtre à Fribourg le 25 octobre de la même année. Il a d’abord été vicaire à la paroisse Saint-Pierre d’Yverdon de 1986 à 1988, puis curé in solidum à Lausanne dans les paroisses Saint-Amédée, Saint-André et Saint-Esprit, de 1988 à 1993.
Un évêque polyglotte
Entre-temps, il poursuit ses études de théologie à Rome, à la Grégorienne et à l’Angelicum. Auxiliaire à Morges en 1995, il revient à Fribourg en 1996 comme curé de la paroisse du Christ Roi (1996-2004), curé et chanoine de la cathédrale Saint-Nicolas ainsi que modérateur de l’Unité pastorale Notre-Dame de Fribourg (2004-2006).
Le 1er septembre 2006, il a été nommé aumônier de la Garde suisse pontificale au Vatican. Alain de Raemy parle couramment le français, l’espagnol, l’allemand, le suisse allemand, l’italien et l’anglais.
Le 30 novembre 2013, il a été nommé évêque auxiliaire du diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg. Il a été ordonné le 11 janvier 2014 en la cathédrale Saint-Nicolas de Fribourg. Le 10 octobre 2022, il a été nommé administrateur apostolique du diocèse de Lugano. CV