Mgr de Raemy: «Le pape François sait ce qu'il veut !»
Fribourg, 7 mars 2015 (Apic) Mgr Alain de Raemy, «l’évêque des médias», était l’invité des journalistes catholiques suisses, le 7 mars à Fribourg, lors de leur assemblée annuelle. L’évêque auxiliaire de Lausanne, Genève et Fribourg a présenté sa vision du pape François et a fait part des difficultés de l’Eglise catholique dans ses rapports avec la presse.
«J’ai beaucoup à apprendre dans le domaine des médias», a confié Mgr de Raemy à la vingtaine de journalistes présents dans les locaux de la Conférence des évêques suisses. Invité à s’exprimer sur sa vision du pape François, il leur a fait part de ses impressions, mais a aussi livré son analyse de la politique de communication du chef de l’Eglise, qu’il a côtoyé en tant qu’aumônier de la Garde suisse pontificale. Les décisions du pape sont basées sur quatre sources, selon Mgr de Raemy: ce qui a été discuté au conclave des cardinaux avant son élection, les contingences de l’actualité (par exemple sa décision de réformer les finances au Vatican), sa personnalité, et «encore une fois les cardinaux en conclave», a souligné le conférencier.
Une des marques de fabrique du pape argentin est sa volonté de libérer la parole lors des discussions, puis de prendre des décisions dans un esprit de collégialité. «Mais c’est lui, et lui seul, qui les applique», insiste l’évêque des médias, pour qui «il ne fait aucun doute que c’est la volonté de Dieu que ce pape ait été élu».
Interprétations des propos du pape
Suite à la visite Ad limina des évêques suisses, Mgr de Raemy a constaté une fois de plus que les propos de ce pape peuvent parfois être interprétés de façons différentes. Dans son discours aux évêques, il a notamment souligné que les finances étaient au service de la mission de l’Eglise. «Certains ont compris ces propos comme un soutien au système dual – ecclésial et ecclésiastique – que nous connaissons en Suisse», souligne l’évêque auxiliaire de Lausanne, Genève et Fribourg.
Autre malentendu apparu dans certains médias et sur plusieurs blogs: il a été affirmé que le pape se montrait très dur avec les prêtres. «En fait, il les interpelle sur leurs priorités, sur leurs attitudes. Il donne des conseils sur les homélies, … Bref, il les soutient dans leur mission», estime Alain de Raemy.
Pour le pape, les conditions d’un bon débat résident dans trois conditions: une écoute de Dieu jusqu’à entendre avec Lui le cri des peuples et une écoute du peuple jusqu’à respirer la volonté à laquelle Dieu nous pousse; une confrontation sans peur de perdre la paix et avec la certitude que le Seigneur va nous relier; une attitude centrée sur le Christ.
Partageant ses premières expériences de contact avec la presse en tant qu’évêque, Mgr de Raemy a souligné les difficultés de faire passer le point de vue de l’Eglise lorsqu’il ne correspond pas à ce que les médias ont envie d’entendre. Dans le partage de points de vue qui s’en est suivi, plusieurs journalistes ont invité les évêques suisses à ne pas se contenter de messages flous, peu parlants ou trop concis, qui incitent les médias à chercher eux-mêmes les informations ailleurs. «Le journaliste cherche l’opacité afin de pouvoir interpréter les faits à sa façon», a lancé une participante.
Mise en route des centres médiatiques catholiques
Dans son rapport annuel, en début d’assemblée, le président Maurice Page est revenu sur la mise en route des centres des médias catholiques à Zurich et à Lausanne, qui a démarré en janvier 2015. «Le Katholisches Medienzentrum et Cath-Info sont le fruit d’un long et parfois pénible processus de concertation et de concentration. L’aspect le plus visible est bien sûr les nouveaux sites internet kath.ch / cath.ch et catt.ch. Outre l’aspect visuel, ces sites ont pour ambition d’offrir un contenu plus riche et plus diversifié en comptant notamment sur la collaboration des attachés de presse des Eglises cantonale et des diocèses. Les premiers résultats sont encourageants», a-t-il affirmé.
Commentant l’attentat de Charlie Hebdo «qui nous a profondément choqués». Maurice Page invite à dépasser le choc de l’émotion «légitime» du «Je suis Charlie». «Le respect du pluralisme, qui s’impose dans une société démocratique, et que nous devons défendre comme journaliste, ne peut pas, à mes yeux, s’affranchir de cette règle exprimée par Saint Paul: Tout est permis, mais tout ne convient pas. Tout est permis, mais tout n’édifie pas». Reprenant une réflexion de la conseillère nationale vaudoise Ada Marra, il est d’avis que Charlie Hebdo, «en s’en prenant aux islamistes radicaux, mais de fait, en tapant sans discernement sur le prophète Mahomet, s’en est pris directement à l’ensemble des musulmans». «En fin de compte «Charlie» tape sur les minoritaires, sur les défavorisés, à qui il ne reste que la religion musulmane pour affirmer et défendre leur identité», a-t-il affirmé.
Maurice Page a également rappelé les événements qui ont marqué l’association durant l’année écoulée. En mars, les journalistes catholiques de Suisse romande ont ainsi visité l’Institut Philanthropos, près de Fribourg, qui fêtait ses 10 ans d’existence. En avril, une rencontre s’est déroulée au Palais fédéral à Berne, avec le président du Conseil national 2014, Ruedi Lustenberger. En février 2015, les journalistes catholiques suisses ont visité le Bureau international Catholique de l’Enfance (BICE) à Genève, où ils ont été reçus par sa secrétaire générale Alessandra Aula. Créé en 1948, le BICE forme un réseau international composé de plus de 50 organisations du monde entier engagées pour la défense de la dignité et des droits de l’enfant.
Que faire des parts sociales à l’Apic?
Commentant les comptes 2014, l’administrateur de l’association suisse des journalistes catholiques, Melchior Etlin, a pu présenter un bénéfice d’un peu plus de 2’000 frs, pour un total de dépenses de 7’800 frs. Une discussion s’est ouverte sur la part sociale de 3’000 frs à la Coopérative Kipa-Apic, qui va très probablement se dissoudre prochainement. Faut-il tenter de récupérer cette part? Il appartiendra au comité de trancher cette question.
Lors de l’assemblée 2014, mandat a été donné au comité de se pencher sur le nom «Association suisse des journalistes catholiques». L’identité catholique doit-elle s’appliquer à l’association ou aux journalistes? Raphaël Pasquier propose d’adopter la dénomination «Association catholique suisse des journalistes», qui permet en même temps de respecter l’identité catholique et de s’ouvrir à l’œcuménisme au niveau de ses membres.
Encadré:
Mgr Alain de Raemy
Le Fribourgeois Alain de Raemy est né le 10 avril 1959 à Barcelone où il suit sa scolarité obligatoire. Après l’obtention d’une maturité littéraire à la Stiftsschule des Bénédictins d’Engelberg (OW), il entre au Séminaire diocésain de Lausanne, Genève et Fribourg. Ordonné prêtre le 25 octobre 1986 à Fribourg, Alain de Raemy a été vicaire à la paroisse Saint-Pierre à Yverdon de 1986 à 1988, puis curé in solidum à Lausanne de 1988 à 1993 (paroisses Saint-Amédée, Saint-André et Saint-Esprit), il poursuit des études en théologie à Rome, à la Grégorienne et à l’Angelicum. Auxiliaire à Morges en 1995, il revient à Fribourg en 1996 où il est successivement curé de la paroisse du Christ-Roi (1996-2004), curé et chanoine de la Cathédrale Saint-Nicolas ainsi que curé modérateur de l’Unité pastorale Notre-Dame de Fribourg (2004-2006). Le 1er septembre 2006, il devient chapelain de la Garde Suisse pontificale au Vatican. Alain de Raemy maîtrise le français, l’espagnol, l’allemand, le suisse-allemand, l’italien et parle aussi l’anglais.
Nommé évêque auxiliaire de Lausanne, Genève et Fribourg (LGF) le 30 novembre 2013, il a été ordonné évêque le 11 janvier 2014 à Fribourg. Au sein de la Conférence des évêques il a en autre la charge de la communication et des médias.
(apic/bb)