Le pape François et Cyrille veulent «éviter une troisième guerre mondiale»
Trois jours après la rencontre historique, à Cuba, entre le pape François et le patriarche de Moscou Cyrille, le métropolite Hilarion de Volokolamsk, ‘numéro deux’ de l’Eglise orthodoxe russe, revient sur la signature de leur déclaration commune, le 15 février 2016. Dans un entretien au portail Pravoslavie i mir (orthodoxie et monde), le métropolite explique que les deux chefs religieux souhaitent éviter une escalade du conflit en Syrie vers une «troisième guerre mondiale». Il souligne aussi une avancée de la part de Rome, dans l’appel à exclure «toute forme de prosélytisme» en Ukraine.
L’un des principaux thèmes de la déclaration commune signée par le patriarche Cyrille et le pape François concerne la situation des chrétiens d’Orient. Tous deux appellent notamment la communauté internationale à agir pour éviter leur «éviction», ainsi qu’à «mettre fin à la violence et au terrorisme» en Syrie et en Irak. Ils appellent en outre toutes les parties impliquées dans le conflit à s’asseoir à la table des négociations et à «agir de façon responsable et prudente». Il s’agit d’un appel aux politiques «à se ressaisir et à garder la tête froide», explique le métropolite Hilarion, pour empêcher une escalade du conflit vers une troisième guerre mondiale.
Eviter l’affrontement de puissances nucléaires
Le président du département des relations ecclésiastiques externes du Patriarcat s’alarme ainsi de la création de «coalitions qui risquent d’entrer en conflit direct les unes avec les autres (…) C’est le début d’actions militaires d’envergure non plus contre les terroristes, mais l’un contre l’autre, un pas vers une troisième guerre mondiale», s’inquiète-t-il. Devant le «développement plus que dangereux de la situation qui peut conduire à un affrontement d’Etats possédant l’arme nucléaire, ajoute le bras droit du patriarche de Moscou, il est indispensable d’appeler toutes les parties (…) à ne pas dépasser la limite fatale».
La position du patriarche Kirill sur la Syrie n’est cependant pas tout à fait neutre: très proche de Vladimir Poutine, il évoquait encore en janvier dernier une guerre «juste» en Syrie, menée en «légitime défense». Or, si l’aviation russe affirme viser des cibles terroristes, les occidentaux et les militants l’accusent de concentrer ses bombardements sur des rebelles «modérés», et de faire un grand nombre de victimes civiles. La Russie a aussi pour tradition de protéger en priorité les chrétiens d’Orient orthodoxes, les chrétiens d’Orient latins étant plus traditionnellement sous la protection de la France.
De la rivalité au partenariat
Dans cet entretien traduit par égliserusse.eu, le métropolite Hilarion revient aussi sur la question de l’uniatisme en Ukraine, point de discorde historique entre le Vatican et Moscou. La déclaration commune reprend mot pour mot celle de Balamand (Liban), en 1993, explique le plus proche collaborateur du patriarche Cyrille: l’uniatisme «n’est pas un moyen pour recouvrer l’unité». Néanmoins, pour le métropolite, la déclaration commune de 2016 va plus loin, car elle «exclut toute forme de prosélytisme». En affirmant «nous ne sommes pas concurrents, mais frères», le pape et le patriarche changent «la perception réciproque des croyants des deux traditions», se réjouit-il. D’une relation de rivalité, explique -t-il, nous devons passer à «une relation de partenariat». (cath.ch-apic/imedia/ak/rz)