Martigny: Un lieu de prière musulman créé la polémique
Martigny, 7.10.2015 (cath.ch-apic) L’utilisation, par un groupe de musulmans, de locaux associatifs en lieu de prière, met en émoi la ville de Martigny. Sujette aux insultes sur des pages facebook de l’UDC, l’association «De la lumière à l’excellence» (DLAE) qui gère ce lieu va déposer, le 9 octobre 2015, plusieurs plaintes pénales.
«Nous ne pouvons pas laisser passer de tels propos, beaucoup de gens ont été blessés», affirme à Cath.ch, indigné, le secrétaire de DLAE, un valaisan converti depuis quatre ans à l’islam et secrétaire de l’association. Il fait allusion aux insultes postées sur les pages Facebook de l’UDC Martigny et de Jérôme Desmeules, président de l’UDC Valais. L’affaire a commencé lorsque Jérôme Desmeules a relayé sur sa page Facebook un message posté sur les réseaux sociaux par un musulman se réjouissant de pouvoir prier «dans une nouvelle mosquée à Martigny». Le message, posté dans la nuit du 25 au 26 septembre 2015, dans lequel le président de l’UDC Valais se demandait si une autorisation avait été déposée, a suscité une centaine de commentaires proposant, entre autre, de «livrer des têtes de cochons» aux nouveaux occupants du bâtiment, de «dynamiter les lieux» ou suggérant encore qu’»une fuite de lisier est si vite arrivée». Le responsable de la communication confirme que l’association va déposer une dizaine de plaintes pénales vendredi 9 octobre, sans plus de précisions.
L’association DLAE, fondée en mars 2014, gère depuis avril 2015 un espace de rencontre à Martigny. «Il s’agissait de disposer d’un lieu pour pouvoir nous rencontrer et échanger. Jusque-là, nous nous retrouvions entre Lausanne, Montreux, Martigny et Sion». Suite aux demandes de musulmans, l’association met à leur disposition, au sein de son local, un espace de prière. «Il s’agissait de dépanner les gens et non d’établir une mosquée», explique le secrétaire de l’association. Au fil du temps, ils sont de plus en plus nombreux à venir prier le vendredi, et à écouter le prêche de Abdullah Mala, le président de l’association.
Abdullah Mala, originaire du Kosovo et né en Valais, n’est pas un imam et ne souhaite pas le devenir. Il suit une formation par correspondance à l’Institut européen des sciences humaines (IESH), un établissement situé à Château-Chinon (France), qui forme à la théologie musulmane en Français et en arabe. Il suit un cursus de théologie musulmane en vue d’obtenir un bachelor «par conviction religieuse et pour être utile aux autres et à la société». Il confirme le dépôt des plaintes ce jeudi. «Nous ne pouvons pas nous laisser insulter gratuitement. La loi est la même pour tous. Je trouve tout cela vraiment triste», déplore-t-il.
Stratégie administrative sur fond de campagne électorale
«Les citoyens de Martigny accepteront-ils qu’un ancien restaurant devienne une terre d’islam sans qu’ils puissent avoir un mot à dire?», demande Alexandre Moret dans un message publié le 6 octobre, sur la page facebook de l’UDC Martigny. Il annonce que la section octodurienne du parti a écrit au Conseil communal de Martigny pour protester contre l’ouverture d’une mosquée au centre de la ville. Il exige une demande de changement d’affectation des locaux de DLAE en bonne et due forme, de la soumettre à l’enquête publique et que les locaux répondent aux normes en vigueur pour l’accueil du public. Jusque-là, Alexandre Moret a demandé aux autorités d’interdire l’utilisation des locaux comme lieu de culte.
«Sur le fond, les exigences de l’UDC quant à l’affectation du lieu, dédié depuis peu et en partie à la prière, méritent une réflexion», admet le secrétaire de DLAE. Mais, poursuit-il, «nous savons bien que ce parti cherche à nuire. Mr Moret parle d’une ‘islamisation rampante’ et ce soucis administratif n’est en réalité qu’une stratégie politique à quelques jours des élections». Le secrétaire de l’association DLAE annonce avoir demandé à rencontrer les autorités communales pour «aller de l’avant et mettre les choses en ordre». Quant à savoir si la prière du vendredi est maintenue, «nous allons en discuter à l’interne. Mais jusqu’à preuve du contraire, l’UDC ne décide pas à la place du Conseil municipal. Nous aviserons lorsque nous aurons reçu une notification officielle des autorités communales», répond-il.
Il maintient la proposition, formulée le 28 septembre 2015 sur la page facebook de l’association, de retirer la plainte contre toute personne qui s’excuserait publiquement et en aviserait l’association. Nous ne voulons pas accabler les gens, nous voulons que chacun cohabite tranquillement et puisse exercer sa liberté de culte», conclut-il. (apic/ag/bh)