Malgré le Covid, les demandes d’exorcismes n’explosent pas en Suisse
Les demandes d’exorcisme ont explosé dans certains pays, depuis le début de la pandémie. Un phénomène qui semble épargner la Suisse.
Le 5 décembre, à Vicence, au nord-est de l’Italie, une jeune femme entrée dans une église pour se confesser a commencé à proférer des injures et des paroles blasphématoires, rapporte le quotidien La Repubblica. Elle a été exorcisée dans le sanctuaire de la Madone de Monte Berico par plusieurs prêtres présents sur place.
Un épisode relaté largement par la presse pour son côté spectaculaire, mais qui n’est pas vraiment rare en Italie. Près d’un demi-million de séances d’exorcisme seraient en effet pratiquées chaque année dans le pays.
Un phénomène dont l’augmentation mondiale a déjà été confirmée il y a quelques années, notamment lors de la 13e conférence annuelle des exorcistes, qui s’est déroulée au Vatican du 16 au 21 avril 2018. Mais la tendance paraît s’être encore accélérée depuis le début de la pandémie de Covid-19.
Un phénomène culturel?
Rien qu’en Italie, les exorcistes sont complètement débordés, souligne le quotidien Aargauer Zeitung du 9 décembre 2021. L’université pontificale Regina Apostolorum de Rome propose depuis quelques années des cours pour les futurs exorcistes. En octobre dernier, le cours a eu un nombre record d’inscriptions, avec 137 personnes.
Même s’il n’existe pas de statistiques globales, cette augmentation des rituels destinés à chasser les démons semble davantage toucher les pays méridionaux, note le journal argovien. Dans ces derniers pays, la culture traditionnelle orienterait plus facilement les personnes vers ce genre de démarches.
Période anxiogène
En Suisse, l’intensification des demandes n’est pas remarquable, selon le Blick. Le journal alémanique a interrogé le prêtre schwytzois Rudolf Nussbaumer qui indique une légère augmentation des exorcismes en Suisse. Une tendance qui existe cependant depuis déjà quelques années. Hansruedi Huber, porte-parole du diocèse de Bâle, estime que la demande des «services de délivrance» a même diminué ces deux dernières années.
Rudolf Nussbaumer oriente les personnes «possédées» vers des psychiatres croyants, car «de nombreux problèmes semblent se mélanger». Même si le diable ne frappe pas forcément davantage en période de Covid, le prêtre suggère que l’atmosphère anxiogène a pu affaiblir le psychisme de certaines personnes déjà fragiles et accroître leurs pensées obsessionnelles.
Démon ou pas
Les prêtres exorcistes sont en général conscients que le démon n’est pas à l’œuvre dans une bonne partie des demandes reçues. Le Père Jean-Pascal Duloisy, exorciste du diocèse de Paris, expliquait en 2018 à cath.ch que, dans ce domaine, «il faut faire la part des choses. Certains exorcistes ne font rien sans l’aide d’un psychologue et d’autres mettent le démon partout». Les exorcistes ont des critères établis de possession démoniaque, tels que la révélation de faits inconnaissables pour la victime, l’expression en langues étrangères ou anciennes, et une force physique exceptionnelle.
La foi ne s’achète pas
Possession ou pas, le prêtre parisien met en avant, dans son ministère, la responsabilité individuelle. «Avant de piller la maison, le diable doit ligoter le propriétaire. Ainsi, une personne ferme dans la foi n’a pas à craindre de tomber sous l’emprise des forces des ténèbres».
Même son de cloche chez Hansruedi Huber qui critique l’attitude de certains croyants vis-à-vis de l’exorcisme. «Certains pensent qu’il existe une formule magique et qu’ensuite ils seront débarrassés du problème. Mais la foi n’est pas un produit de consommation que l’on peut acheter à la Migros ou télécharger». Pour le porte-parole du diocèse de Bâle, il est important que les personnes concernées fassent également un travail sur elles-mêmes. (cath.ch/ag/rz)