Annagret Schär, du service national «Abus dans le contexte ecclésial» | © zVg / pfarrblatt
Suisse

Lutte contre les abus dans l’Église: le regard constructif d'Annegret Schär

La Bernoise Annegret Schär (55 ans), qui connaît aussi bien l’univers des délinquants que celui des victimes, rejoindra dès janvier 2025 l’équipe du service «Abus dans le contexte ecclésial» de l’Église catholique en Suisse. Fille d’un pasteur réformé, travailleuse sociale, elle salue la capacité de cette Église à poser des actes en ce domaine et à ne pas se contenter de vœux pieux. Entretien.

Sylvia Stam, pfarrblatt Berne, traduction et adaptation Lucienne Bittar

Quelles sont, selon-vous, les qualifications particulières que vous apporterez au service «Abus dans le contexte ecclésial»?
Annegret Schär: J’ai moi-même travaillé dans le domaine de la prévention et j’ai eu affaire dans ce cadre tant à des auteurs qu’à des victimes. J’ai aussi une expérience dans l’accompagnement de délinquants condamnés, que ce soit au niveau de l’exécution des peines, comme la surveillance électronique, ou de l’assistance de probation, avec un cadre thérapeutique et de resocialisation.

Dans votre dernier poste, vous avez été assistante sociale scolaire à Zollikofen.
Oui, et j’ai été très impressionnée de constater à quel point ce n’est pas seulement la personne directement concernée qui souffre, mais tout le système familial et son environnement plus large.

A partir de janvier, vous travaillerez à 50% pour le service «Abus dans le contexte ecclésial». Pourquoi avoir posé votre candidature à ce poste?
J’ai l’impression que dans l’Église catholique, on ne se contente pas de parler, mais qu’on agit aussi. Or je mesure les principes aux actes. Que se passe-t-il réellement sur le terrain et quel est l’impact des actes posés? Si l’on compare, sur le plan de la lutte contre les abus, les mesures prises par Église catholique avec celles du secteur social et de la santé, par exemple, on voit qu’elle est très bien placée. J’ai l’impression que l’Église apprend de ses erreurs, que c’est une institution qui a développé une culture de l’erreur.

Par exemple?
Les mesures mises en place après la publication de l’étude sur les abus et la manière dont elles sont remplies montrent une collaboration avec les services cantonaux d’aide aux victimes. En ce qui concerne la gestion des dossiers personnels, le groupe de travail national sur les abus dans le contexte ecclésial se fait conseiller par des spécialistes externes pour plus de professionnalisation. 

À la mi-décembre, les médias ont rendu public le fait qu’un prêtre avait été engagé en février 2023 dans le diocèse de Coire, bien qu’il ait été licencié l’année précédente dans le diocèse de Bâle pour coups et blessures. A Coire, on ne savait rien de la procédure pénale en cours…
Je ne peux pas prendre position sur ce cas concret, mais manifestement, les mesures ne sont pas encore efficaces. Il ne suffit pas d’établir des lignes directrices par le haut. Le message et la volonté de le mettre en œuvre doivent aussi impliquer le bas de l’échelle. Les gens doivent changer d’attitude. Et la direction doit sensibiliser ses collaborateurs et les former au fait que certains processus se déroulent peut-être différemment qu’auparavant. Même si ça nécessite parfois une certaine pression. Enfin, la mise en œuvre doit également être contrôlée. Tout cela est un travail de longue haleine.

Quels sont pour vous les plus grands chantiers de prévention des abus au sein de l’Église?
Que l’on mette vraiment en œuvre sur le terrain les mesures adoptées. Il faut développer pour cela une culture d’apprentissage commune. Un autre défi réside dans le fait que le système est autoréférentiel: le système de l’Église s’évalue et s’améliore lui-même. Le contrôle de la qualité de cette gestion pourrait aussi venir de l’extérieur. (cath.ch/pfarrblatt/lb)

Annegret Schär, bio express
Titulaire d’un bachelor en enseignement primaire et d’un diplôme d’une haute école spécialisée en travail social, Annegret Schär s’est spécialisée par la suite en tant que formatrice de terrain, en conseil en interaction systémique, en direction de programmes d’apprentissage cognitivo-comportemental pour adultes et pour adolescents, et en prévention de la récidive. Elle est membre actif d’un cercle traumatologique en ligne. De par sa pratique, elle connaît donc aussi bien l’univers des délinquants que celui des victimes.
Elle travaillera avec Stefan Loppacher sur les mesures que l’Église catholique s’est fixées. Après la mise en place de structures de conseil indépendantes, qui débuteront en janvier 2025, l’accent sera mis dans les prochaines années sur les lignes d’écoute de l’Église et les évaluations psychologiques. lb

Annagret Schär, du service national «Abus dans le contexte ecclésial» | © zVg / pfarrblatt
26 décembre 2024 | 09:22
par Rédaction
Temps de lecture : env. 3  min.
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