L’optimiste Notker Wolf, ancien abbé-primat de l’ordre bénédictin
Le bénédictin allemand Notker Wolf a fêté ses 80 ans le 21 juin 2020. Ancien abbé-primat de l’ordre fondé par saint Benoît, il partage son optimisme pour la vie. Portrait d’un religieux original.
Barbara Just, kath.ch, traduction et adaptation Bernard Litzler, cath.ch
«Avoir la vie devant soi n’est pas un pur plaisir. Avoir la vie derrière soi dans une large mesure n’est en aucun cas une pure horreur», dit l’ancien abbé-primat Notker Wolf. Octogénaire depuis le 21 juin, il impressionne par sa sagesse.
«Ça roule» (Läuft) est le titre d’un des nombreux livres que le religieux a publiés au fil des années. En 2016, il quitté sa fonction d’abbé-primat de l’ordre des bénédictins du monde, après 16 ans de service. «Pourquoi avez-vous l’air si heureux?», lui demande-t-on. Comme il aime mettre les choses en perspective, il prétend que ce n’est qu’avec humour qu’on peut supporter certaines contraintes quotidiennes. Sa recommandation face aux contrariétés: «Souriez à la vie. Et ne la prenez pas trop à la légère».
Gymnastique matinale
Une telle devise peut vous porter à travers une longue vie. Le 21 juin 2020, le religieux a eu 80 ans. Mais la discipline fait aussi partie de sa vie. Le Père Wolf a déclaré à l’agence de presse catholique allemande KNA qu’il faisait régulièrement de la gymnastique le matin. À cinq heures du matin, il s’étire pendant quelques minutes. Non pas parce qu’il en éprouve une «soif effrénée». Mais, dit-il, «ce petit bout de sport m’aide à passer la journée, je me sens mieux et je suis de meilleure humeur».
La musique le maintient également en forme. Il aime jouer de la flûte et parfois de la guitare électrique. Il n’a peur ni du contact avec la musique rock ni de dire ce qu’il pense.
Werner Wolf, fils d’un tailleur, est né en 1940 à Bad Grönenbach, dans l’Allgäu, au sud de l’Allemagne. Sa famille est catholique, mais pas trop pieuse. Le garçon est enfant de chœur, mais son expérience de l’éveil, il l’acquiert dans le grenier. Là, le lycéen découvre un livret missionnaire. En le lisant, il éveille son désir de liberté.
En tant que missionnaire, il voulait s’éloigner de sa mère, si protectrice, et réconcilier sa «relation intime avec Jésus-Christ». En même temps, sa santé d’enfant n’est pas bonne. Lorsqu’il tombe malade du rachitisme, le médecin informe sa mère qu’elle pouvait passer son fils par «pertes et profits».
Un monastère sans peur
Aidé par le prêtre de son village, le bon élève réussit néanmoins à se rendre au lycée des Bénédictins missionnaires de Ste-Odile. Après avoir terminé ses études secondaires en 1961, il entre dans l’ordre. Lorsqu’il choisit le prénom Notker, un confrère lui avoue : «Mon Dieu, déjà le cinquième Notker». En fait, ces quatre prédécesseurs avaient tous quitté l’abbaye.
Le jeune Wolf termine ses études de philosophie au Collège pontifical Saint-Anselme à Rome, puis s’inscrit en théologie et en sciences naturelles à Munich. Il est ordonné prêtre en 1968, et deux ans plus tard, il enseigne la philosophie naturelle à Saint-Anselme, puis obtient un doctorat.
En 1977, lorsqu’un nouvel archiabbé est recherché à Sainte-Odile, il est nommé à l’âge de 37 ans. Il est important pour lui de faire face à ce difficile exercice: il veut créer un monastère où ne règne pas la peur. La liberté et la dignité de l’individu doivent être respectées.
Wolf dit de lui-même qu’il prend des décisions quand elles lui viennent. C’est ainsi qu’il accepte, après 23 ans à Sainte-Odile, de déménager à Rome pour devenir le bénédictin au rang le plus élevé, l’abbé-primat, installé au monastère de Saint-Anselme.
Chiens et serpents sur la table
Chaque année, il parcourt quelques 300’000 kilomètres dans le monde pour visiter ses confrères. Même la Corée du Nord et la Chine font partie de ses périples. Dans les deux pays, il a réussi à construire des hôpitaux. Et on lui sert parfois des plats étranges. Promis, il ne commandera plus de chien, ni de serpent. «Ils peuvent être terriblement durs», confie-t-il.
Wolf parle couramment plusieurs langues, et il souhaite les améliorer encore après son retour dans son monastère d’origine. Mais il continue de donner des conférences et de participer à des débats. Pour lui, la voie synodale empruntée par l’Église catholique en Allemagne est la bonne. «A mon avis, un tel processus devrait se poursuivre en permanence», estime le religieux. (cath.ch/kath.ch/kna/bl)