Père Boutros Azar, responsable du Secrétariat général des écoles catholiques au Liban | © sgec-l.org
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Liban: les écoles catholiques menacées par la crise économique

Alors que le Liban traverse la plus grave crise économique et financière depuis 30 ans, aggravée par la pandémie du Covid-19, les écoles catholiques privées sont sur le point de fermer. «C’est une réelle menace sur le système éducatif au Liban», met en garde le patriarche maronite Béchara Raï.

L’avenir de milliers d’étudiants libanais est en jeu alors que les établissements d’enseignement privés évaluent leur capacité à poursuivre leurs activités au cours de la prochaine année académique, en raison de la sévère crise à laquelle le Liban est confronté.

Si la situation économique ne s’améliore pas, les écoles privées – pas seulement les établissements catholiques – seront obligées de fermer définitivement. «Une mesure qui touchera plus de 700’000 élèves, 59’000 enseignants et 15’000 administrateurs scolaires», a déclaré pour sa part le Père Boutros Azar, responsable du Secrétariat général des écoles catholiques au Liban et coordinateur de l’Association des établissements d’enseignement privés au Liban.

Sans aide financière, 80% des écoles catholiques vont disparaître

Plus de 1’600 écoles privées fonctionnent au Liban, y compris des écoles gratuites et celles qui sont affiliées aux diverses communautés, a déclaré le Père Azar à l’agence de presse saoudienne Arab News, basée à Jeddah.  

«80 % des écoles catholiques du Liban fermeront leurs portes l’année prochaine à moins qu’elles ne reçoivent une aide financière. Certaines familles ne sont pas en mesure de payer le reste de la cotisation pour l’année en cours parce que leur soutien de famille a été licencié ou ne travaille pas, tandis que d’autres ne veulent pas payer de cotisation parce que les écoles restent fermées en raison de la pandémie», relève le Père Boutros Azar.

«Les Libanais ont choisi les écoles privées pour leurs enfants parce qu’ils leur faisaient confiance pour leur qualité – 70 % des enfants libanais vont dans des écoles privées. Aujourd’hui, nous sommes confrontés à une crise majeure, et si l’éducation s’effondre au Liban, alors toute la région qui entoure le Liban s’effondrera. De nombreux étudiants arabes des pays du Golfe reçoivent en effet leur éducation dans les écoles libanaises les plus prestigieuses», a-t-il ajouté.

Une crise qui dure depuis plusieurs années

«Ce que nous constatons aujourd’hui, c’est que le contrat éducatif n’est plus respecté. On peut dire que ce qui a brisé le dos des propriétaires d’écoles est l’approbation par le Parlement libanais en 2018 d’une série de grades et de salaires qui ont mis en faillite le trésor public et ont placé toutes les institutions dans un déficit continu».

Le Parlement libanais a adopté la semaine dernière une proposition présentée par la cheffe du bloc parlementaire du Courant du Futur, Bahia Hariri, visant à allouer près de 200 millions de francs suisses au secteur de l’éducation pour l’aider à atténuer les effets du COVID-19.

17 communautés religieuses cohabitent tant bien que mal

Le Liban étant un lieu de brassage de cultures et de religions, où 17 communautés religieuses, toutes minoritaires, s’interpénètrent dans le cadre d’un régime sociopolitique pluricommunautaire,   l’école catholique constitue un choix stratégique de l’Eglise du Liban. Elle contribue à maintenir vivante sa présence. (cath.ch/be)

23 % de musulmans dans les écoles catholiques
L’enseignement catholique au Liban se caractérise par la diversité de ses établissements et par leur répartition sur tout le territoire libanais. Il existe 59 groupes scolaires fédérés au Secrétariat général des écoles catholiques qui scolarisent quelque 192’000 élèves, avec un corps enseignant et administratif qui regroupe 12’800 enseignants et 900 religieux et religieuses.
Actuellement, l’enseignement catholique scolarise 21,5 % de l’ensemble de la population scolaire libanaise. «Nous comptons 329 écoles et scolarisons des élèves de toutes les communautés religieuses du Liban, dont environ 23 % de musulmans», selon les chiffres communiqués à cath.ch le 4 juin 2020 par le Secrétariat général des écoles catholiques, basé à Ain Najem, au Mont Liban.
Tout au long du 19e et du 20e siècle, les écoles se sont multipliées au Liban, fondées par des missionnaires venus d’Europe, et d’autres instituées par les Ordres religieux libanais, qui assuraient, déjà depuis le 18e siècle, un enseignement, aux filles et aux garçons, dans l’enceinte de leurs couvents, dans la montagne libanaise. La question de la survie économique des écoles catholiques se pose désormais avec acuité, en sachant qu’au Liban, elles ne reçoivent aucune subvention de l’Etat libanais, et que de plus en plus de familles sont fortement appauvries. JB

Père Boutros Azar, responsable du Secrétariat général des écoles catholiques au Liban | © sgec-l.org
4 juin 2020 | 12:20
par Jacques Berset
Temps de lecture : env. 3  min.
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