Les violences tribales entre Papous vont en crescendo
Un nouveau massacre tribal a été commis à la mi-juillet 2024 en Papouasie-Nouvelle-Guinée, où se rendra le pape François en septembre. Le nord du pays connait régulièrement des épisodes de violences tribales, mais celles-ci se font de plus en plus meurtrières. Caritas suit avec préoccupation cette évolution.
Trois villages de la province d’East Sepik – et du diocèse de Wewak -, dans le nord du pays, ont été détruits suite à des attaques et des incendies menés du 16 au 18 juillet. Un premier bilan de la police fait état de 26 morts, avec des enfants torturés et des femmes violées. Les survivants (environ deux cents personnes) ont fui dans la forêt.
Des armes plus meurtrières
Ces dernières années, les affrontements tribaux entre Papous ont gagné en intensité, indique l’agence Fides, du fait de l’usage d’armes automatiques et d’armes à feu. «Dans le même temps, la population du pays a plus que doublé depuis 1980, provoquant des tensions accrues pour l’accès aux ressources et aux terres, ravivant les rivalités tribales.»
La directrice nationale de Caritas, Mavis Tito, est en dialogue constant avec le diocèse de Wewak pour suivre la situation, rapporte Fides. «Il ne s’agit pas d’un cas isolé. Mais d’un conflit entre quatre groupes différents qui s’aggrave de plus en plus», note-t-elle.
Des victimes abandonnées à elles-mêmes
Les tentatives du gouvernement national d’endiguer cette violence, par des opérations militaires notamment, ne portent pas beaucoup de fruits. La zone n’est pas facile d’accès, rendant les interventions policières difficiles, reconnait-elle. Mais dix jours après les attaques, aucune aide n’est encore parvenue sur place, dénonce Mavis Tito. «Les personnes qui se sont réfugiées dans la forêt n’ont rien. Même le centre de soins temporaire n’a pas été approvisionné.»
Volker Türk, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, s’est déclaré pour sa part «horrifié par la choquante explosion de violence meurtrière en Papouasie-Nouvelle-Guinée, apparemment due à un différend sur la propriété et les droits d’utilisation des terres et des lacs».
Il a exhorté les autorités à «mener des enquêtes rapides, impartiales et transparentes» et à soutenir les victimes. Il les a également invitées «à travailler au sein des communautés concernées, et avec ces dernières, pour s’attaquer aux causes profondes des litiges» et prévenir de nouvelles violences.
Une phase de transition culturelle chaotique
Comme l’avait expliqué à Fides en février dernier le Père Giorgio Licini, missionnaire italien du PIME et secrétaire de la Conférence épiscopale catholique de Papouasie-Nouvelle-Guinée et des Îles Salomon, «les affrontements entre les populations indigènes, dont certaines ont eu leurs premiers contacts avec le monde extérieur il y a seulement 70 ans, (…) dépendent avant tout du contrôle du territoire» traditionnel. Ces tensions sont entretenues par les membres des différents groupes qui ont migré vers les villes où ils se sont installés et peuvent donc envoyer des armes ou payer des mercenaires.
Les affrontements, souligne encore le Père Licini, ont lieu dans des zones reculées de l’intérieur, rurales ou forestières, caractérisées par un fort taux d’analphabétisme. La chasse aux sorcières y est toujours en vigueur. «Dans le passé, la situation de ces groupes était plus stable. Aujourd’hui, avec la mobilité et la mondialisation, tout est plus chaotique », explique-t-il encore. «Nous sommes dans une phase de transition entre l’ancienne culture et une nouvelle identité, qui n’est cependant pas encore solide et bien définie.» (cath.ch/fides/onu/lb)