Le dominicain britannique Timothy Radcliffe est l'un des 21 nouveaux cardinaux nommés par le pape | © Grégory Roth
Vatican

Les portraits des 21 nouveaux cardinaux

L’agence I.MEDIA dresse les portraits des 21 nouveaux cardinaux, dont les profils traduisent la volonté du pape François d’inscrire sa ligne réformiste dans le temps long.

Le pape François a annoncé, au terme de la prière de l’Angélus du 6 octobre 2024, la convocation d’un consistoire le 8 décembre 2024, en la fête de l’Immaculée Conception. Il donnera lieu à la création de 21 nouveaux cardinaux, parmi lesquels 20 électeurs de moins de 80 ans qui pourront être appelés à élire son successeur en cas de conclave.

Promotion de la «star» du Synode

Timothy Radcliffe, 78 ans, théologien dominicain

Le célèbre prédicateur britannique, qui s’est récemment remis d’un grave cancer de la mâchoire, a trouvé une nouvelle visibilité en tant qu’assistant spirituel lors des deux assemblées générales du Synode sur la synodalité, où ses méditations sont très appréciées et remarquées. Né à Londres en 1945 et entré dans l’ordre des dominicains en 1965, il a été ordonné prêtre en 1971. Il a notamment enseigné l’Écriture sainte à Oxford. Son action résolue au sein du mouvement pour la paix et dans l’assistance aux malades du SIDA lui a rapidement valu une renommée internationale.

Successivement prieur du couvent d’Oxford de 1982 à 1988, provincial d’Angleterre de 1988 et 1992 et maître général des dominicains de 1992 à 2001, le Père Timothy Radcliffe a été remarqué pour son dynamisme et ses nombreux ouvrages visant à rendre la foi chrétienne accessible au plus grand nombre. Sa popularité en France lui avait même valu d’être présenté comme un «papabile» par certains médias lors du conclave de 2005, bien qu’il n’ait pas été encore cardinal à l’époque.

Deux nouveaux cardinaux pour l’Afrique

Jean-Paul Vesco, 62 ans, archevêque d’Alger

Jean-Paul Vesco est né le 10 mars 1962 à Lyon. Après des études de droit et plusieurs années comme avocat d’affaires à Paris, il s’engage dans l’ordre des frères Prêcheurs en 1995. Ordonné prêtre en 2001, il passe par l’École biblique de Jérusalem puis s’installe à Tlemcen, en Algérie, afin d’y assurer une présence dominicaine. Alors que le pays a été déserté par son ordre depuis l’assassinat de Mgr Pierre Claverie, évêque d’Oran, en 1996.

En 2010, il est nommé provincial des dominicains de France et doit rejoindre Paris. Il n’occupera ce poste que deux ans car en 2012, Benoît XVI le nomme évêque d’Oran. En 2015, il est appelé par le pape François à Rome pour participer au Synode sur la famille et publie un livre remarqué intitulé Tout amour véritable est indissoluble. Plaidoyer pour les divorcés remariés. Trois ans après l’organisation à Oran de la messe de béatification des martyrs des années 1990 – parmi lesquels Mgr Claverie et les moines de Tibhirine – le pontife argentin le nomme archevêque d’Alger en 2021. Les deux hommes partagent un lien fort autour de la figure de Charles de Foucauld, l’apôtre de la fraternité universelle canonisé à Rome en mai 2022.

L’année suivante, le président algérien Abdelmadjid Tebboune accorde la nationalité algérienne au prélat désormais franco-algérien, signe d’une bonne intégration dans ce pays où la communauté catholique est très minoritaire. Le diocèse d’Alger comptait en 2020 quelque 4000 fidèles et 35 prêtres diocésains et religieux.

Ignace Bessi Dogbo, 63 ans, archevêque d’Abidjan

Très rapidement après sa nomination comme archevêque d’Abidjan le 20 mai dernier, Mgr Ignace Bessi Dogbo sera élevé à la dignité cardinalice le 8 décembre prochain. Le diocèse de Côte d’Ivoire comptera alors deux cardinaux électeurs en cas de conclave puisque le cardinal Jean-Pierre Kutwa, récemment retraité à l’âge de 78 ans, garde son droit de vote jusqu’à ses 80 ans.

Signe du lien entre Mgr Ignace Bessi Dogbo et le pape François, ce dernier l’a nommé personnellement membre du Synode sur la synodalité actuellement en cours à Rome, vaste chantier pour rendre l’Église plus inclusive et participative, et dans lequel la voix de l’Afrique se fait entendre.

Né le 17 août 1961 et ordonné prêtre en 1987, ce théologien bibliste a étudié quatre ans à Rome. En 2004, il est nommé évêque du diocèse de Katiola, au centre du pays. En 2017, il est choisi comme administrateur du diocèse de Korhogo et devient archevêque en 2021 de ce diocèse du nord du pays. Entre temps, il est élu président de la conférence épiscopale de Côte d’Ivoire (2017-2023). Nouvel évêque d’Abidjan depuis mai, Mgr Ignace Bessi Dogbo est à la tête d’un diocèse qui compte près de 4 millions d’habitants, dont environ deux-tiers de catholiques.

Le premier cardinal pour l’Iran

Mgr Dominique Mathieu, 61 ans, archevêque de Téhéran-Ispahan

Il est l’un des prélats les plus discrets de l’Église catholique. À 61 ans, ce franciscain belge est l’archevêque du diocèse de Téhéran-Ispahan des latins, en République islamique d’Iran, où les chrétiens font l’objet de discrimination, voire de persécutions. Les statistiques officielles de Rome ne font état pour ce pays que de 5 prêtres et de 12 religieuses professes (2020).

Né en Belgique en 1963, Mgr Mathieu a prononcé ses vœux simples chez les Frères mineurs conventuels en 1984 et a été ordonné prêtre cinq ans plus tard. Provincial des Frères mineurs en Belgique, il est envoyé en mission au Liban en 2013 et est incardiné dans la province des Frères mineurs conventuels pour l’Orient et la Terre Sainte. Nommé par le pape à Téhéran en 2021, il occupe un siège laissé vacant en 2014.

En Iran, les catholiques seraient environ 2000, soit une infime minorité dans cette République islamique de plus de 80 millions d’habitants, en majorité chiites. Membre du Synode sur la synodalité, Mgr Mathieu est actuellement à Rome en ce mois d’octobre où se déroule la session finale.

Sa nomination montre la volonté du pape de donner une voix aux Églises ultra-minoritaires et en proie à de grandes difficultés. Après le cardinal Sako, patriarche des Chaldéens (Bagdad), le cardinal Mario Zenari (nonce apostolique en Syrie) et le cardinal Pizzaballa, patriarche latin de Jérusalem, Dominique Mathieu est le quatrième cardinal électeur du Moyen-Orient nommé par François.

Cinq nouveaux cardinaux «bergogliens» pour l’Amérique latine

Mgr Carlos Castillo Mattasoglio, 74 ans, archevêque de Lima

Né à Lima le 28 février 1950, Carlos Castillo Mattasoglio a été ordonné prêtre pour le diocèse de la capitale péruvienne en 1984, après ses études à l’Université Grégorienne, à Rome. Outre l’enseignement de la théologie depuis 1987 à l’Université pontificale catholique du Pérou, il a occupé de nombreuses responsabilités dans la pastorale des jeunes, au niveau diocésain et national. Il fut aussi curé de plusieurs paroisses jusqu’à sa nomination comme archevêque de Lima en 2019 par le pape François.

Alors que les capitales sont souvent confiées à des évêques ayant déjà gouverné un autre diocèse, le choix de ce simple curé fut alors perçu comme une rupture avec la ligne conservatrice de son prédécesseur, le cardinal Juan Luis Cipriani Thorne, qui s’est effacé de la scène publique après lui avoir transmis les rênes du diocèse.

Les deux hommes s’étaient opposés dans une controverse portant sur le maintien du label «pontifical» pour l’Université catholique du Pérou, certains cours semblant alors trop hétérodoxes aux yeux du cardinal issu de l’Opus Dei. Inversement, Carlos Castillo Mattasoglio fut, durant sa formation en sciences sociales dans les années 1970, proche de Gustavo Gutierrez et de la théologie de la libération. Outre l’espagnol, il maîtrise l’italien et le français.

Mgr Vicente Bokalic Iglic, 74 ans, archevêque de Santiago del Estero (Argentine)

Né le 11 juin 1950 dans une famille d’origine slovène, Vicente Bokalic Iglic est entré en 1970 dans la congrégation des lazaristes, pour laquelle il a été ordonné prêtre en 1978. Il a alterné entre plusieurs services en paroisse et la charge de supérieur de séminaire au sein de sa congrégation, pour laquelle il a aussi exercé le service de supérieur provincial. En 2010, il est devenu évêque auxiliaire de Buenos Aires, ce qui l’a donc amené à collaborer durant trois ans avec le cardinal Jorge Mario Bergoglio, le futur pontife, qui l’a nommé évêque de Santiago del Estero en décembre 2013.

Le 22 juillet dernier, le pape François l’a promu à la dignité d’archevêque en refaisant de Santiago del Estero le diocèse du primat d’Argentine, à la place de Buenos Aires. Le pays natal du pape compte désormais quatre cardinaux électeurs.

Mgr Luis Gerardo Cabrera Herrera, 70 ans, archevêque de Guayaquil (Équateur)

Né en 1955, ce titulaire d’un doctorat en philosophie de l’université Antonienne de Rome a été ordonné prêtre en 1983 au sein de l’ordre des franciscains. Occupant différentes charges dans le domaine de la formation, et chargé des questions œcuméniques au sein de la conférence épiscopale équatorienne, il est devenu ministre provincial de son ordre en 2000, puis, en 2003, assistant du ministre général pour les provinces franciscaines de l’Amérique latine et des Caraïbes.

En 2009, Benoît XVI l’a nommé archevêque de Cuenca, puis François l’a transféré à Guayaquil en septembre 2015. Sa promotion cardinalice constitue un appui dans un contexte économique et sécuritaire très dégradé dans cette ville, depuis la pandémie de Covid-19 et la montée en puissance des gangs violents qui ont provoqué une hausse de 800% du nombre d’homicides entre 2018 et 2023.

Le choix de l’archevêque de Guayaquil, et non de celui de la capitale Quito, Mgr Alfredo José Espinoza Mateus, peut apparaître aussi comme une marque de distance à l’égard de ce dernier, qui a accueilli le Congrès eucharistique international le mois dernier, mais a été mis en cause dans des affaires financières. Le pape François, qui était venu en Équateur en 2015, n’a pas fait ce second voyage qui avait pourtant été initialement annoncé par les autorités locales.

Mgr Fernando Chomalí, 67 ans, archevêque de Santiago du Chili

Mgr Chomalí, né le 10 mars 1957, a été ingénieur de formation avant de devenir prêtre pour le diocèse de Santiago du Chili en 1991. Ce francophone d’ascendance palestinienne, formé notamment à l’Université Grégorienne et à l’Institut Jean-Paul II pour la famille, est un spécialiste de bioéthique. Il est notamment membre de l’Académie pontificale pour la Vie. Après différentes charges d’enseignement et de curé de paroisse, il est devenu évêque auxiliaire de Santiago du Chili en 2006 puis archevêque de Concepción en 2011, œuvrant à la reconstruction de ce diocèse affecté par un grave séisme l’année précédente.

En 2018, il a remis sa démission au pape François, comme l’ensemble des évêques chiliens, collectivement mis en cause pour leur gestion des affaires d’abus sexuels sur mineurs mises en relief lors de la visite du pape. Mais il est finalement resté en poste. Apparaissant comme un homme de confiance dans un pays où la hiérarchie épiscopale a été gravement fragilisée, il a été promu archevêque de Santiago du Chili le 25 octobre 2023. Il a la lourde tâche de reconstruire la crédibilité de l’Église dans un pays qui a vu une grande partie de sa population s’en détourner depuis la révélation de nombreux scandales d’abus, parfois liés à une collusion d’une partie de l’Église avec la dictature d’Augusto Pinochet.

Mgr Jaime Spengler, 64 ans, archevêque de Porto Alegre

Le Brésil, qui comptait déjà six cardinaux électeurs, se voit encore renforcé avec Mgr Jaime Spengler, originaire du diocèse de Santa Catarina, dans une région du sud du pays comptant de nombreuses familles d’ascendance allemande, comme la sienne et celle de l’archevêque de Manaus, le cardinal Leonardo Steiner.

Né le 6 septembre 1960, Jaime Spengler a prononcé sa profession perpétuelle pour les franciscains en 1985 et a été ordonné prêtre en 1990, après avoir notamment étudié à l’Institut théologique de Jérusalem. Il a aussi étudié la philosophie à l’Université Antonienne, à Rome.

Après différentes charges universitaires et en paroisse, notamment dans le diocèse de Curitiba, il a été nommé par Benoît XVI évêque auxiliaire de Porto Alegre en 2010. Le pape François l’a promu en septembre 2013 archevêque de cette ville de 1,3 million d’habitants, la dixième du pays en population.

Depuis 2023, Mgr Spengler préside à la fois la puissante Conférence des évêques du Brésil (CNBB) et le Conseil épiscopal latino-américain (Celam), ce qui en faisait un candidat logique au cardinalat.

Le renforcement du «pivot vers l’Asie»

Mgr Tarcisio Isao Kikuchi, 65 ans, archevêque de Tokyo

Né en 1958 à Iwate, dans le nord de l’île de Honshu, Tarcisio Isao Kikuchi a rejoint les Missionnaires du Verbe Divin en 1985 et a été ordonné prêtre en 1986. Il a ensuite été missionnaire au Ghana pendant six ans avant de rentrer dans son diocèse pour travailler au sein de son ordre. Entre 1999 et 2005, il a été provincial de son ordre. Entre 1999 et 2004, le Père Kikuchi a dirigé Caritas Japon. Pendant ces années, il a travaillé en faveur des réfugiés du camp de Bukavu en République démocratique du Congo.

En 2004, Jean Paul II l’a nommé évêque de Niigata. Entre 2011 et 2019, il a dirigé Caritas Asia, et il est président de Caritas Internationalis depuis 2023. Une charge dans laquelle il a succédé au cardinal philippin Luis Tagle. En 2017, le pape François l’a nommé archevêque de Tokyo. Mgr Kikuchi est engagé dans le dialogue avec la Corée du Nord et dans la pastorale envers les personnes LGBT. Il participe au Synode en cours. Le Japon, avec le cardinal Thomas Aquino Manyo Maeda, archevêque d’Osaka, va donc compter deux cardinaux.

Mgr Pablo Virgilio David, 65 ans, évêque de Kalookan (Philippines)

Né en 1959, Pablo Virgilio David est le dixième d’une fratrie de 13 enfants. Passé par le petit séminaire, il rejoint le grand séminaire à Manille puis étudie à Louvain en Belgique et au sein de l’École biblique et archéologique française de Jérusalem. Ordonné prêtre en 1983, il est nommé évêque auxiliaire de San Fernando en 2006 par Benoît XVI. Bibliste reconnu, il a participé en 2008, au Synode sur la Parole de Dieu.

En 2016, le pape François lui a confié le diocèse de Kalookan. Il s’est distingué par ses critiques contre la politique anti-drogue du président Rodrigo Duterte, ce qui lui vaut d’être mis en cause par une enquête en 2019. Depuis 2021, il est président de la Conférence épiscopale philippine. Il participe actuellement au Synode sur la synodalité.

Il deviendra le dixième cardinal philippin de l’histoire et le troisième cardinal électeur de l’actuel Collège cardinalice, en compagnie du cardinal Luis Antonio Tagle, pro-préfet du dicastère pour l’Évangélisation, et du cardinal Jose Advincula, archevêque de Manille.

Mgr Paskalis Bruno Syukur, 62 ans, évêque de Bogor (Indonésie)

Paskalis Bruno Syukur est né en 1962 sur l’île indonésienne de Florès – dont la population est majoritairement catholique. Il rejoint le noviciat des Frères mineurs sur l’île de Java, faisant ses vœux en 1989 et étant ordonné en 1991. Après trois ans en paroisse en Papouasie occidentale, il est envoyé à Rome pour étudier en 1993, puis prend la tête du noviciat de Java à son retour.

Entre 2001 et 2007, il a été provincial pour l’Indonésie, avant d’être envoyé à Rome comme supérieur de la zone Asie-Océanie au sein du chapitre général des franciscains. En 2013, le pape François l’a nommé évêque de Bogor. Il est actuellement secrétaire général de la conférence épiscopale d’Indonésie. A ce titre, il a accueilli le pape François dans son pays pendant quatre jours en septembre dernier.

Mgr Mykola Bychok, 44 ans, évêque de l’éparchie Saints Pierre et Paul de Melbourne des Ukrainiens (Australie)

Signe de proximité pour la diaspora ukrainienne, le cardinalat de ce très jeune Ukrainien est une surprise. Mykola Bychok est né en 1980 à Ternopil, dans l’ouest de l’Ukraine. Il a rejoint les Rédemptoristes en 1997, et a étudié en Ukraine et en Pologne, avant de prononcer ses vœux définitifs en 2003 puis d’être ordonné prêtre en 2005 pour l’archiéparchie de Lviv. Il est ensuite envoyé comme missionnaire en Sibérie, puis revient dans son pays pour devenir curé d’une paroisse à Ivano-Frankvisk.

De 2015 à 2020, il a été vicaire de la paroisse catholique ukrainienne de Newark, aux États-Unis. En 2020, le pape François l’a nommé évêque de l’éparchie catholique ukrainienne des Saints-Pierre-et-Paul de Melbourne, où il s’occupe de la communauté catholique ukrainienne locale. Âgé de 44 ans, il devient le benjamin du collège cardinalice.

Cette nomination d’un évêque ukrainien de la diaspora peut constituer une façon indirecte pour le pape d’apporter un signe de soutien à l’Ukraine, sans devoir affronter les fortes implications politiques qu’aurait pu représenter une promotion cardinalice de l’archevêque majeur Sviatoslav Shevchuk.

Des promotions atypiques au sein de la Curie romaine

Père George Jacob Koovakad (Inde), 51 ans, official de la secrétairerie d’État, responsable des voyages pontificaux

Né en 1973 à Chethipuzha dans la région du Kerala, en Inde, George Jacob Koovakad a été ordonné en 2004 pour le diocèse de Changanacherry. Diplômé de droit canonique, il intègre l’Académie pontificale ecclésiastique et commence à servir au sein du service diplomatique du Saint-Siège en 2006.

Passé par les nonciatures d’Algérie, de Corée, d’Iran, du Costa Rica, il rejoint la section des Affaires générales à Rome en 2020. Un an plus tard, il est nommé organisateur des voyages pontificaux par le pape. Depuis, il a organisé 14 voyages du pape François dans 20 pays différents. Il n’est pas évêque, et sa promotion cardinalice constitue l’une des plus grandes surprises de ce consistoire. Elle peut présager d’un changement de responsabilité à venir.

Père Fabio Baggio, 59 ans, sous-secrétaire du dicastère pour le Service du développement humain intégral

Promu cardinal alors qu’il n’est pour le moment que prêtre, Fabio Baggio se retrouve dans la même situation que son ancien homologue Michael Czerny, et pourrait succéder au jésuite canadien à la tête du dicastère en charge notamment des questions écologiques et humanitaires.

Né à Bassano del Grappa en 1965, cet Italien, qui est également musicien et auteur de nombreuses chansons, a commencé très jeune sa formation au sein de l’ordre des scalabriniens, dédié notamment à l’assistance aux migrants. Ordonné prêtre en 1992, il a travaillé au Chili, puis en Argentine. Il a collaboré avec le cardinal Bergoglio en tant que secrétaire national des Œuvres pontificales missionnaires à partir de 1999 et directeur national du département pour la migration au sein du diocèse de Buenos Aires à partir de 2002.

Le pape François a appelé son ancien collaborateur au Vatican en 2016. Il est alors devenu sous-secrétaire du dicastère pour le Service du développement humain intégral, en charge de la Section Migrants et réfugiés, un organe placé sous la conduite directe du pape François.

Mgr Rolandas Makrickas (Lituanie), 52 ans, archiprêtre coadjuteur de la Basilique papale Sainte-Marie-Majeure

Né en 1972 à Birzai en Lituanie, dernier d’une fratrie de cinq enfants, Rolandas Makrickas grandit sous le joug soviétique, sa famille ne pouvant pas pratiquer librement sa religion catholique. Envisageant un temps une carrière comme pilote d’avion, il rejoint finalement le séminaire de Kaunas peu après la chute du Mur de Berlin, puis est envoyé à Rome pour poursuivre ses études.

Ordonné prêtre pour le diocèse de Panevezys en 1996, il devient sous-secrétaire de la conférence épiscopale de son pays entre 1996 et 2001 et dirige le comité chargé du Jubilé de l’an 2000. En 2003, il rejoint l’Académie pontificale ecclésiastique et entre au service de la diplomatie vaticane en 2006. Il est envoyé en Bolivie, en Géorgie, en Suède, aux États-Unis, au Gabon et au Congo. Il rejoint la section pour les Affaires générales à Rome en 2019 où il devient le premier «chef de l’administration» non-italien de l’histoire, et s’occupe de la restructuration économique et financière de l’organe central de la Curie romaine.

En 2021, le pape François le nomme commissaire extraordinaire de la basilique Sainte-Marie-Majeure, où il doit là encore reprendre en main les comptes et les structures administratives. Le pontife l’élève au rang d’archevêque en 2023 puis le crée archiprêtre coadjuteur de la basilique Sainte-Marie-Majeure en 2024 après la publication des nouveaux statuts du chapitre. Il deviendra le quatrième cardinal lituanien de l’histoire. Il devrait bientôt succéder au cardinal polonais Stanislaw Rylko comme archiprêtre de Sainte-Marie-Majeure, une basilique chère au pape François qui a indiqué sa volonté de s’y faire enterrer.

Le premier cardinal serbe

Mgr László Német, 68 ans, archevêque de Belgrade

Né dans la région de la Voïvodine serbe, à la frontière avec la Croatie, László Német a intégré la Société du Verbe Divin, pour laquelle il a été ordonné en 1982. En 1985, il est envoyé à Rome pour faire ses études, avant de devenir missionnaire aux Philippines en 1987, où il travaille comme universitaire.

En 1994, il est envoyé en Autriche pour enseigner la théologie à l’Université de Mödling. Il prend la tête de la province hongroise de son ordre entre 2004 et 2007 et est élu secrétaire général de la conférence épiscopale hongroise en 2006. En 2008, le pape Benoît XVI lui confie le diocèse de Zrenjanin en Serbie, où il est ordonné évêque par le cardinal Peter Erdö.

Depuis 2016, il est président de la conférence épiscopale internationale Saints Cyrille et Méthode, qui regroupe les diocèses de la plupart des pays des Balkans de tradition orthodoxe. Depuis 2021, il est aussi vice-président du conseil des conférences des évêques d’Europe. En 2022, le pape François l’a nommé archevêque de Belgrade. Il va devenir le premier cardinal serbe de l’histoire.

Un seul nouveau cardinal pour l’Amérique du Nord

Mgr Frank Leo, 53 ans, archevêque de Toronto

Né en 1971 à Montréal dans une famille d’immigrés italiens, Francis Leo, dit «Frank», a été ordonné pour l’archidiocèse de la capitale québécoise en 1996 avant de rejoindre l’Académie pontificale ecclésiastique en 2006. En 2008, il intègre le service diplomatique du Vatican et est envoyé à la nonciature en Australie puis à la mission d’études de Hong Kong (chargé des relations avec la Chine).

En 2012, il retourne au Canada pour prendre la direction du séminaire de Montréal. De 2015 à 2021, il a été secrétaire de la Conférence épiscopale canadienne. Choisi pour être vicaire général de Montréal en 2022, il en est nommé évêque auxiliaire la même année par le pape François. Moins d’un an plus tard, en 2023, le pontife lui confie l’archidiocèse de Toronto, où il prend la place du cardinal Thomas Christopher Collins.

Italie: Rome et Turin de retour parmi les cardinaux électeurs

Mgr Baldassare Reina, 54 ans, vicaire général pour le diocèse de Rome

En annonçant la liste des nouveaux cardinaux, le pape François a également officialisé le nom du nouveau vicaire général pour le diocèse de Rome, un poste stratégique mais vacant depuis la rétrogradation du cardinal Angelo de Donatis comme pénitencier majeur, le 6 avril dernier. Il s’agit, sans surprise, de Mgr Baldassare Reina, évêque auxiliaire de Rome et vice-régent, qui assurait l’intérim depuis quatre mois.

Né en 1970 en Sicile, Baldassare Reina a été ordonné prêtre pour le diocèse d’Agrigente en 1995. Après différentes charges dans la formation et en paroisse, il est devenu supérieur du séminaire d’Agrigente de 2013 à 2022. Il est nommé évêque auxiliaire de Rome en 2022, puis vice-régent le 6 janvier 2023, jour de la publication de la Constitution apostolique In Ecclesiarum Communione renforçant l’autorité directe du pape sur son diocèse.

Ce cardinalat intervient quelques jours après la publication du motu proprio du pape François La vera bellezza (La vraie beauté), dans lequel il annonce une refonte de la répartition géographique du diocèse, avec la suppression du secteur «Centre», dont les 35 paroisses seront dispersées dans les quatre secteurs restants, tournés vers les périphéries: Nord, Sud, Est, Ouest. Dans un contexte de relations tendues entre le pape et son clergé romain, le cardinal Reina aura donc la lourde tâche d’œuvrer à cette transformation, qui va coïncider avec l’accueil de millions de pèlerins pour l’Année Sainte 2025.

Mgr Roberto Repole, 57 ans, archevêque de Turin

Avec Mgr Roberto Repole, la capitale du Piémont va retrouver son statut traditionnel de ville «cardinalice» qu’elle avait perdu depuis la retraite du cardinal Severino Poletto, le 11 octobre 2010. Son successeur, Mgr Cesare Nosiglia, qui avait reçu le pape François lors d’une chaleureuse visite pastorale sur les traces de ses ancêtres, les 21 et 22 juin 2015, n’avait pas été promu.

Roberto Repole, né le 29 juin 1967 à Turin et ordonné prêtre en 1992, est un théologien connu en Italie, incarnant une aile progressiste. En 2018, il avait été le coordinateur d’un recueil de réflexions théologiques élaboré à l’occasion du cinquième anniversaire du pontificat du pape François, que Benoît XVI avait refusé de préfacer en raison de la présence d’auteurs qui avaient attaqué son pontificat et celui de Jean Paul II.

Roberto Repole, titulaire d’un doctorat sur la pensée de Henri de Lubac en dialogue avec Gabriel Marcel, a notamment été président de l’Association théologique italienne de 2011 à 2019. Il a fait partie des rares théologiens élevés par le pape à l’épiscopat, en devenant à la fois archevêque de Turin et évêque de Suse le 7 mai 2022.

L’un des derniers témoins du pontificat de Pie XII

Mgr Angelo Acerbi, 99 ans, nonce apostolique émérite aux Pays-Bas

D’une façon inhabituelle, le pape a commencé la liste des nouveaux cardinaux en débutant par le doyen d’âge, presque centenaire, qui sera le seul cardinal non électeur au sein de cette nouvelle promotion.

Mgr Angelo Acerbi, ordonné prêtre en 1948 pour le diocèse de Pontremoli, est entré au service diplomatique du Saint-Siège en 1956. Sa longue carrière, débutée sous Pie XII, l’a d’abord conduit à travailler au sein des représentations pontificales en Colombie, au Brésil, au Japon, en France et au Portugal, avant que Paul VI ne l’ordonne évêque en 1974.

Il est alors devenu pro-nonce en Nouvelle-Zélande et délégué apostolique pour le Pacifique, avant que Jean Paul II ne le nomme nonce apostolique en Colombie. Ceci lui vaudra d’être retenu en otage durant sept semaines par les guérilleros du M-19, mouvement dont faisait partie l’actuel président Gustavo Petro.

Mgr Acerbi est ensuite devenu nonce en Hongrie, en Moldavie puis aux Pays-Bas, étant également prélat de l’Ordre de Malte, de 2001 à 2015. Sa promotion peut être comprise comme une façon de le remercier pour sa loyauté vis-à-vis de la difficile réforme entreprise par le pape François au sein de cette organisation bénéficiant d’un statut d’État souverain, mais dont les liens avec le Saint-Siège ont été redéfinis récemment. (cath.ch/imedia/cv/rz)

Le dominicain britannique Timothy Radcliffe est l'un des 21 nouveaux cardinaux nommés par le pape | © Grégory Roth
7 octobre 2024 | 11:11
par I.MEDIA
Temps de lecture : env. 17  min.
Partagez!