Les plus pauvres veulent se faire entendre à la Conférence nationale contre la pauvreté 2016
Le 22 novembre 2016 se déroulera à Bienne la Conférence nationale contre la pauvreté. Afin de s’y préparer, le Mouvement ATD Quart Monde a organisé une journée d’étude, le 29 octobre 2016, dans son centre national à Treyvaux, dans le canton de Fribourg.
ATD Quart Monde entend ainsi apporter sur la table le point de vue des personnes touchées elles-mêmes par la pauvreté. Interrogée par cath.ch, Marie-Rose Blunschi Ackermann, membre de l’équipe d’animation d’ATD Quart Monde suisse, relève que depuis des années, son mouvement lutte pour que les personnes en situation de pauvreté aient le droit à la parole et puissent faire valoir leurs demandes. Lors de la Conférence nationale contre la pauvreté 2016 à Bienne, ces personnes animeront certains ateliers. «Même si c’est encore très modeste, c’est tout de même une avancée».
Le Mouvement ATD Quart Monde lutte pour que les plus pauvres aient leur place comme partenaires dans les lieux de concertation, de façon régulière, et dans la durée. Pierre Zanger, coordinateur national d’ATD Quart Monde, salue lui aussi le fait que l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) a la volonté d’entendre ce qu’ont à dire les personnes vivant en en grande précarité.
Programme national contre la pauvreté
Depuis 2014, le Programme national contre la pauvreté est mis en œuvre conjointement par la Confédération, les cantons, les villes et les communes ainsi que les partenaires sociaux et des organisations de la société civile. La Confédération a débloqué un crédit de 9 millions de francs pour l’ensemble du programme, qui porte jusqu’en 2018. Elle a apporté un financement à la rencontre de Treyvaux.
Le Programme a pour objectif de fournir des connaissances en matière de prévention et de lutte contre la pauvreté, de donner des impulsions au développement de stratégies et de mesures, de mettre en réseau les acteurs et d’encourager la collaboration entre eux. A mi-parcours, la Conférence nationale contre la pauvreté veut offrir un aperçu des travaux en cours et ouvrir le débat.
Prévention et lutte contre la pauvreté
La Conférence s’adresse aux spécialistes et aux responsables des divers domaines de la prévention de la pauvreté. Une table ronde réunissant des représentants des milieux politiques dressera un bilan intermédiaire sur la base des discussions entre spécialistes et débattra des thèmes d’actualité.
La journée d’étude organisée par le Mouvement ATD Quart Monde a réuni à Treyvaux une cinquantaine de personnes – membres d’associations dans lesquelles des personnes vivant la pauvreté prennent la parole (Association des Familles du Quart Monde de l’Ouest lausannois, Travail de rue soutenu par les Eglises à Bienne et ATD Quart Monde Suisse), et des personnalités du monde politique, administratif et universitaire.
Elles ont abordé principalement la question de la participation des personnes en situation de pauvreté dans notre société. Michael Löw, de l’OFAS, responsable de la Conférence nationale, a présenté le programme du 22 novembre. Reto Brand, de l’Office fédéral de la justice (OFJ), a rappelé que parmi les personnes vivant aujourd’hui dans la pauvreté, se trouvent de nombreuses victimes de mesures de coercitions à but d’assistance et placements extra-familiaux.
Victimes de mesures de coercition à des fins d’assistance
Il a présenté la Table ronde, qui réunit des représentants des victimes et des membres des autorités, institutions et organisations concernées, et a pour mission de faire la lumière sur les souffrances et les injustices subies par les victimes de mesures de coercition à des fins d’assistance (MCFA) ou de placements hors de leur famille.
Comptent au nombre de ces victimes les enfants placés d’office dans des familles ou en foyer, les personnes internées par décision administrative (dans des établissements fermés, parfois pénitentiaires), les personnes dont les droits reproductifs ont été entravés (stérilisations et avortements forcés), les enfants adoptés de force, les gens du voyage…
«Mettre en œuvre le droit à la participation pour tous»
Reto Brand a estimé que le travail de Table ronde était un exemple de la participation des personnes concernées. Un point fort de la journée de Treyvaux a été le travail sur le manifeste «Mettre en œuvre le droit à la participation pour tous». Il sera présenté à la Conférence nationale lors de l’intervention en plénière.
En 2012, l’Organisation des Nations Unies a adopté les Principes directeurs sur l’extrême pauvreté et les droits de l’homme. Ils affirment, entre autres, que «Les Etats doivent assurer la participation active, libre, éclairée et constructive des personnes vivant dans la pauvreté à toutes les étapes de la conception, de la mise en œuvre, du suivi et de l’évaluation des décisions et des politiques qui les concernent».
«Ce principe est loin d’être appliqué en Suisse», affirme le Mouvement ATD Quart Monde. «Beaucoup d’obstacles nous empêchent encore de participer à la vie politique, à la vie sociale: les préjugés, la discrimination. Souvent nous avons le sentiment de ne pas satisfaire les exigences, de ne pas savoir utiliser correctement le langage. Finalement, nous n’osons presque rien dire…», a-t-on entendu lors de cette journée. (cath.ch-apic/com/be)