Les jésuites de Grèce, une petite communauté au service des migrants
Une toute petite communauté de neuf membres, très engagée au service des migrants et détentrice de la plus grande bibliothèque catholique de Grèce. Ce sont les jésuites d’Athènes que rencontrera le pape François lors de son voyage en Grèce, le 4 décembre 2021.
Aide aux réfugiés, relations avec les orthodoxes, visite de Jean Paul II en 2001… Le Père Pierre Salembier, Français et supérieur de la communauté depuis 2015 aborde les différents aspects de l’activité de ces jésuites de Grèce.
Le pape a réservé à votre communauté un moment durant son voyage. Qu’attendez-vous de cette rencontre?
Quand le pape François va dans des lieux où il y a des jésuites, il les rencontre de manière privée. Cela se fera à la nonciature. On n’y a pas encore beaucoup réfléchi, on est très heureux d’avoir cette occasion de rencontrer le pape. Mais par définition le but n’est pas une démarche ciblée. C’est une rencontre fraternelle, un frère qui rencontre ses frères. Nous sommes un petit groupe très modeste, nous sommes heureux d’avoir ce contact fraternel. Personnellement je serai content de lui dire que j’ai participé à une réunion avec lui à Rome en 1987.
Comment se compose la communauté des jésuites de Grèce?
Nous comptons neuf membres: six Grecs, un Belge – qui a été trois ans en mission à Lesbos et Samos -, un Polonais – qui s’occupe de la communauté polonaise – et un Français – moi-même. Cette communauté appartient à la province de France car les jésuites en Grèce ne sont pas assez nombreux pour former une province en tant que telle.
Quelles sont vos missions dans le pays?
Pendant la grande vague de plus d’un million de réfugiés qui sont arrivés sur les côtes, nous avons ouvert un foyer d’accueil. Depuis deux ans, il est devenu un accueil de jour pour les mamans avec leurs enfants, qui peuvent venir y laver leur linge, consulter un médecin, etc.
Depuis dix ans, nous avons une institution d’aide scolaire, le Centre Pedro Arrupe, pour 150 enfants du quartier issus de familles immigrées. Nous avons aussi la bibliothèque catholique la plus importante en Grèce, et des archives puisque nous sommes liés à la Grèce depuis quatre siècles. Enfin nous avons un vestiaire de vêtements, avec beaucoup de dons et de demandes. Bien sûr, étant une petite communauté, ces services ont été institutionnalisés avec des équipes de salariés et de bénévoles.
Quelles sont vos relations avec les orthodoxes?
C’est un thème qui me tient très à cœur, et l’un de mes premiers soucis en arrivant était de découvrir ce qu’était l’orthodoxie, que je ne connaissais pas du tout. Un ami de la communauté, fils de pope, écrivain, m’a initié à la liturgie orthodoxe. J’ai aussi fait une retraite dans un monastère orthodoxe, qui m’a montré que le climat général est à la prévention, mais que si on arrive à se connaître, si on aborde les gens de manière fraternelle, ces méfiances peuvent être levées.
Ce fut le cas pour vous…
L’accueil qui m’a été réservé dans ce monastère a été extrêmement froid. J’étais mis à l’écart, pour les offices je devais rester à l’extérieur de l’église et regarder par une fenêtre. Lors des moments de convivialité, j’étais interrogé sur des choses convenues comme les Croisades, Vatican II, le pape… Au bout de quelques jours, j’ai expliqué au supérieur que j’étais catholique, mais que j’étais persuadé que les autres confessions chrétiennes pouvaient m’apporter beaucoup. Il est resté un moment en silence et il m’a dit : «nous sommes tous en recherche». A partir de ce moment là, l’abbaye m’était ouverte, j’ai pu accéder partout, j’étais le bienvenu dans l’église et je suis reparti couvert de cadeaux !
Les choses ont-elles changé depuis la visite de Jean Paul II en 2001?
À l’époque, j’étais vice-provincial et j’ai vu des extraits de journaux annonçant sa venue qui étaient tout sauf sympathiques. Tous les clichés anti-romains s’affichaient dans les médias. Aujourd’hui, on n’est pas du tout dans cette ambiance-là. Le maire a mis à disposition du Saint-Père la plus belle salle d’Athènes pour la messe, le Palais de la musique. On sent un souci d’accueillir au mieux. Il y a aussi l’effet pape François. Quand j’ai commencé mes cours de grec il y a six ans, mon professeur m’a dit «Nous les Grecs nous n’aimons pas beaucoup le pape, mais on aime bien le pape François». Ils aiment son ouverture, le christianisme de la joie. (cath.ch/imedia/ak/bh)
> Retrouvez notre dossier complet sur le voyage du pape à Chypre et en Grèce, du 2 au 6 décembre.