Les évêques chiliens s'engagent à soutenir le président Gabriel Boric
Les évêques du Chili ont rapidement félicité Gabriel Boric, le nouveau président du pays, élu le 19 décembre 2021. Ils l’ont assuré du soutien et des prières de l’Eglise dans sa tâche difficile.
Gabriel Boric, le candidat de la gauche a été élu, le 19 décembre 2021, nouveau président du Chili, battant son adversaire populiste de droite Jose Antonio Kast par plus de 10 % des voix.
Kast, qui se présentait comme un catholique fervent père de neuf enfants, a un passé de défenseur de la dictature militaire du Chili. S’appuyant sur un discours clivant avec une rhétorique anti-migrants et mettant en avant les valeurs familiales traditionnelles, il avait terminé devant Boric de deux points au premier tour de scrutin. Le deuxième tour ne lui a cependant pas été favorable.
Un vote de confiance
Les évêques du Chili ont rapidement félicité le vainqueur, qui prendra la présidence en mars 2022. »Le pays a exprimé un vote de confiance en vous et vous a confié une grande mission, destinée à diriger le destin de notre pays en tant que première autorité et premier serviteur», indique le message signé par le cardinal Celestino Aos Braco, président de la conférence épiscopale.
«La mission est toujours plus grande que nos possibilités et nos capacités, mais nous avons confiance que – avec la collaboration des citoyens, le travail des différents acteurs sociaux et politiques, et la force spirituelle qui vient de la foi et des convictions humaines les plus profondes – vous serez en mesure d’affronter sa tâche avec générosité, engagement et prudence», ont déclaré les évêques.
«Comptez sur notre soutien et notre prière, ainsi que sur la contribution de notre action pastorale, que nous développerons toujours dans le respect de l’ordre démocratique de notre pays et de ses autorités légitimement élues.»
Le plus jeune président du Chili moderne
Gabriel Boric, 35 ans, deviendra le plus jeune président du Chili moderne. Elu au Congrès en 2014, à la suite de manifestations estudiantines nationales en faveur d’une meilleure éducation, il a promis «d’enterrer» le modèle économique néolibéral laissé par la dictature du général Augusto Pinochet (1973-1990) et d’augmenter les impôts des «super riches» pour développer les services sociaux, lutter contre les inégalités et renforcer la protection de l’environnement.
Le nouveau président devra effectivement compter sur le soutien de l’Eglise s’il veut mener à bien les grands projets pour son pays. L’élaboration d’une nouvelle Constitution pour remplacer le texte actuel qui date de la dictature sera un premier défi. La décision de la réécrire avec une assemblée constituante a été prise après un référendum en octobre 2020.
Bien que le Chili ait été considéré au cours des dernières décennies comme l’un des pays les plus stables d’Amérique latine, les manifestations qui ont débuté en 2019 ont mis en évidence les profondes inégalités. Le soulèvement civil a souvent tourné à la violence, conduisant le président sortant Sebastian Pinera à considérer que le pays était «en guerre» pour justifier le déploiement de l’armée.
Au milieu d’une foule de milliers de partisans dans le centre-ville de Santiago, Gabriel Boric a commencé son discours de victoire dans la langue indigène mapuche.
«Nous sommes une génération qui a émergé dans la vie publique en exigeant que nos droits soient respectés en tant que droits et non traités comme des biens de consommation ou une entreprise», a déclaré le président élu. «Nous savons qu’il continue d’y avoir une justice pour les riches, et une justice pour les pauvres, et nous ne permettrons plus que les pauvres continuent de payer le prix de l’inégalité au Chili.»
Pendant la campagne, il a établi un programme ambitieux, qui prévoit notamment l’émancipation des femmes et la lutte contre le changement climatique.
Voix discordantes
Au sein de l’épiscopat des voix moins concordantes se sont également fait entendre, l’archevêque de Concepción, Mgr Fernando Chomali, a exprimé son espoir que le président élu, «reconnaisse et valorise l’âme religieuse du peuple chilien» ainsi que «l’immense travail accompli par l’Église et tant d’autres institutions».
Face au programme de Gabriel Boric proposant l’incorporation d’une perspective féministe, l’avortement légal, libre, sûr et gratuit et des modifications de la loi sur l’identité sexuelle, le prélat espère également qu’il valorisera «la famille en tant que lieu où les gens apprennent à grandir». En ce sens, il l’invite à promouvoir «résolument les faibles qui sont dans le ventre de leur mère, dans un lit d’hôpital, à la frontière, sans papiers, sans abri ou handicapés dans la rue».
Mgr Chomali a également encouragé Gabriel Boric à promouvoir le travail, «car c’est un moyen privilégié de surmonter la pauvreté qui frappe tant de Chiliens».
«J’espère qu’il donnera l’exemple de la probité et fera tout ce qui est nécessaire pour mettre fin à la corruption, au copinage et à toutes sortes de quotas, car ils sont une source majeure d’injustice», a ajouté l’archevêque. Enfin «il ne doit en aucun cas cautionner la violence sous quelque forme que ce soit, d’où qu’elle vienne.» (cath.ch/ag/mp)