Leonardo Boff est l'un des pères fondateurs de la théologie de la libération | © Ministerio de Cultura de la Nacion Argentina/Flickr/CC BY-SA 2.0
International

Leonardo Boff pense que le pape va réformer le célibat des prêtres

Le théologien de la libération brésilien Leonardo Boff s’attend à ce que les ex-prêtres mariés soient réintégrés dans la pastorale. «Les évêques brésiliens l’ont formellement demandé au pape», a affirmé l’ancien Père franciscain au quotidien allemand Kölner Stadt-Anzeiger.

Leonardo Boff assure, d’après des informations provenant de l’entourage du pape François, que ce dernier aurait la volonté de répondre positivement à cette demande- du moins pour une phase expérimentale au Brésil. La mesure serait destinée à palier à la pénurie de prêtres au niveau mondial. «En même temps, il s’agirait d’une impulsion pour que l’Eglise catholique supprime le fardeau du célibat obligatoire», lance le théologien dans l’interview publiée le 25 décembre 2016. Il souligne le problème que représente le manque de prêtres, notamment au Brésil. Il remarque qu’il «n’est pas étonnant que les fidèles se rendent en masse chez les évangéliques et les pentecôtistes pour combler ce vide d’accompagnement (spirituel)».

«François est des nôtres»

L’ancien Père franciscain avoue avoir, après son abandon de la prêtrise en 1992, continué à exercer des fonctions sacerdotales. Ceci avec le consentement explicite d’évêques de son pays. «Jusqu’à maintenant, aucun évêque que je connais, ne l’a jamais interdit ou même fait d’objection», assure-t-il. Selon Leonardo Boff, les prélats s’en réjouissaient même et lui disaient: «le peuple a le droit de recevoir l’Eucharistie. Continue tranquillement à le faire!»

Retour en grâce de la théologie de la libération?

Pour Leonardo Boff, la théologie de la libération, condamnée par les papes Jean Paul II et Benoît XVI pour sa trop grande proximité avec le marxisme, a été pleinement réhabilité par le pape argentin. «François est des nôtres. Il a fait de la théologie de la libération un bien commun de l’Eglise et a élargi sa portée», affirme Leonardo Boff en référence à la préoccupation du pape pour la sauvegarde de la création. Selon le théologien, le pontife a demandé, dans le cadre de la rédaction de son encyclique Laudato Si’, qu’il lui fasse parvenir ses écrits. Le pape lui aurait suggéré de ne pas passer par l’administration vaticane, qui aurait bloqué ces livres «interdits», mais par l’ambassadeur argentin auprès du Saint-Siège, un proche du pontife.

Le penseur brésilien relève également les gestes de réconciliation avec certains théologiens de la libération qui ont été reçus au Vatican par le pape François. Il indique avoir été lui-même invité à Rome. Il précise cependant que le pape n’avait au dernier moment pas eu le temps de le rencontrer, à cause d’une urgence au Synode des évêques.

Le cardinal Burke, le «Donald Trump de l’Eglise»

Dans l’interview au Kölner Stadt-Anzeiger, Leonardo Boff défend en outre le pape contre «les vents contraires» venant de ses propres rangs. Le théologien désigne ainsi nommément dans le rôle de contradicteur le cardinal américain Raymond Leo Burke, qu’il qualifie de «Donald Trump de l’Eglise catholique». L’ancien prêtre critique vertement les velléités du patron de l’Ordre de Malte de «corriger» le pape sur certaines de ses positions doctrinales. Il estime cette attitude «sans précédent» dans l’histoire de l’Eglise et ose parler «d’affront» envers le pontife. «Le pape ne peut pas être condamné, c’est une règle de l’Eglise», souligne Leonardo Boff.

Il relève que la priorité du pape François n’est pas l’Eglise en elle-même et encore moins ses affaires internes, mais la survie de l’humanité et l’avenir de la terre. «Les deux sont en danger, et il faut se demander si le christianisme peut apporter sa contribution pour surmonter cette grande crise qui menace les fondements de l’humanité».


Leonardo Boff

Leonardo Boff, né en 1938, est l’un des pères fondateurs de la théologie de la libération, qui a vu le jour dans les années 1960 en Amérique latine. Le courant de pensée préconise en particulier l’option préférentielle pour les pauvres.

En 1985, le Brésilien est sanctionné par les autorités doctrinales du Vatican, en raison de la proximité entre théologie de la libération et marxisme. La Congrégation pour la doctrine de la foi (CDF), alors dirigée par le cardinal Joseph Ratzinger, lui intime «silence et obéissance», l’interdisant de prédication et d’enseignement. En 1992, suite à ses actes de «désobéissance» et ses attaques répétées contre le pape Jean Paul II, il quitte ses fonctions sacerdotales ainsi que l’Ordre franciscain.

Il se marie ensuite avec Marcia Maria Monteiro de Miranda et s’engage dans un service populaire d’aide aux mères et aux enfants des rues. (cath.ch/kna/ksa/rz)

Leonardo Boff est l'un des pères fondateurs de la théologie de la libération | © Ministerio de Cultura de la Nacion Argentina/Flickr/CC BY-SA 2.0
27 décembre 2016 | 13:54
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 3  min.
Partagez!