Le Vatican méconnu: le cimetière et le collège teutoniques
Rome, 07.07.15 (cath.ch-apic) Situés entre la basilique Saint-Pierre et la salle Paul VI, le cimetière et le collège teutoniques sont les plus anciennes fondations nationales allemandes à Rome. Construits à l’emplacement du cirque de Néron, les premiers bâtiments furent édifiés par Charlemagne, avant d’être repris en main par les Allemands de Rome au XVe siècle. C’est finalement Pie IX, en 1876, qui consacre définitivement le cimetière à la communauté germanophone et fonde le collège teutonique. Aujourd’hui, le complexe est un lieu important pour la communauté allemande et reste lié au pape émérite Benoît XVI.
Les origines de ce ›quartier allemand’ au Vatican ne sont pas extrêmement précises. Autrefois s’y trouvait le cirque de Néron, qui fut le théâtre du martyre de nombreux chrétiens, dont celui de saint Pierre, crucifié la tête vers le sol.
Charlemagne
En 799 apparaît pour la première fois le nom de Schola Francorum. En 796, Charlemagne, avec la permission du pape Léon III (795-816), fonde en effet un hospice pour les pèlerins, destiné à la population de son empire. Avec le déclin de l’empire carolingien puis le Grand schisme d’Occident à la fin du 14e siècle, les fondations sont peu à peu tombées en ruines.
Au 15e siècle, le souvenir de l’hospice carolingien reprend vie grâce à l’influente communauté allemande de Rome qui construit l’actuel mur d’enceinte du cimetière. En 1448, la peste frappe Rome, peu avant l’Année sainte de 1450. Un groupe de prêtres fonde la ›Confrérie des pauvres défunts’ en 1454, afin de permettre les enterrements de tous les Allemands pauvres qui meurent à Rome. Une nouvelle église, Santa Maria della Pietà, et un nouvel hospice pour les pèlerins allemands sont alors construits. La confrérie devient officiellement «archiconfrérie» à la fin du 16e siècle.
Un lieu pour les Allemands
Alors que l’institution allemande avait été délaissée entre le 16e et le 18e siècle, Pie IX (1846-1878) lui redonne finalement toute son importance en créant en 1876 le collège teutonique, séminaire à destination de prêtres allemands et dédié aux recherches historiques et à l’étude de l’archéologie chrétienne. Les premiers hôtes du bâtiment sont de jeunes prêtres victimes de la Kulturkampf, le conflit résultant de la difficile séparation de l’Eglise et de l’Etat dans l’Empire allemand, et qui doivent fuir leur pays.
Du cimetière, l’accès à l’église, entièrement restaurée dans les années 1972-1975, se fait par un portail, œuvre du sculpteur allemand Elmar Hillebrand, offert en 1957 par le président de la République allemande Theodor Heuss. Sur le battant de gauche se trouve une Vierge à l’enfant, sous le blason de la confrérie constitué de l’Aigle bicéphale et de la Pietà. Dans l’église, la chapelle des Suisses fut le lieu de sépulture des gardes tombés lors du sac de Rome en 1527.
Un cimetière prisé
Petite particularité géographique, le cimetière bénéficie du statut d’extraterritorialité, car bien que l’entrée se fasse par le Vatican, le terrain lui-même est de l’autre côté de la frontière.
Parce que situé au Vatican, le cimetière teutonique est depuis toujours un lieu de sépulture très recherché. Habituellement, les personnes qui y ont droit de sépulture sont les membres de l’archiconfrérie du lieu, des maisons religieuses d’origine allemande et des deux autres collèges pontificaux allemands à Rome, celui de l’Anima et du Germanicum. On y trouve également les tombes de défunts célèbres comme Joseph Anton Koch, peintre paysagiste autrichien, Mgr Anton de Waal, premier recteur du collège, sœur Pascalina Lehnert, secrétaire et aide-soignante de Pie XII ou encore Engelbert Kirschbaum, l’un des archéologues ayant découvert la tombe de saint Pierre. La plus vieille épitaphe du cimetière date des années 1500.
Le 9 janvier 2015, un SDF d’origine flamande, qui fréquentait la paroisse Sainte-Anne, à l’intérieur du Vatican, a été enterré dans le cimetière teutonique. C’est une famille allemande de Rome qui a pris en charge les frais de son enterrement.
Benoît XVI
Le cimetière et le collège teutoniques sont aussi un endroit cher à Benoît XVI qui, alors qu’il était cardinal, y a logé quelques mois lors de son arrivée au Vatican en 1982 – comme préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi. Il y a célébré une messe hebdomadaire pendant de longues années. Outre le pape émérite, le cardinal allemand Walter Kasper est aussi membre de l’archiconfrérie qui administre le site.
Une ›bibliothèque romaine Joseph Ratzinger – Benoît XVI’ doit en outre y ouvrir ses portes en septembre 2015, comptant au départ un millier de livres en différentes langues, parmi lesquels l’ensemble des ouvrages écrits par le pape émérite. Pour l’instant, le collège teutonique abrite une bibliothèque de 40’000 volumes sur l’histoire de l’Eglise et l’archéologie chrétienne, ainsi qu’un petit musée d’objets antiques et médiévaux. (apic/imedia/cd/mp)
Encadré
Série sur les lieux emblématiques du ›Vatican méconnu’
On pourrait croire que le Vatican se limite à la place et à la basilique Saint-Pierre. Pourtant, avec ses 44 hectares de terrain, l’Etat de la Cité du Vatican possède tous les attributs d’un Etat à part entière. Plus petit Etat au monde – quatre fois moins que la principauté de Monaco -, il est composé de bâtiments, de cours, de petites places, de quelques rues et de jardins.
Ainsi le Vatican possède une gare, des magasins, des tribunaux, une radio, et nombre de services utiles aux quelque 900 résidents et 2800 employés, ainsi qu’au rayonnement du Saint-Siège. Des lieux qui ont tous leur histoire, souvent postérieure à la signature des Accords du Latran, en 1929, entre Benito Mussolini et le cardinal Pietro Gasparri.
Mais le territoire du Vatican s’étend également au-delà de ses 3,2 kilomètres de frontières. Il s’agit des palais extraterritoriaux, du ›Vatican-hors-les-murs’, dont le plus important est la résidence d’été des papes à Castel Gandolfo, ainsi que les basiliques majeures et certains bureaux de la curie.
Au fil des semaines à venir, l’agence I.MEDIA proposera de retrouver un de ces lieux emblématiques du ›Vatican méconnu’ parmi lesquels la Maison Sainte-Marthe, nouveau cœur du Vatican ; le Palais du Gouvernorat, siège des services généraux, techniques et économiques ; la gare ferroviaire, devenue magasin de luxe ; la reproduction de la Grotte de Lourdes où les papes aiment à se recueillir ; le monastère Mater Ecclesiae où s’est retiré Benoît XVI (2005-2013) ou encore la Casina Pio IV, siège de l’Académie pontificale des sciences. (apic/imedia/cd/rz)