Le Sénat français livre son rapport sur les abus sexuels sur mineurs
La mission d’information du Sénat français sur les infractions sexuelles sur mineurs a rendu son rapport le 29 mai 2019. Pour sa présidente, la sénatrice Catherine Deroche (LR), l’omerta sur ces affaires a prévalu non seulement dans l’Eglise, mais aussi dans les autres institutions.
La mission d’information sur les infractions sexuelles sur mineurs a été créée au Sénat en octobre 2018 à la suite d’un appel du magazine Témoignage chrétien à lancer une commission d’enquête indépendante sur les abus dans l’Église catholique. Après des mois d’audition, elle a livré son rapport le 29 mai 2019.
L’Église catholique est l’épicentre de ce mouvement de révélation, mais le phénomène des agressions sexuelles sur mineurs est répandu dans toutes les autres institutions, a déclaré à La Croix sa présidente Catherine Deroche. La sénatrice rappelle que la très grande majorité des abus sexuels sur mineurs sont commis au sein de la famille. L’omerta de la hiérarchie a prévalu également dans l’éducation nationale, dans le monde du sport, dans le milieu de la culture. Un réflexe du «pas de vague».
Une vraie prise de conscience dans l’Eglise
Pour la présidente de la mission d’information, il y a aujourd’hui une une vraie prise de conscience, de la hiérarchie catholique mais aussi des fidèles, pour qui dénoncer un prêtre pédocriminel n’est plus une forme d’anti-catholicisme. Les prêtres abuseurs ne sont pas quelques individus isolés, mais qu’il y a eu une dimension systémique. Cette prise de conscience a peut-être mis du temps, mais elle est bien réelle. Selon Catherine Deroche, ne pas le relever tiendrait de la mauvaise foi.
Selon le rapport, les autres confessions et religions sont également touchées par les abus sexuels sur mineurs, notamment dans les camps scouts protestants ou israélites. «Concernant le culte musulman, a priori, il y aurait très peu de cas, mais on peut en douter, et cette réponse est peut-être une forme de non-libération de la parole», a noté Catherine Deroche.
Un travail d’enquête encore à faire
Afin de pouvoir mener des enquêtes plus approfondies, la mission sénatoriale souhaite la mise ne place d’un observatoire qui permette d’établir des statistiques précises et de donner la réalité détaillée des agressions sexuelles. «Ce n’est qu’à partir de là qu’on pourra voir si certains secteurs sont davantage concernés», commente la sénatrice. On sait que le monde du sport, le milieu artistique celui des institutions pour les personnes handicapées sont des secteurs vulnérables.
Le rapport suggère aussi la mise en place d’un fichier national consultable par tous les employeurs qui recrutent des personnes destinées à être au contact des jeunes, salariées ou bénévoles, que ce soit pour garder un enfant à domicile ou conduire un bus scolaire.
Pas de remise en cause du secret de la confession
Interrogée par La Croix sur le secret de la confession, Catherine Deroche note que le prêtre qui commet des agressions sexuelles sur un mineur s’en confesse très rarement. La plupart des abus sont ainsi appris par l’évêque hors du cadre de la confession. Ce qui signifie que le cadre du droit commun s’applique, avec l’obligation de dénoncer. «On ne peut décider à la place (de l’Eglise ) de lever le secret de la confession, mais nous pouvons travailler avec elle pour voir si ce secret pourrait être levé dans certaines circonstances en vertu de l’option de conscience.»
Plus largement, la mission s’est interrogée sur l’obligation ou non de signaler pour des personnes soumises au secret professionnel: les travailleurs sociaux, les professionnels de santé. «Il faut clarifier les choses, notamment dans le milieu médical où beaucoup ne connaissent pas forcément l’option de conscience. (cath.ch/cx/mp)