Le sapin de Noël de la place Saint-Pierre provient, cette année, de Macra, dans le Piémont | © Vatican Media
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Le sapin de Noël place Saint-Pierre, un cadeau de Jean Paul II

Le pape François va inaugurer le sapin de Noël et la crèche de la place Saint-Pierre le 7 décembre 2024. Aussi surprenant que cela puisse paraître, la tradition du sapin de Noël et de la crèche sur la place Saint-Pierre est plutôt récente. Il a fallu en effet attendre 1982 pour que cette coutume soit instaurée au Vatican par le pape Jean Paul II.

Le tout premier sapin de Noël provenait d’Italie et, depuis lors, un arbre est offert par un pays européen ou une région différente chaque année. En 2017, le plus petit était un épicéa de 21 mètres, mais il venait de Gołdap, tout au nord de la Pologne. En 2006, le plus grand avec ses 33,5 mètres était un sapin de Taverna, en Calabre (I).

Pour les habitants de la localité où l’arbre est coupé, offrir ce sapin est un honneur. Ils viennent à Rome avec une délégation officielle pour le remettre ‘personnellement’ au pape qui les reçoit en audience privée. Il faut dire aussi qu’il s’agit d’une jolie promotion pour leur région. Les protestations de certains écologistes des dernières années ne semblent pas devoir ébranler la coutume.

Un Noël polonais

Jean Paul II affectionnait particulièrement les traditions de Noël de sa Pologne natale. Il tenait beaucoup à célébrer la Nativité dans une atmosphère familiale dont la crèche et le sapin faisaient partie. Ces traditions l’aidaient aussi à se sentir plus proche de son pays qui vivait encore sous la férule communiste, alors qu’au début des années 1980 le sapin ne faisait pas partie des traditions italiennes.

«Déjà, dans mon pays, j’aimais beaucoup les arbres. Lorsqu’on les regarde, ils se mettent en un certain sens à parler.» Jean Paul II

Selon Jean Paul II, le sapin et la crèche aident à comprendre le message de salut du Christ. Les lumières du sapin symbolisent la lumière de Jésus sauveur qui transforme le cœur des hommes. Lors d’un discours aux pèlerins en l’an 2000, il en parlait ainsi: «Lorsque, ces jours-ci, de la fenêtre de mon bureau, je regardais la Place Saint-Pierre, l’arbre a suscité en moi une élévation spirituelle. Déjà, dans mon pays, j’aimais beaucoup les arbres. Lorsqu’on les regarde, ils se mettent en un certain sens à parler. Un poète considère les arbres comme des prédicateurs portant un message profond: ‘Ils ne prêchent pas des doctrines et des recettes, mais annoncent la loi fondamentale de la vie’.»

Le signe de la vie qui ne meurt pas

A la veille de son dernier Noël, le 19 décembre 2004, le pape polonais rappelait que cette tradition «exalte la valeur de la vie car en hiver, le sapin toujours vert devient le signe de la vie qui ne meurt pas». «D’ordinaire, sur l’arbre décoré et à ses pieds, sont déposés les dons de Noël. Le symbole devient ainsi éloquent également dans un sens typiquement chrétien: il rappelle à l’esprit l’arbre de la vie’ (Gn 2,9), figure du Christ, don suprême de Dieu à l’humanité.»

«Le sapin illuminé devient porteur d’une lumière qui n’est pas la sienne» Benoît XVI

Le bonnet rouge de Benoît XVI rappelait celui du Père Noël | Vatican Media

Porteur de la vraie lumière

Successeur de Jean Paul II, le Bavarois Joseph Ratzinger était tout aussi attaché aux traditions de Noël. Benoît XVI se fait tout aussi lyrique en recevant en 2009 un sapin venu des Ardennes belges: «Dans la forêt, les arbres se tiennent proches les uns des autres et chacun d’eux contribue à faire de la forêt un lieu ombragé, obscur parfois. Et voici que, choisi parmi une multitude, le sapin majestueux que vous offrez aujourd’hui est illuminé et couvert de décorations étincelantes qui sont comme autant de fruits merveilleux. Laissant sa robe sombre pour un éclat scintillant, il est transfiguré, il devient porteur d’une lumière qui n’est pas la sienne mais qui rend témoignage à la vraie Lumière qui vient en ce monde.»

Les crèches du monde

Second symbole de Noël, la crèche s’est installée sur la place Saint-Pierre en 1982, en même temps que le sapin. Pendant 30 ans les mêmes personnages ont été réutilisés, mais à chaque Noël, le Vatican commandait un nouveau décor. En 2011, le pape Benoît XVI fut alerté sur le coût important de cette réalisation. On décida alors de faire comme pour le sapin, c’est-à-dire de solliciter les régions ou les pays à offrir une crèche selon leurs traditions. La crèche change ainsi chaque année suscitant son lot des louanges ou de critiques.

«La crèche, en effet, est comme un Évangile vivant, qui découle des pages de la Sainte Écriture» Pape François

La crèche est exposée pendant les quatre semaines de l’Avent. L’enfant Jésus ne fait cependant son apparition que lors de la veillée de Noël. La crèche est démontée le jour de la fête du baptême du Seigneur, c’est-à-dire à mi-janvier.

Le pape François est lui aussi très attaché à la crèche de Noël. Au point de lui consacrer une lettre apostolique Admirabile signum en 2019. Dans ce texte, il souligne que «Représenter l’événement de la naissance de Jésus, équivaut à annoncer le mystère de l’Incarnation du Fils de Dieu avec simplicité et joie. La crèche, en effet, est comme un Évangile vivant, qui découle des pages de la Sainte Écriture.»

L’Enfant Jésus de la crèche remis au pape François | © Vatican Media

De Naples au Pérou

En 2013, pour le premier Noël du pape François, Naples a fait don d’une magnifique crèche baroque qui fourmille de personnages et de détails. En 2016, la crèche offerte par Malte rappelle les nombreux tremblements de terre de l’année.

En 2017, Naples offre à nouveau la crèche sur le thème des œuvres de charité. Mais avec un personnage nu et un bras mort se balançant d’une civière – représentant les deux œuvres de miséricorde: vêtir ceux qui sont nus et enterrer les morts NDLR -, cette crèche a suscité de nombreuses controverses. La crèche offerte par la Vénétie en 2018 est faite de personnages de sable.

Un cosmonaute et un guerrier parmi les personnages exposés place Saint-Pierre en 2020 | © Vatican Media

Avec ses personnages cylindriques en céramique, évoquant des robots de science-fiction, la crèche de Abbruzzes, en 2020, provoque à nouveau la polémique.

En 2021 une crèche fabriquée par la communauté péruvienne de Chopcca dans les Andes anime la place.

En 2023, la crèche vient de Greccio, le village où 800 ans plus tôt saint François d’Assise imagina la première crèche vivante autour d’une mangeoire, d’un âne et d’un bœuf. Les villageois des alentours jouant les différents personnages: Marie, Joseph, les bergers, les anges… Frappé par les grottes de Greccio, semblables aux paysages de Bethléem, saint François inventa alors la tradition de la crèche qui perdure aujourd’hui. (cath.ch/mp)

Sapin et crèche 2024
Le sapin de Noël 2024 de la place St-Pierre est italien. Il s’agit d’un épicéa de 29 mètres provenant de Ledro, dans le Trentin. Son abattage et son transport à Rome ont suscité une pétition de certains milieux écologistes demandant au pape d’empêcher ce ‘sacrilège’. Une polémique qui a trouvé un écho jusque sur la chaîne d’informations qatarie Al-Jazira et à laquelle le maire a sèchement répondu que la région vivait de l’économie forestière et qu’elle était certifiée PEFC selon les exigences environnementales les plus sévères. «Si ce sapin n’allait pas à Rome, il irait directement à la scierie», a-t-il poursuivi.
La Vénétie à l’honneur
La crèche que la localité italienne de Grado apporte cette année sur la Place Saint-Pierre, outre la centralité de la naissance de l’Enfant Jésus, propose des scènes de la vie quotidienne, dans les casoni, ces constructions typiques en roseau dans lesquelles vivaient les habitants de cette île de la lagune de Venise.
Elle a été réalisée par un collectif d’une quarantaine d’artistes et de bénévoles de la région. L’œuvre prévoit également la présence d’un plan d’eau à l’intérieur d’une longue digue de blocs de polystyrène, où flotteront deux batele, les embarcations à fond plat caractéristiques utilisées pour naviguer dans la lagune. MP

Le pape polonais Jean Paul II a une boule de Noël a son effigie | DR

Les boules de Noël de Jean Paul II
L’amour des forêts et des arbres de Jean Paul II n’est plus à démontrer. Celui des boules de Noël est moins connu mais très plaisant, comme le raconte un de ses biographes, Mgr Mieczysław Mokrzycki. Le pape avait fait installer un grand sapin de Noël décoré dans la bibliothèque où il recevait ses invités. Les plus audacieux ne pouvaient pas résister à la tentation de prendre une boule de Noël comme souvenir. Ils demandaient toujours le consentement du pape, qui l’accordait très volontiers. Un jour, un groupe d’une trentaine de personnes (l’auteur précise qu’il ne s’agissait pas de Polonais!) a littéralement dépouillé l’arbre, au grand dam de Sœur Tobiana, une des religieuses qui servaient le pape, et qui devait chaque jour regarnir le sapin. Heureusement, le stock était abondant car le pape recevait beaucoup de boules de Noël du monde entier. Karol Wojtyla ne se doutait certainement pas que son effigie allait un jour se retrouver sur des boules de Noël vendues sur internet pour une poignée d’argent. MP

Le sapin de Noël de la place Saint-Pierre provient, cette année, de Macra, dans le Piémont | © Vatican Media
4 décembre 2024 | 17:00
par Maurice Page
Temps de lecture : env. 6  min.
Crèche (37), Noël (249), pape (584), Place Saint-Pierre (43), Rome (347), Sapin (21)
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