Le racisme anti-musulman reste une réalité en Suisse

Le racisme anti–musulman reste une réalité en Suisse. Son augmentation constante reflète un climat social tendu et lui confère une actualité et une urgence toujours plus importantes, souligne une étude de référence commandée par la Confédération au Centre Suisse Islam et société (CSIS) de l’Université de Fribourg et présenté le 27 février 2025.

Discrimination à l’embauche, accès refusé au logement, inégalités de traitement, soupçons en raison de l’appartenance nationale et religieuse, accès restreint à la formation, discrimination liée au genre et au port du foulard, etc., les musulmans de Suisse continuent de souffrir d’un racisme plus ou moins latent constate l’étude du CSIS basée notamment sur le témoignage de personnes musulmanes.

Un racisme systémique

Le racisme anti-musulman n’est pas qu’une hostilité d’individus vis-à-vis des personnes musulmanes; c’est un rapport social qui s’est historiquement développé au sein de la société, explique le CSIS. Ce rapport se caractérise par des schémas de pensée, de perception et d’action qui qui créent et légitiment des relations de pouvoir et d’inégalité. Les personnes musulmanes, ou perçues comme telles, se voient assimilées à un groupe homogène, aux caractéristiques immuables, et perçu comme une menace pour la société suisse. Cette vision des choses dispose de relais permanents dans certains partis politiques.

Une population hétérogène

Or il se trouve que la population musulmane de Suisse est très hétérogène en matière d’origine nationale, de tendance religieuse, de langue, de culture ou d’orientation politique. Souvent par des généralisations grossières, on lui attribue des caractéristiques communes comme l’homophobie, le sexisme, l’antisémitisme, la violence religieuse, le déni de démocratie. On lui nie la capacité de s’intégrer à la société suisse.

Lorsque des personnes musulmanes expriment leur incompréhension face à des caricatures visant des symboles clés de l’islam, leur réaction passe pour une incapacité foncière à supporter la critique et comme la preuve de l’incompatibilité fondamentale de l’islam avec les «valeurs européennes». 

Un racisme peu étudié

Le racisme anti-musulman reste très peu étudié en Suisse et les recherches à ce sujet sont encore rares. L’étude du CSIS se donne pour ambition de combler, au moins partiellement, cette lacune, de sensibiliser le public à cette forme de racisme, et de fournir des pistes concrètes pour agir. 

La publication s’adresse aux autorités, aux organisations, à la société civile, et au public. Elle accorde une place centrale aux témoignages des personnes discriminées, ce qui permet non seulement de rendre visible leur vécu, mais aussi de savoir où et comment intervenir.

Sensibilisation et prévention  

Le Service de lutte contre le racisme (SLR) de la Confédération doit contribuer à atteindre cet objectif par un travail de prévention et de sensibilisation. Lutter contre les discriminations est la tâche de la société dans son ensemble et de ses institutions. Dans l’optique d’une lutte sur le long terme, la Confédération élabore actuellement une stratégie et un plan national contre le racisme et l’antisémitisme. Les différentes formes de racisme, dont le racisme anti-musulman, y seront appréhendées comme des composantes du racisme structurel. 

Recommandations

Le rapport adresse une série de recommandations. Il s’agit d’abord de combler les lacunes dans les données en développant le monitorage et le conseil, notamment à travers le Réseau national de centres de conseil pour les victimes du racisme. Une deuxième mesure est de promouvoir un travail éducatif sur le racisme à tous les niveaux. L’abolition des discriminations structurelles sur le marché du travail constitue un troisième chantier. Les normes et les directives pour les forces de l’ordre et les autorités doivent également être établies ou revues sous l’angle du racisme. La sensibilisation des médias, des politiques et de l’opinion publique doit permettre de renforcer la prise de conscience du problème. Enfin, il s’agira d’approfondir la recherche sur le racisme anti-musulman. (cath.ch/com/mp)