Le Père Rafic Greiche affirme qu'il n'y a pas de «coup d'Etat»

Egypte: Le renversement du président Morsi, «un jour heureux pour les chrétiens»

Le Caire, 5 juillet 2013 (Apic) «Ce qui se passe à l’heure actuelle en Egypte n’est pas un coup d’Etat. L’armée a choisi de protéger une révolution pacifique conduite par des jeunes Egyptiens et suivie par des millions de personnes dans tout le pays», affirme le Père Rafic Greiche, porte-parole de l’Eglise copte catholique d’Egypte. Le prêtre relève que le nouveau gouvernement intérimaire va tenir compte de toutes les composantes de la société, y compris les Frères musulmans, qui sont une réalité incontournable dans le pays.

Interrogé par l’agence de presse catholique italienne AsiaNews à Rome, le prêtre égyptien relève que dans un coup d’Etat normal, les militaires auraient immédiatement nommé un de leurs hommes comme président ad intérim: «Ils auraient changé le gouvernement en prenant le pouvoir, mais ce n’est pas le cas en Egypte!»

Le Père Greiche affirme que la destitution du président Mohammed Morsi par l’armée égyptienne est «un jour heureux pour les chrétiens». L’armée a exécuté la volonté du peuple, lance-t-il. «Ces derniers jours, le peuple a exprimé cette volonté sans aucune équivoque à travers des millions de signatures et de gigantesques manifestations au Caire et dans l’ensemble du pays».

Pour lui, un putsch «c’est quand des officiers s’emparent du pouvoir et agissent sans l’approbation du peuple…». A ses yeux, c’est le contraire qui s’est passé en Egypte, l’armée voulant éviter l’effusion de sang que prédisaient les Frères musulmans.

Arrestations pour incitation au meurtre

Il explique ainsi les raisons pour lesquelles les Eglises copte orthodoxe et copte catholique soutiennent le changement à la tête de l’Etat, après trois jours de manifestations de masse contre le président Mohamed Morsi et les chefs des Frères musulmans.

Jeudi 4 juillet, la police égyptienne a procédé à l’arrestation de 300 leaders de la confrérie, notamment son chef spirituel Mohamed Badie et son trésorier, Khairat al-Shater, pour avoir incité leurs disciples au meurtre des adversaires de Mohamed Morsi. Des appels au djihad contre les «ennemis de l’islam» ont provoqué des fusillades et plusieurs personnes ont déjà trouvé la mort suite à ces incidents.

En émettant l’espoir que les chrétiens ne seront pas exclus du processus politique qui attend le peuple égyptien, le Père Greiche relève que l’échec des Frères musulmans semble manifeste aux yeux de tous les Egyptiens: «Les Frères musulmans n’étaient pas préparés à gouverner. En outre, ce qui leur importait dès le début, c’était l’édification d’un califat islamique, et non l’Egypte en premier lieu. Le peuple ne voulait pas l’accepter plus longtemps».

Crainte de violences anti-chrétiennes

Le Père Greiche craint toutefois que les Frères musulmans chassés du pouvoir ne se vengent et attisent des troubles. Des premiers cas de violence islamiste contre des institutions chrétiennes sont signalés. Des exactions ont été commises contre une église catholique près de Minya les 2 et 3 juillet, et l’édifice a été légèrement endommagé. «Mais ce sont surtout les commerces chrétiens à proximité qui ont été sinistrés».

Il revient à présent à l’Université Al-Azhar, au Caire, la principale institution islamique du pays, de faire revenir dans le droit chemin les jeunes gens induits en erreur par l’idéologie des Frères musulmans, affirme le porte-parole de l’Eglise copte catholique d’Egypte.

Il met en garde contre «une chasse aux sorcières» visant les Frères musulmans, en rappelant que tant le grand imam d’Al-Azhar que la patriarche copte orthodoxe Tawadros ont invité les protagonistes des manifestations à «accueillir et à accepter les Frères musulmans, en particulier les jeunes, qui ont subi ces dernières années un vrai lavage de cerveau de la part de leurs guides».

Les Egyptiens ne sont pas des fondamentalistes

«Oui, l’Egypte est un pays religieux. C’est vrai pour les musulmans et pour les chrétiens. Mais les Egyptiens ne sont pas des fondamentalistes». Le Père Greiche souligne que l’opposition non islamique a trouvé une nouvelle unité en Egypte. «Ce qui est essentiel, c’est que la jeunesse conduise la politique et pas l’inverse. Les jeunes gens de la place Tahrir doivent maintenant être associés au processus. On ne doit pas les exclure une nouvelle fois comme après la révolution de 2011». (apic/asian/aed/be)

5 juillet 2013 | 15:30
par webmaster@kath.ch
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