Le patriarche de Moscou appelle à s'abstenir de se rendre à l'église
Alors que l’Eglise orthodoxe de Biélorussie n’a pas l’intention d’interdire les processions religieuses et autres festivités de Pâques malgré la propagation du coronavirus, le patriarche de Moscou Cyrille appelle les croyants à s’abstenir de se rendre à l’église en pleine pandémie.
Dans son homélie en la cathédrale du Christ Sauveur, dimanche 29 mars 2020, le primat de l’Eglise orthodoxe russe a appelé les fidèles à prier chez eux et non dans les églises, afin de se protéger de la maladie.
Une décision pas facile à prendre
Tout en reconnaissant que cette décision n’avait pas été facile pour lui, le patriarche a rappelé aux fidèles que dans les prochains jours, tant qu’il n’y aura pas une bénédiction patriarcale spéciale, prévaut la nécessité de s’abstenir de fréquenter les églises. «Si l’on vous objecte quelque chose, rappelez l’exemple de Marie d’Egypte», qui est fêtée ces jours-ci par l’Eglise orthodoxe comme une grande ascète. «Lors de sa vie terrestre, elle a adopté une nature angélique; elle a accompli le salut de son corps et de son âme loin des monastères et des églises, dans un désert lointain, c’est-à-dire dans la solitude».
Le patriarche Cyrille a reconnu que cette décision n’avait pas été facile pour lui: «Depuis 51 ans, je prêche depuis ma cathèdre, j’exhorte les gens à venir à l’église, à surmonter le penchant de leur mauvaise volonté et les circonstances extérieures, j’ai consacré toute ma vie à cet appel, et j’espère que vous comprenez comme il m’est difficile de dire aujourd’hui: ›Abstenez-vous de fréquenter les églises’».
Marie d’Egypte
Par les prières de Marie d’Egypte, a-t-il insisté, «que le Seigneur vous garde tous de l’infection, de la maladie, mais, et c’est le principal, qu’elle nous aide par son exemple d’isolement à prendre conscience de l’importance de la solitude dans nos ›déserts’ personnels, dans nos appartements. Prenons sur nous une parcelle de l’ascèse de Marie d’Egypte afin de se préserver, de préserver nos familles et nos proches».
L’Eglise appelle aujourd’hui, a-t-il souligné, «avant qu’il y ait des victimes dans nos familles», à observer strictement dans ces circonstances les prescriptions proposées par les autorités sanitaires en Russie. Comme l’a fait remarquer le correspondant de l’agence russe «Interfax», des fidèles peu nombreux assistaient dimanche 29 mars à la liturgie en la cathédrale patriarcale, et ils portaient des masques.
L’Eglise biélorusse n’annule pas les processions de Pâques
De son côté, l’Eglise orthodoxe de Biélorussie, rattachée canoniquement au Patriarcat de Moscou, ne va pas interdire les processions religieuses se déroulant en plein air lors des prochaines célébrations de Pâques et autres fêtes, a déclaré à Interfax le chef du département d’information de l’Eglise orthodoxe biélorusse, l’archiprêtre Sergey Lepin.
«L’Eglise prend des mesures de sécurité pour prévenir l’épidémie de coronavirus, notamment en désinfectant les icônes, les croix, etc. Ces mesures s’appliqueront également aux prochaines célébrations de Pâques et autres fêtes. Nous ne prévoyons pas de prendre de mesures supplémentaires», a déclaré le prêtre.
Le président Loukachenko joue avec le feu
Selon le président biélorusse Alexandre Loukachenko, le pic de coronavirus dans le pays sera passé avant la Pâque orthodoxe le 19 avril. «Si nous tenons jusqu’à la Pâque orthodoxe, cela signifie que nous vivrons», a déclaré Loukachenko lors d’une réunion avec l’ambassadeur chinois Cui Qiming à Minsk le 24 mars. Se refusant à arrêter le pays pour endiguer la pandémie de Covid-19, la Biélorussie et ses 9,5 millions d’habitants fait figure d’exception en Europe. La semaine dernière, le chef de l’Etat biélorusse a dénoncé une «psychose» qui risquait d’être plus dangereuse que le virus lui-même, incitant la population à se rendre au travail. Le Belarus comptait déjà la semaine dernière une centaine de cas de Covid-19. (cath.ch/mospat/interfax/be)
Hilarion: Si vous n’avez pas peur de la contagion, pensez aux autres
Face à la pandémie, des milliers de prêtres et des millions de fidèles de l’Eglise orthodoxe russe se retrouvent dans une situation particulièrement difficile, en pleine période du Grand Carême, temps de préparation à la principale fête chrétienne, Pâques, qui a lieu cette année le 19 avril. «Dans l’ensemble, les gens réagissent positivement, avec gratitude et avec calme» aux instructions du Saint-Synode qui prescrivent de respecter strictement les mesures hygiéniques et sanitaires, explique le métropolite Hilarion de Volokolamsk.
Le président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou, dans une interview à l’agence de presse russe RIA-Novosti, constate qu’en Ukraine, les églises restent ouvertes, tous les offices y sont célébrés, ainsi que des offices d’intercession avec bénédiction de l’eau et sonneries de cloches en cette période d’épidémie.
«La communion et la confession sont autorisées toute la journée, par groupes de dix personnes; les offices en plein air ont aussi été autorisés pour éviter la concentration de personnes dans un lieu clos». En ce qui concerne l’Eglise orthodoxe russe, le Saint-Synode a édicté des instructions qui prescrivent de respecter strictement les mesures hygiéniques et sanitaires.»Pendant la communion, on essuie la cuillère dans un linge imbibé d’alcool, puis on la rince; la boisson servie après la communion est donné à chaque communiant dans des verres jetables, des gants hygiéniques à usage unique sont utilisés, les communiants s’essuient les lèvres avec une serviette en papier. Il leur est prescrit de s’abstenir de baiser le calice».
Haro sur les «pharisiens»
Le «numéro 2» du Patriarcat de Moscou dénonce ceux qui brandissent leur orthodoxie pour dire fièrement que «les confesseurs de la foi n’iront pas en quarantaine»: «ils ne se conduisent pas de façon évangélique, mais comme des pharisiens. Ils utilisent la crise pour se mettre en avant: ‘regardez, je ne suis pas comme les autres gens, je suis un confesseur de la foi, pas comme le patriarche et tous ces hiérarques. C’est une conduite irresponsable et égoïste. Si vous n’avez pas peur d’être contaminés, pensez aux autres!
«Aucune infection ne peut être transmise par la communion»
Le métropolite Hilarion relève que pour les orthodoxes, il est évident qu’aucune infection ne peut être transmise par la communion. «Penser autrement est sacrilège (…) Nous croyons fermement qu’aucune infection ne peut passer par les Saints Dons. Le Corps et le Sang du Christ sont reçus par les fidèles ‘pour la guérison de l’âme et du corps’, ils sont eux-mêmes une source de guérison. Mais le calice et la cuillère de la communion sont des objets qui ne sont pas protégés des bactéries et des virus. C’est pour cette raison que nous prenons des mesures de désinfection. Il faut le prendre avec humilité et avec calme!» JB