Le Père Paolo Dall'Oglio a été enlevé en juillet 2013 par les terroristes de Daech | Patrick Garety et Olivia Crellin/Wikimedia Commons/CC BY-SA 3.0)
International

Le pape préface le «testament spirituel» du Père jésuite Dall'Oglio

«C’est émouvant de relire aujourd’hui certains passages prophétiques d’un texte qui ressemble tant à un testament spirituel», écrit le pape François dans sa préface d’Il mio testamento, un livre contenant des textes du Père Paolo Dall’Oglio, publié en juillet 2023. Fondateur de la communauté monastique de Deir Mar Moussa, en Syrie, le jésuite italien avait été enlevé il y a 10 ans par des islamistes et est toujours porté disparu.

Ce volume inaugure la publication de conférences inédites que le Père Paolo Dall’Oglio a prononcées dans les mois qui ont précédé son expulsion de Syrie, en juin 2012, pour cause d’hostilité déclarée au régime de Bachar al-Assad. Fondateur du monastère de Mar Moussa el-Habashi (ou Saint-Moïse-l’Abyssin), non loin de Damas, le Père, âgé alors de 58 ans, s’était installé dans la nouvelle fondation monastique de Deir Maryam el Adhra, à Souleymanieh, au Kurdistan irakien.

Il continuait cependant à parcourir la planète en avocat de la révolution syrienne et s’était déjà rendu dans les zones contrôlées par la rébellion. Il a disparu en juillet 2013, après un ultime passage de la frontière irako-syrienne, à Raqqa, alors qu’il cherchait à entrer en contact avec les ravisseurs de deux évêques, l’un syrien orthodoxe et l’autre grec orthodoxe, enlevés quelques semaines plus tôt.

Le dialogue avec l’islam au cœur de sa démarche

Éditions Centro Ambrosiano 2023

Dans cet ouvrage publié en italien et préfacé par le pape François, le Père Dall’Oglio commente la Règle de la communauté monastique de Deir Mar Musa qu’il avait fondée. Il s’agit là en quelque sorte de son testament spirituel. On y retrouve sa vision portée sur l’œcuménisme, la fraternité entre hommes et femmes, le dialogue avec l’islam… Des engagements chers au pape François et auxquels celui-ci rend hommage dans cette préface publiée intégralement par le quotidien italien Il Sole24Ore et reprise par Vatican News.

«C’est avec une certaine émotion que nous feuilletons les pages de ce livre dans lequel le Père Paolo Dall’Oglio (…) raconte les intentions profondes qui l’ont poussé à faire revivre un ancien monastère syriaque, datant du VIe siècle après Jésus-Christ, en récupérant la grande tradition spirituelle des Pères du désert et en lui donnant en même temps le nouveau sens d’un témoignage de l’amour du Christ dans le contexte arabo-musulman», écrit le pape.

Dans la tradition des Pères du désert

Éditions de l’Atelier 2009

Les maîtres spirituels de Paolo furent en effet Charles de Foucauld, Louis Massignon, Christian de Chergé, le moine de Tibérin. Mais aussi François Jourdan qui, dans Dieu des chrétiens, Dieu des musulmans, s’est centré sur la comparaison des doctrines. Paolo Dall’Oglio avait développé sa pensée en 2009 dans Amoureux de l’Islam, croyant en Jésus. Un livre commenté à l’époque dans la revue choisir par un autre jésuite connaisseur de la Syrie, le Père Joseph Hug. «On saura gré au moine prophète de Mar Moussa et à sa communauté de nous donner une leçon d’islamophilie, sans naïveté», écrivait alors celui-ci.

Le pape, pour sa part, reconnaît en le jésuite disparu «un esprit libre, refusant le formalisme et les phrases de circonstance, parfois extrême». «Nous sommes incapables de donner un nom et une raison à la haine de ses éventuels persécuteurs, poursuit-il. Nous savons cependant ce qu’il n’aurait pas voulu: blâmer l’Islam en tant que tel pour sa disparition mystérieuse et dramatique; renoncer à ce dialogue passionné auquel il a toujours cru dans le but de «racheter l’islam et les musulmans», comme le dit l’un des préceptes de sa règle.»

La voie de la fraternité

Sur ce point, le Père Paolo a été très clair, insiste le pape. «Il n’a pas ignoré les problèmes, il a écouté les récits de souffrance de ses frères chrétiens arabes, les coptes, les chaldéens, les maronites, les assyriens… Mais il sentait que sa vocation spécifique et celle de sa communauté monastique était la voie de la fraternité.» (cath.ch/vn/lb)

Le Père Paolo Dall'Oglio a été enlevé en juillet 2013 par les terroristes de Daech | Patrick Garety et Olivia Crellin/Wikimedia Commons/CC BY-SA 3.0)
10 juillet 2023 | 10:21
par Lucienne Bittar
Temps de lecture : env. 3  min.
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