Le métropolite Eugène de Tallin, primat de l'Eglise orthodoxe-russe d'Estonie |  DR
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Le métropolite orthodoxe russe expulsé d’Estonie

Le métropolite Eugene de Tallin (Reschetnikov), chef de l’Eglise orthodoxe estonienne du Patriarcat de Moscou, doit quitter l’Estonie, ont indiqué, le 18 janvier 2024, les autorités du pays. Les déclarations du métropolite sur la guerre en Ukraine représentant un «risque pour la sécurité» de l’Estonie, le permis de séjour du citoyen russe ne sera pas prolongé.

Comme l’ont annoncé la police et les gardes-frontières du pays balte, l’autorisation de séjour du métropolite Eugene, qui est ressortissant russe, ne sera pas renouvelée. Il doit donc quitter le pays avant le 6 février.

Selon les autorités, les déclarations du métropolite représentent un «risque pour la sécurité» de l’Estonie. «Ses actions publiques et ses déclarations soutiennent l’agresseur et il n’a pas changé de comportement malgré les avertissements», a déclaré un représentant du service des frontières. La décision concerne une personne en particulier et non les membres de la communauté orthodoxe estonienne du Patriarcat de Moscou, a-t-il cependant souligné.

De nombreux politiciens estoniens avaient déjà demandé l’expulsion du métropolite Eugène en janvier 2023, après que son Eglise eut annoncé une prière commune «pour la paix» avec le mouvement politique Koos, favorable au Kremlin. Un membre haut placé de ce mouvement a été arrêté après une visite dans les régions de l’Ukraine occupées par la Russie; une enquête pour trahison est en cours.

Églises orthodoxes concurrentes

Les chrétiens orthodoxes représentent environ 16% de la population en Estonie. Il existe deux Églises orthodoxes concurrentes : l’Église orthodoxe apostolique estonienne regroupe les fidèles orthodoxes de nationalité estonienne, relativement peu nombreux. Elle est rattachée au Patriarcat œcuménique de Constantinople. L’Église orthodoxe estonienne du Patriarcat de Moscou, plus importante, rassemble les nombreux fidèles d’origine russe et ukrainienne, ces derniers s’étant déjà en partie détournés de cette Église.

Après l’indépendance de l’Estonie, au début du XXe siècle, les communautés orthodoxes du pays ont été détachées du Patriarcat de Moscou en 1923 et placées sous l’autorité du Patriarche œcuménique en tant qu’Eglise orthodoxe estonienne. En 1944, lorsque l’Estonie a été incorporée à l’Union soviétique après la Seconde Guerre mondiale, l’Eglise orthodoxe nationale a été de nouveau placée de facto sous la tutelle du Patriarcat de Moscou. Une situation enterinée par Constantinople en 1978, par la force des choses. L’Eglise orthodoxe estonienne ne subsista alors qu’en diaspora.

Après l’effondrement de l’Union soviétique et le recouvrement de l’indépendance, les Estoniens orthodoxes se sont efforcés de restaurer leur Eglise nationale et de la faire reconnaître par l’Etat et l’orthodoxie mondiale. La reconnaissance étatique a eu lieu en 1993, la reconnaissance ecclésiastique en 1996, lorsque le patriarche œcuménique Bartholomaios a déclaré que la reconnaissance de l’Eglise orthodoxe estonienne, prononcée en 1923, était à nouveau en vigueur. Le Patriarcat de Moscou avait vivement protesté contre cette décision. De fait deux Eglises concurrentes ont existé depuis.

En septembre dernier, le patriarche Bartholomaios s’est rendu en Estonie. L’occasion officielle était le centenaire de l’orthodoxie estonienne indépendante. Le patriarche a également profité de cette visite pour consolider les structures de l’Eglise indépendante et la renforcer face à l’Eglise orthodoxe russe. (cath.ch/kap/mp)

Le métropolite Eugène de Tallin, primat de l'Eglise orthodoxe-russe d'Estonie | DR
19 janvier 2024 | 15:47
par Maurice Page
Temps de lecture : env. 2  min.
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