Le cardinal Edoardo Pironio déclaré vénérable
Le cardinal argentin Edoardo Pironio (1920-1998), organisateur des premières JMJ et considéré comme l’un des inspirateurs de la pensée du pape François a été déclaré vénérable.
Initiateur de la «théologie du peuple» Edoardo Pironio figure parmi les personnalités dont les «vertus héroïques» ont été établies dans des décrets rendus publics le 18 février 2022.Trois religieux handicapés deviennent eux aussi vénérables, et un miracle ouvre la voie à la béatification d’une clarisse italienne.
Né en 1920 et ordonné prêtre en 1943 pour le diocèse de Mercedes, Edoardo Pironio devint rapidement une figure remarquée au sein de l’Église catholique en Argentine. Au début des années 1960, alors qu’il est recteur du séminaire de Buenos Aires et doyen de la Faculté de théologie, Jean XXIII l’invite à participer comme expert au Concile Vatican II. Il devient en 1964 évêque auxiliaire de Mar del Plata, et participe aux deux dernières sessions de Vatican II comme Père conciliaire.
De 1967 à 1972, sa fonction de secrétaire général du Conseil épiscopal latino-américain (Celam) le met au cœur des débats ecclésiaux intenses qui animent les années d’après-Concile. Il est à ce titre une cheville ouvrière de la rencontre de Medellìn, en 1968, durant laquelle l’Église latino-américaine, encouragée par Paul VI, s’engage dans «l’option préférentielle pour les pauvres». En 1972, il devient évêque de Mar del Plata et président du Celam.
Une personnalité centrale des pontificats de Paul VI et Jean Paul II
Proche de la théologie de la libération mais hostile aux lectures marxistes qui imprègnent une partie des recherches théologiques de l’époque, Mgr Pironio se trouve pris entre deux feux, menacé par des groupes d’extrême-droite comme par les guérillas d’extrême-gauche.
Dans l’Argentine chaotique du milieu des années 1970, alors que la présidence d’Isabel Peron est marquée par un délitement de l’autorité publique qui aboutira au coup d’État des généraux en 1976, les menaces se multiplient à son égard et l’un de ses proches amis, le père Carlos Mugica, est assassiné en 1974.
C’est donc, semble-t-il, pour l’exfiltrer et le protéger que Paul VI l’appelle au Vatican en 1975, comme pro-préfet de la Congrégation pour les Instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique, puis préfet de plein droit avec sa création comme cardinal en 1976. Du fait de son aura en Amérique latine, il est considéré comme un sérieux «papabile” lors des deux conclaves de 1978 après la mort de Paul VI puis de Jean Paul Ier.
Le lancement des JMJ
En 1984, Jean Paul II le nomme président du Conseil pontifical pour les laïcs. Ce transfert est alors perçu comme une forme de rétrogradation, ce dicastère étant inférieur à sa précédente charge dans l’organigramme du Vatican. Mais son mandat sera marqué par le lancement des JMJ, dont il sera un organisateur enthousiaste, en bonne entente avec le pape polonais.
Sous son impulsion, la première édition se tient à Rome en 1985 et la deuxième en 1987 à Buenos Aires, capitale de son Argentine natale, qui venait alors de renouer avec la démocratie et de reprendre sa place dans la communauté internationale. Il reste en poste jusqu’au rassemblement historique de Manille en 1995, qui rassemble alors quatre millions de jeunes.
Deux ans après avoir quitté sa charge, il s’éteint le 5 février 1998 d’un cancer des os contre lequel il luttait depuis plusieurs années. Son procès en béatification a été ouvert en 2006 dans le diocèse de Rome, ville dans laquelle il est décédé.
Le pape François a exprimé à plusieurs reprises son affection personnelle pour son compatriote argentin, «l’ami de Dieu, de l’homme et de tous les hommes qui, quand on le rencontrait, te faisait sentir comme l’unique personne qui comptait», avait-il déclaré lors d’une commémoration en 2008.
Vers la béatification d’une figure de l’ascétisme monastique
Un deuxième décret concerne une reconnaissance de miracle attribué à la religieuse clarisse italienne Maria Costanza Panas (Agnese Pacifica, 1896-1963), qui sera donc prochainement béatifiée. Cette moniale de l’abbaye de Fabbiano, dont elle fut la mère abbesse de 1936 à 1950, est connue en Italie pour avoir rédigé 88 livres d’ascèse spirituelle.
Malade et alitée durant les trois dernières années de sa vie, elle a offert ses souffrances à l’intention du pape Jean XXIII et du Concile Vatican II. Son procès en béatification s’est ouvert en 1983, 20 ans après sa mort.
La vocation à la sainteté de religieux handicapés
Trois autres décrets concernent des reconnaissances de vertus héroïques pour des religieux du XXe siècle, ayant vécu des parcours atypiques en raison de leur handicap.
Le religieux carme italien, Immacolato Giuseppe di Gesù (Aldo Brienza, 1922-1989), fut lourdement handicapé durant la plus grande partie de sa vie, et ne fut admis dans la vie religieuse que grâce à une dispense spéciale du Saint-Siège. Alité durant plusieurs décennies, il offrit sa souffrance «en union à Jésus» pour le bien de l’Église et de la famille spirituel du Carmel.
La religieuse brésilienne Benigna Victima de Jesus (Maria Concetta Santos, 1907-1991), de la Congrégation des Sœurs auxiliatrices de Notre-Dame-de-la-Pitié, était une métisse, confrontée au racisme et aux moqueries sur son obésité, due à des dérèglements hormonaux. Elle fut remarquée pour son sens de l’humour et de l’autodérision, et pour son dévouement aux pauvres et aux exclus.
La religieuse espagnole Juana Méndez Romero, dite «Juanita» (1937-1990), eut elle aussi une vie marquée par le handicap. Paralysée après avoir contracté le typhus durant son enfance, elle obtint néanmoins l’autorisation de rejoindre la Congrégation des sœurs ouvrières du Cœur de Jésus. Elle parvint, avec le seul usage de sa tête et de ses mains, à assumer des missions de catéchisme et mena une dense correspondance par lettres avec des missionnaires. (cath.ch/imedia/cv/mp)