«L'attachement des Suisses à la garde pontificale dépasse les frontières confessionnelles», estime Pierre-Yves Fux
«Le professionnalisme et la loyauté des gardes Suisses suscitent chez leurs concitoyens une fierté toute particulière», confie l’ambassadeur de la Suisse près le Saint-Siège à la veille de la prestation de serment annuelle de nouvelles recrues dans la cours Saint-Damase du Palais apostolique le 6 mai. Pierre-Yves Fux a répondu aux questions d’I.MEDIA
Quel est votre lien avec la Garde Suisse?
Pierre-Yves Fux : Les gardes et leurs familles forment l’essentiel de l’arrondissement consulaire dont j’ai la charge. Ces Suisses de l’étranger, qui ont aussi temporairement la citoyenneté vaticane, sont parmi les plus assidus à voter lors des nombreuses votations fédérales ou cantonales. Comme il n’y a que 110 gardes, j’ai la chance d’en connaître la plupart et d’entretenir des rapports personnels très cordiaux avec eux. Chaque 6 mai a lieu l’assermentation des nouveaux gardes, devant un prélat laquelle j’assiste officiellement aux côtés d’un représentant de la Suisse – assez souvent, ce témoin est le président de la Confédération, venu en personne. Cette année, il s’agit du premier citoyen du pays, le président du Conseil national, le Fribourgeois Dominique de Buman.
La Garde Suisse représente-t-elle toujours une fierté pour les Suisses?
Les Suisses voient dans la Garde le souvenir vivant d’un passé militaire glorieux, lié à l’histoire de la Confédération. Le fait de jouir de la confiance des papes depuis cinq siècles est une source de fierté spécialement pour les catholiques. Mais le professionnalisme et la loyauté des gardes font que l’attachement à leur institution dépasse les frontières confessionnelles.
Quelles sont les qualités propres aux gardes Suisses ? Pourquoi croyez-vous que le Saint-Siège continue d’y avoir recours?
L’existence d’une longue tradition, sans que jamais la Garde suisse ait manqué à ses devoirs, joue certainement un rôle pour le Vatican. Le fait que, comme le Saint-Siège, la Suisse soit un Etat neutre n’est pas à négliger, si l’on considère que la Garde pontificale est le moyen et la manifestation d’une souveraineté. Des qualités propres aux Suisses? Si chaque nation a son caractère et son génie propres, il faut relever qu’aujourd’hui, ce dont bien les qualités personnelles de chaque candidat qui sont évaluées. Un avantage largement partagé, tout de même: notre pays est multilingue, et les Suisses deviennent assez vite polyglottes.
Le pape se rendra en visite à Genève le 21 juin prochain. Pouvez-vous nous en donner le programme?
Le programme, riche et précisément minuté, commence et s’achève sur des rencontres et entretiens avec les autorités politiques fédérales. L’essentiel du temps sera dévolu au Conseil œcuménique des Eglises (COE), une institution de la Genève internationale qu’avaient déjà visité Paul VI et Jean-Paul II. Là sont prévus des entretiens, un repas, une prière commune. La partie de la visite accessible à tous est une grande messe dans le Palais des Exposition voisin de l’aéroport (Palexpo): on attend des dizaines de milliers de pèlerins, suisses ou de France voisine.
Comment réagissent les Suisses à l’arrivée du pape François?
Comme partout dans le monde, le pape François suscite une large sympathie en Suisse. On apprécie sa simplicité, qui peut rappeler celle de nos propres ministres circulant en transports publics, sans résidence d’Etat ni grand décorum. Sa manière de saluer personnellement les gardes suisses au Vatican plaît évidemment à mes compatriotes, et mon gouvernement apprécie par exemple ses références fortes au droit humanitaire.
Quelle opinion ont les protestants de cette prochaine visite du pontife?
En 1969, il y avait eu des manifestants contre la venue de Paul VI. La situation a radicalement changé, grâce au dialogue et à la coopération entre confessions. En 2017, à Wittenberg dans l’exposition pour les 500 ans de la Réforme, le seul pavillon catholico-protestant était d’ailleurs celui de la Suisse ! Les chrétiens non-catholiques de mon pays, dans toute la variété des sensibilités, apprécient sans doute la dimension œcuménique de cette visite. Le pape François vient à Genève accompagné de son ›ministre’ pour l’unité des chrétiens, le cardinal suisse Kurt Koch. (cath.ch/ah/mp)