L'ambassadeur Denis Knobel: le Saint-Siège et la Suisse ensemble «pour promouvoir la paix»
Le Vatican et la Suisse offrent une complémentarité pour «contribuer à la paix», a estimé Denis Knobel, nouvel ambassadeur de Suisse près le Saint-Siège, dans une interview accordée à l’agence I.MEDIA à Rome.
L’ambassadeur Denis Knobel, après avoir présenté ses lettres de créance le 13 décembre dernier, a assisté le 5 janvier 2019 aux vœux du pape François au corps diplomatique. L’ancien chef de mission à Sofia est le nouvel ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire en République de Slovénie et auprès du Saint-Siège, avec résidence à Ljubljana.
Comment considérez-vous votre rôle d’ambassadeur près le Saint-Siège ?
Pendant longtemps la Suisse n’a pas eu d’ambassadeur près le Saint-Siège, même si nous avions toujours des relations. Mon rôle est clairement de défendre les intérêts de la Suisse ici au Vatican. Nous représentons une sorte de pont entre les deux pays, et nous sommes là pour soutenir les relations, les projets. Et s’il y a des problèmes, nous essayons d’intervenir et de faciliter les relations. Le rôle-clef est d’essayer d’établir des échanges entre personnes et entre institutions. C’est un rôle classique de diplomate qui défend les intérêts, essaye de rapprocher et de faciliter des liens.
Après l’appel du pape au multilatéralisme dans ses vœux au corps diplomatique, comment la Suisse et le Saint-Siège peuvent-il œuvrer ensemble sur la scène internationale ?
L’appel du pape va tout à fait dans le sens de la Suisse, qui a toujours œuvré pour un système de gouvernance multilatérale et des institutions fortes pour affronter les problèmes de la mondialisation et les défis de l’humanité. Aujourd’hui, il y a besoin d’une gouvernance mondiale, il faut œuvrer à cela.
Le Vatican est un pays minuscule, mais il a un poids considérable par l’universalité de la présence catholique et sa représentation dans le monde entier. Le Vatican dispose du soft power: il ne peut rien imposer, mais il peut contribuer de façon essentielle pour la paix, pour l’environnement, pour le développement centré sur l’homme «dans sa totalité», comme le dit le pape François.
Je note une certaine complémentarité entre la Suisse et le Vatican: nous sommes deux petits Etats, neutres, ouverts sur le monde. Nous sommes deux acteurs importants pour promouvoir la paix et la stabilité, pour agir au niveau du développement et de l’environnement ou encore des migrations. Tant la Suisse que le Vatican sont engagés sur ces sujets et ont des choses à apporter à la communauté internationale.
Quel impact a eu la visite du pape François en juin dernier à Genève sur la relation entre le Saint-Siège et la Suisse ?
La visite du pape aux institutions œcuméniques à Genève a été l’occasion d’un contact au sommet avec le président de la Confédération. C’est un événement important, qui laisse des traces durables sur la relation bilatérale entre le Saint-Siège et la Suisse. Ce d’autant plus qu’elle a été suivie, cinq mois plus tard, par la visite du président Alain Berset au Vatican le 12 novembre dernier.
En une seule année, nous avons eu un double sommet: c’est exceptionnel ! Cela montre l’intérêt des deux parties à se rapprocher, à s’écouter, à discuter de points d’accord ou de désaccord, voire à rechercher des domaines de collaboration sur la scène internationale.
Désaccords sur des questions éthiques
Parmi les désaccords figurent des questions éthiques, notamment sur le suicide assisté qui est légalisé en Suisse. Comment y est entendu l’appel du pape à défendre la vie «jusqu’à sa fin naturelle» ?
Le pape a une voix très importante qui est écoutée, respectée, mais aussi interprétée. Aujourd’hui, nous avons des politiques qui changent, sur des problématiques qui posent beaucoup de questions chez chacun. Nous sommes devant des interrogations nouvelles, qui naturellement soulèvent des réflexions.
L’Eglise et le Vatican ont une tâche morale qui donne des perceptions ou des idées qui peuvent paraître conservatrices. C’est un dialogue que nous avons. Nous n’avons pas toujours les mêmes convictions ou positions, mais cela se fait dans un climat de respect et même d’amitié réciproque.
La Garde suisse, un atout considérable
Comment la Garde suisse, chargée de la protection personnelle du pape, est-elle vue en Suisse ?
C’est pour nous un atout considérable dont nous sommes fiers, d’autant que les gardes suisses sont le groupe international le plus important au Vatican. Ils sont aussi extrêmement visibles et remplissent une fonction cruciale dans la protection du Saint-Père. Il s’agit certes d’une institution du Vatican, mais ces jeunes hommes incarnent nos valeurs et notre mentalité: discipline, loyauté, et disponibilité.
Le Vatican a une volonté d’investir dans cette institution vieille de plus d’un demi-millénaire. C’est un signal extrêmement positif et si la nouvelle caserne est un projet clairement à l’initiative du Vatican, nous sommes là pour le soutenir et pour aider en cas de besoin. Il y a une fondation qui s’est créée pour lever des fonds, et qui est sur le point de lancer une campagne de récolte en Suisse et dans le monde. Espérons que les Suisses et les Suissesses continuent à témoigner leur attachement à cette importante institution. (cath.ch/imedia/xln/be)