Payerne: Le financement des travaux de sauvegarde de l'Abbatiale quasiment bouclé
L’Abbatiale peut regarder sereinement vers l’avenir
Payerne, 11 novembre 2013 (Apic) L’Abbatiale de Payerne affichait, en ce 11 novembre 2013, un regard malicieux. A l’occasion de l’annonce du quasi bouclement du financement des travaux de sauvegarde de l’Abbatiale, les autorités ont affublé l’église symbole de la cité broyarde de grands yeux de tissu.
En entrant dans l’imposante Abbatiale payernoise, l’on est surpris de découvrir engins de chantier, panneaux de contreplaqué et autres éléments signalant que des travaux d’urgence ont déjà été mis en place.
C’est que l’église protestante souffre depuis son édification d’instabilité structurelle entraînant la dégradation des voûtes. S’y rajoutent des problèmes d’humidité qui affectent les décors peints.
L’âme de Payerne
L’ambiance était ainsi au beau fixe lors de la conférence de presse destinée à annoncer au public que les 7,5 millions de francs nécessaires à la restauration de l’édifice ont été pratiquement réunis.
Christelle Luisier Brodard, la syndique de Payerne a rappelé l’importance de l’Abbatiale comme symbole identitaire et haut-lieu culturel de la cité broyarde. «Si chaque ville a une âme, celle de Payerne s’incarne dans l’Abbatiale», a-t-elle assuré.
Pascal Broulis, chef du Département des finances de l’Etat de Vaud, a insisté sur la valeur de la plus grande église romane de Suisse pour le patrimoine vaudois et national.
La démarche de sauvegarde est menée par la commune de Payerne, propriétaire de l’église, en partenariat avec l’Association pour la restauration de l’Abbatiale. La commune a déjà investi quelque 1,625 millions dans des travaux d’urgence. Une aide financière exceptionnelle de l’Etat de Vaud, ainsi que les sommes allouées par la Confédération, la Loterie Romande, des fonds privés et des fondations sont venues compléter ce budget.
Fondations consolidées d’ici 2015
Ces soutiens permettront de lancer rapidement les travaux de stabilisation de l’édifice, ont expliqué les intervenants à la conférence de presse. D’ici 2015, les fondations lacunaires seront consolidées, tant au niveau de la nef que des bas-côtés. Trois années seront ensuite nécessaires à la réfection des toitures et au renforcement de la structure, via un système de tirants métalliques, avant de passer à la valorisation globale du site.
Les étapes sont résumées dans un document intitulé «L’avenir de l’Abbatiale de Payerne», distribué lors de la conférence de presse. Le livret montre notamment, à l’aide d’un astucieux système de découpage, les dommages impressionnants que subirait l’Abbatiale si des travaux n’étaient pas entrepris.
Mais désormais, il semble que les effondrements ne soient plus à l’ordre du jour, et le symbole de Payerne peut voir l’avenir d’un œil serein.
Encadré 1
La Confédération a amené un montant prévu de 1,875 millions de francs, assorti d’un legs de 2 millions. L’Etat de Vaud accorde pour sa part une aide «extraordinaire,unique et non renouvelable» de 1,5 millions de francs, consentie au regard de l’importance hors pair du site et de l’urgence de l’intervention. S’ajoutent les participations de la Loterie Romande avec 750’000 francs, la Fondation Ernst Göhner avec 500’000 francs, la Fondation Sophie et Karl Binding avec 100’000 francs ainsi que des fonds privés se montant à 665’000 francs encore à compléter.
Encadré 2
Edifiée dès l’an 1000, l’Abbatiale protestante Notre-Dame de Payerne est la plus grande église romane de Suisse. Elle était, avant la Réforme, l’église de l’abbaye bénédictine de Payerne. Les rois de Bourgogne, puis les empereurs germaniques y feront de nombreux dons, jusqu’à la réforme protestante et l’expulsion des moines en 1565. Le cloître fut alors détruit ainsi que les bâtiments abbatiaux. Ne subsistent que la salle capitulaire et une aile de l’abbaye qui est inscrite comme bien culturel suisse d’importance nationale.
L’architecture de l’abbatiale est construite selon un schéma clunisien, de l’abbaye française de Cluny, à l’origine d’un renouveau monastique en Occident, au Xe siècle. De nombreux éléments proviennent toutefois d’une inspiration gothique plus tardive (XVe siècle). De nombreux chapiteaux peints sont encore visibles.
L’Abbatiale a été classée en 1899, «édifice religieux voûté le plus grandiose du pays».
Instabilité dès la conception
De par sa construction audacieuse et empirique, l’Abbatiale a souffert dès ses débuts d’une instabilité structurelle entraînant la dégradation des voûtes. En 1945, l’architecte Louis Bosset a tenté d’y remédier par l’adjonction d’un réseau de renforts en béton armé placé sur l’intrado des voûtes de la nef et des bas-côtés. Malgré cette intervention, des fissures ont rapidement fait leur apparition. Elles sont aujourd’hui devenues alarmantes, tout particulièrement dans le bas-côté de la nef, indique le communiqué de presse de la commune de Payerne. A l’instabilité de la structure, se sont ensuite ajoutés des problèmes d’humidité qui affectent les enduits et mettent en péril non seulement les décors peints sur les voûtes des chapelles et du narthex (décors du XIIIe siècle), mais aussi les sépultures découvertes lors de fouilles archéologiques.
Encadré 3
L’Abbatiale est un centre de vie culturelle pour Payerne et la région, note le communiqué de presse. Son rayonnement dépasse de loin les frontières nationales, notamment grâce à son orgue, fabriqué en 1999 par le facteur allemand Jürgen Ahrend. L’instrument, qui est conçu pour l’acoustique particulière de l’édifice, jouit d’une renommée internationale. C’est aussi le cas du musée de l’Abbatiale, qui met en lumière l’héritage clunisien.
Aux travaux de restauration, s’associe le projet de développer encore davantage la vie artistique dans sa diversité, afin de préserver et faire vivre ce patrimoine inestimable, indique le communiqué. (apic/rz)