Film peu scientifique aux yeux des théologiens et des archéologues
Jérusalem: Controverse autour de la tombe de Jésus
Jérusalem, 2 mars 2007 (Apic) A Talpiot-Est, paisible banlieue de Jérusalem, un tombeau qui, selon une équipe documentaire américaine, aurait été la dernière demeure de Jésus Christ et de Marie-Madeleine, est au centre d’une controverse mondiale.
Le 4 mars, la chaîne de télévision Discovery Channel diffusera, selon l’agence oecuménique Eni, un documentaire intitulé «La tombe perdue de Jésus». Ce tombeau vieux de 2000 ans pourrait contenir les reliques de Jésus de Nazareth, de Marie, sa mère, de Marie-Madeleine, qui aurait été sa partenaire, et de Judas, leur fils présumé, ainsi que d’autres membres de la famille de Jésus.
Produit par le réalisateur hollywoodien James Cameron, le documentaire affirme que des analyses étayent l’idée selon laquelle six des dix ossuaires trouvés à l’intérieur du tombeau – aujourd’hui propriété de l’Israel Antiquities Authority, autorité responsable des antiquités en Israël – portent des inscriptions qui les lient à Jésus, fils de Joseph. Simcha Jacobovici, co-producteur, a demandé que le travail archéologique sur le site se poursuive, afin de réaliser de nouvelles analyses d’ADN sur les restes.
Des archéologues et des théologiens ont cependant déclaré que les affirmations du documentaire sont infondées. Stephen Pfann, un théologien de la Bible à l’Université de Terre Sainte à Jérusalem qui a été interviewé dans le documentaire, a affirmé à l’agence Associated Press que l’hypothèse posée par le documentaire n’était pas consistante. Il pense que seuls les sceptiques aimeraient bien voir quelque chose qui remette en question l’histoire chère aux yeux de tant de personnes. Pour les archéologues, le tombeau était probablement celui d’une famille juive portant les mêmes prénoms que l’entourage de Jésus, un nom courant à l’époque.
L’archéologue Amos Kloner, qui a le premier mis au jour le site en 1980, a déclaré au quotidien Jerusalem Post que les prétentions du documentaire sont confuses, mélangeant la réalité et la fiction et déguisant les faits à la manière d’Hollywood.
Le tombeau se situe à environ cinq kilomètres de la basilique du Saint-Sépulcre, dans la vieille ville, où de nombreux chrétiens pensent que le corps de Jésus est resté pendant trois jours. L’Israel Antiquities Authority, responsable du site, qui se trouve sur un terrain privé a déclaré être disposée à rouvrir le tombeau, mais uniquement avec l’aval de la municipalité de Jérusalem. Toutefois, Gidi Schmerling, un porte-parole de la municipalité, a déclaré au correspondant d’ENI qu’aucune demande n’avait été faite en ce sens.
Encadré:
«Absurde selon des théologiens»
Pour les théologiens Max Küchler, de l’Université de Fribourg et son collègue allemand Wolfgang Stegmann, (Université de Neuendettelsau), la thèse du régisseur d’Hollywood, James Cameron, est tout simplement absurde. C’est ce qu’ils ont affirmé jeudi au «Tages-Anzeiger».
Cameron avait prétendu avec des théologiens et des archéologues américains avoir trouvé la tombe de Jésus et de sa famille, ainsi que les restes mortels d’un fils de Jésus dans une antique caverne.
Max Küchler affirme qu’avec de telles suppositions on se discrédite dans les milieux académiques occidentaux. Tous les scientifiques sérieux qu’il connaît à Jérusalem secouent simplement la tête face à la thèse de Cameron. Selon lui, le film exploite des évidences archéologiques avec de prétendus arguments scientifiques. Il déplore la tendance récente de scientifiques ou pseudo-scientifiques à présenter des découvertes prétendues sensationnelles concernant les personnages de la Bible.
Pour Wolfgang Stegemann, l’équipe de chercheurs américains a construit une interprétation maligne de la découverte, à Jérusalem en 1980, d’un tombeau et de 10 sarcophages, plus à partir du roman policier de Dan Brown «Sacrilège» que sur la base de sources antiques. Il a écrit jeudi 1er mars dans la «Neue Zürcher Zeitung» que les «archéologues amateurs» ont découvert sur deux sarcophages l’hypothèse d’un mariage de Jésus avec Marie-Madeleine.
L’interprétation de Cameron va faire naufrage comme le prétendu insubmersible «Titanic», persifle Stegemann. (apic/eni/job/js)